Discussion: Y a tant de choses à dire...
- 18/12/10, 17:32 #1Depuis le 21 septembre, j’ai choisi la relative facilité de m’installer à Montréal.
Une semaine avant mon arrivée, le logement que je devais louer en collocation me passe sous le nez, les faux culs sont décidément partout. Le destin est assez bien fait puisqu’il a voulu que je recroise mon ex-futur-ex colocataire à trois reprises. Je dois lui faire peur la pauvre…
Heureusement que la chance fut de mon côté, un couple de québécois couchsurfeurs acceptent de me loger six nuits dans leur chambre d’ami. Je n’ai plus de contact malgré mes relances, je pense qu’ils étaient surtout intéressés de connaitre une française le temps d’un séjour. Pris dans leur quotidien, peut être ne sachant pas trop quoi me dire, ils ne m'ont plus recontactés.
Ensuite j’ai eu très vite la possibilité de m’installer en collocation au bout d’une semaine sur Crémazie avec un québécois maniaque de l’hygiène. Sympathique mais l’appartement a des allures de cabinet dentaire aseptisé, sans livres, sans TV, sans rien… sans vie. J’ai été très étonnée d’apprendre qu’il y vivait depuis trois ans. Finalement je m’y suis habitué et on s’est vite organisé : partager les courses que l’on faisait ensemble toutes les semaines,… je parle au passé car je dois me rapprocher de mon lieu de travail. Je serai à Angrignon avec une mexicaine.
Pour le travail, j’ai aussi eu de la chance : la deuxième semaine, alors que j’entreprenais mes recherches en faisant le tour des boutiques, la responsable d’un magasin me demande de repasser le Lundi suivant pour commencer. Certes, elle m’a un peu utilisée en ne me proposant finalement qu’un trois quart temps qu’elle a interrompu au bout d’un mois car elle avait des étudiantes à qui donner aussi des heures, mais j’aurais au moins eu ma première expérience québécoise.
Par la suite j’ai enchainé par une semaine d’intérim dans la vente en entrepôt. J’avais alors fait le tour des agences d’intérim et grâce à mon nouveau réseau d’amis, j’ai eu des propositions en call center que j’ai refusé, quel luxe! La roue tourne parfois et miraculeusement sur emploi Québec, j’ai trouvé LE job de secrétaire que je cherchais. (juste après la mission d'intérim). Je travaille à Lachine, grande banlieue de Montréal à plus d’une heure de chez moi pour le moment mais je suis contente car l’équipe fait preuve de patience avec moi. Le boss est un italien canadien au parler assez rude (pas une phrase sans un fuck). Il y a un québécois pure laine, un algérien, un afghan et une canadienne anglophone qui parle français. Le travail en lui-même est assez simple, c’est super et je mesure ma chance !
J’ai aussi investi la maison de la Société Saint-Jean-Baptiste où des conversations sont organisées chaque semaine. Voyant que les débutants se décourageaient, j’ai entrepris de les aider en les formants sur les bases du français : