Précédents récits de Nathan

Article : un début de WHV en Australie avec un niveau d’anglais moyen
Article : en Australie, partir en road trip avec des inconnus
Récit : un mois de road trip sur la côté est australienne
Article : la recherche de travail à Cairns
Récit : zucchinis, zucchinis, zucchinis… la cueillette de courgettes
Article : ramasser des courgettes dans le Queensland
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Après m’être bousillé le dos pendant deux mois à ramasser zucchinis et pumpkins, tout ça pour nourrir une poignée de végétariens et d’adeptes de régimes minceur, j’avais une furieuse envie de faire quelque chose d’un peu moins aliénant que de ramasser des légumes. Les zucchinis m’auront malgré tout permis d’économiser 3 700 $, soit pratiquement ce que j’ai dépensé avant de trouver ce travail. J’ai donc assez d’argent pour voyager pendant un bout de temps, avant de me replonger à nouveau dans le monde merveilleux du travail.

A peine sorti de ma prison, je m’attelle donc à trouver de nouveaux compagnons de voyages. Et pour être sûr de ne pas perdre de temps, je me dirige machinalement vers gumtree. Ce site s’est révélé plutôt efficace pour trouver mon travail et mes « travelmates » de la cote est, donc il n’y a pas de raison pour ne pas trouver mon bonheur une nouvelle fois. Je recherche en priorité des gens pour un road trip vers Darwin, mais je suis ouvert à toute autre proposition alléchante. Mes recherches prendront moins d’une semaine. Je tombe sur l’annonce de deux Pornicais répondant aux doux noms d’Antoine et Lucien.

Comme moi, ils veulent relier Cairns à Darwin mais en faisant un petit détour d’à peine 2 000 km par Uluru. Je n’avais pas prévu de visiter le centre de l’Australie maintenant, mais après tout pourquoi pas. A peine ai-je envoyé mon sms, que le dénommé Lucien me rappelle pour me donner rendez-vous dans un bar de Cairns. Ils sont sympa, le courant passe bien et ils rigolent aux mêmes blagues de pédophiles que moi. Comble du luxe, ils sont équipés d’un van tout aménagé, avec électricité, frigo, gaz et matelas. Seul inconvénient : les deux bougres sont Français. Ce n’est pas comme ça que je vais améliorer mon anglais.

Mais mieux vaut voyager avec de sympathiques francophones, qu’avec des connards de native speakers. Deux jours plus tard, je me retrouve donc à arpenter à nouveau les routes australiennes avec mes deux nouveaux travelmates. Le plan est de descendre la côte est jusqu’à Townsville, puis de s’enfoncer dans l’Outback jusqu’à Alice Spring, Uluru et Kings Canyon, avant de remonter jusqu’à Darwin. Les quelques jours passés sur la cote est me permettent de revisiter des endroits que j’ai déjà explorés avec mes anciens compagnons de voyage.

Trois mois après, je retrouve avec nostalgie le lac Eacham, les Mila Mila Falls, Mission Beach et Townsville. Je découvre également quelques endroits que j’ai manqués pendant mon premier road trip, comme les Wallaman Falls, la plus haute chute d’eau d’Australie.

Mais bien que le cote est soit très jolie, il me tarde de découvrir l’aspect de l’Australie qui me fait le plus fantasmer. L’Outback, le bush, le désert, ou peu importe le nom qu’on lui donne. Je veux voir l’Australie de Mad Max et de Bernard et Bianca. Les grandes lignes droites qui n’en finissent pas, les petites villes paumés peuplées d’Aborigènes et de rednecks édentés, la chaleur, la poussière et les gangs de punks près à tuer pour quelques litres d’essences. L’aventure, quoi ! Après une courte étapes à Townsville, nous bifurquons donc vers l’ouest.

Après seulement quelques heures de route, le paysage a déjà radicalement changé. Les montagnes tropicales du nord du Queensland laissent peu à peu la place à de grandes étendues de rien. Des herbes jaunâtres, des arbres morts et des termitières d’un mètre de hauteur. Nous sommes officiellement dans l’Outback australien. Plus l’on s’avance dans les terres, plus la civilisation s’éloigne. Les villes, les voitures, les virages, les gens, deviennent de plus en plus rares, contrairement aux charognes de vaches et de kangourous qui moisissent paisiblement sous le soleil en dégageant cette merveilleuse odeur de pourriture qui a la fâcheuse tendance à faire remonter ma tartine de Nutella matinale le long de mon œsophage.

Avant de partir, nombre de backpackers m’avaient mis en garde : « tu vas voir, l’Outback c’est chiant, il n’y a rien à voir ». Je suppose que les avis divergent selon les personnes. Soit on déteste, soit on adore, mais on ne reste jamais indifférent. Personnellement, je surkiffe. C’est vrai que niveau attraction touristique, c’est pas la folie. Le rythme de mes journées n’a rien à voir avec ce que j’ai pu vivre sur la côte est. Ici, on ne s’arrête pas toutes les deux heures pour visiter un parc national. Le désert c’est plutôt 7 heures de route par jour, une pause à midi dans un roadhouse pour manger et faire un plein à plus de 2 $ le litre et des paysages qui se suivent et se ressemblent.

La seule attraction est de regarder passer les roadtrains et faire signe aux voitures que l’on croise. C’est tellement rare que ça se célèbre. Dis comme ça, c’est vrai que ça a l’air chiant. Mais que nenni ! En roulant dans l’Outback, j’ai l’impression d’être le héros d’un road movie américain dans lequel Uluru ne serait que le MacGuffin. D’ailleurs à première vue, je n’en avais pas grand chose à faire d’Uluru. Après tout, c’est juste un gros caillou rouge au milieu de nulle part. Le voyage m’intéresse plus que la destination.

Malgré tout, ce voyage a offert son lot de rencontres amusantes. Comme Gérard, alias Gégé, un Français d’un peu plus de 60 ans, qui occupe sa retraite en traversant des continents… A vélo. Il a déjà relié La Rochelle jusqu’à la Chine, fait la Patagonie, et traversé l’Himalaya deux fois. Alors autant dire que pour lui, le désert australien, c’est juste une promenade de santé. 100 kms par jour, 4 litres d’eau et quelques cigarettes roulées pour le souffle, Gégé ridiculiserait n’importe quel Lance Armstrong.

La seule « attraction » entre Townsville et Alice Spring, est « Devil’s Marble », située légèrement après la frontière entre le Queensland et le Northern Territory. A première vue, Devil’s Marble c’est juste des tas de caillou. Mais après 3 jours de néant, ce tas de caillou apparaît comme une bénédiction parmi la pauvreté des paysages aux alentours. Le lendemain, nous voici enfin à Alice Spring, située en plein centre de l’Australie. Ce que je croyais être une des 10 principales villes d’Australie se révèle en fait être une minuscule ville d’environ 26 000 habitants. L’ambiance qui y règne est assez étrange. La police monte la garde devant les bottle shops et les stations services vendent une essence spéciale dénuée des substances toxiques qui font « planer », pour, je cite : « empêcher les Aborigènes de se défoncer avec ».

Le temps de faire notre plein quotidien et de faire des réserves de pâtes et de pain de mie, et nous voilà repartis vers ce gros caillou rouge qui a intérêt à envoyer du bois si on veux rentabiliser les 3 000 kms de lignes droites que l’on vient de se taper. Soudain, à un peu plus de 400 km après Alice Spring, je vois enfin le fameux monolithe sacré dressé au milieu du désert. Je ne peux empêcher une larme d’émotion perler délicatement sur ma joue rugueuse et mal rasée d’aventurier. Uluru. Enfin. Bon, en fait, après vérification, il ne s’agissait pas d’Uluru, mais du Mt Conner, un autre gros caillou rouge qui ressemble comme deux gouttes d’eau à son voisin. Le véritable Uluru, apparaîtra finalement après s’être libéré des 25 $ nécessaires pour pénétrer dans le parc national.

Et tout ce que je peux dire, c’est que Uluru est bien plus qu’un vulgaire « gros caillou rouge ». Le rocher est bien deux fois plus gros que ce que j’imaginais. Une fois arrivés à son pied, nous faisons face à un dilemme. Monter ou ne pas monter ? Le site est sacré pour les Aborigènes, et ces derniers ne voient pas d’un très bon œil les hordes de touristes qui viennent le piétiner chaque année. D’autant plus que les accidents arrivent. Pas moins de 35 décès sont déjà survenus.

Pourtant, l’ascension d’Uluru reste malgré tout autorisée [ndlr : c’est désormais interdit depuis octobre 2019 – amende de 10 000 $ pour les contrevenants) et les panneaux explicatifs qui incitent à ne pas le monter sont les mêmes que ceux qui expliquent les règles à respecter pour son ascension. Une rambarde a même été installée pour en faciliter la montée. D’où notre hésitation. Respecter les règles aborigènes, propriétaires des lieux, ou faire comme tout le monde et aller vérifier à quoi ressemble Uluru vu d’en haut ?

Au final nous nous sommes contentés d’en faire le tour. Pour vous donner une idée de la taille du caillou, en faire le tour nous à pris quatre bonnes heures. Mais Uluru révèle toute sa splendeur lorsqu’on l’observe de loin lors du lever et du coucher de soleil. L’admirer en sirotant une bière lors du crépuscule et en buvant un café à l’aube furent l’un de mes meilleurs souvenirs de ce road trip. Quand on pense à l’Australie, on pense aussitôt à Uluru. C’est, avec l’opéra de Sydney, l’un des symbole du pays.

Pourtant, on a tendance à oublier qu’à quelques kilomètres du célèbre rocher, se trouve un autre site tout aussi impressionnant. Les Monts Olga. Si Uluru est un gros caillou rouge, alors les Monts Olga, c’est plein de gros cailloux rouges. Impossible de monter dessus. Ce qu’il y a à voir se situe entre les rochers. L’ombre dégagée par ces derniers a permis à une végétation luxuriante de se faire une place parmi l’aridité du désert. Quelques sentiers permettent d’explorer le site, et l’un d’eux m’a permis de voir le plus beaux point de vue qu’il m’a été donné de voir en Australie.

Après trois nuits passées sur le parking du seul hôtel des environs, nous quittons Uluru pour nous diriger vers l’autre attraction du centre rouge. Après avoir vu des tas de cailloux, un gros caillou rouge et plein de cailloux rouges, nous nous dirigeons vers ce que l’on pourrait appeler un « gros trou ». J’ai nommé Kings Canyon. Marcher à l’intérieur de Kings Canyon n’a en soit rien de très impressionnant.

En revanche, le sentier qui longe les falaise du canyon pourrait justifier à lui seul de faire la route jusqu’au centre rouge. D’un coté des dômes de pierre à perte de vue dignes d’un décor d’un film de science fiction, de l’autre des falaise abruptes à vous donner le vertige. Si vous avez prévu de vous suicider en Australie, je ne peux que vous conseiller de sauter du haut d’une de ces falaises.

Notre road trip dans l’Outback australien touche désormais à sa fin. Nous reprenons la route dans l’autre sens pour rallier Darwin. Je n’ai qu’un regret : ne pas avoir eu de 4×4 pour explorer des endroits plus reculés. Notre van ne nous permet malheureusement pas d’emprunter les nombreuses pistes de terres qui se greffent à la route principale. Ce voyage fut complètement différent de celui sur la cote est, mais fut tout aussi ahurissant. Mise à part bien sur la présence de ces milliers de PUTAIN DE MOUCHES DE MERDE dont la présence sur terre ne semble être justifiée que pour essayer de rentrer dans nos narines, bouches et oreilles. Mais à part ça, difficile de trouver du mauvais à l’Outback australien. Si je devais résumer ce road trip en un mot, je choisirais celui-ci : « supercool ».

Nathan

L'heureux gagnant du concours organisé par pvtistes.net et par conséquent ancien "reporter" en Australie

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(7) Commentaires

anais I |

J’avais loupé ce récit sur le centre rouge de l’OZ 🙁 2 mois et demi après mon retour d’Australie, j’en verserais presque une larme tellement cela me rappelle de merveilleux souvenirs 😉

Fabien I |

Ca fait plaisir à lire !! Moi et un autre français rencontré sur la côte est on a fait exactement le même trajet, mis à part King’s Canyon où on est pas allés à cause du détour que ça nous fesait faire. Et d’ailleurs un mec est mort, tombé du haut de King’s Canyon le jour où on devait y aller..

Bref, sinon ça me rappelle que de bons souvenirs !! Encore les 3 parcs nationaux à voir avant d’arriver à Darwin!

Camille I |

Cool d’avoir respecté le site d’Uluru et d’avoir découvert Kata Tjuta qui sont aussi énormes à visiter! En revanche, je suis désolée que vous vous soyez aussi ennuyés à faire le tour d’Uluru qui, pour nous, était un supplice! 🙂
Bonne route mate

Proserpine I |

Cool article et superbes photos !

Magali I |

« Si vous avez prévu de vous suicider en Australie, je ne peux que vous conseiller de sauter du haut d’une de ses falaises »
Hahaha j’adore !!
J’ai tellement hâte que ce soit mon tour !

isa I |

Toujours aussi divertissant de te lire, et toujours aussi chouette de voir tes images !

Hélène I |

J’aime tjs autant lire tes aventures et admirer tes photos!!!
Vivement la suite et bravo pour avoir respecté le site sacré d’Uluru!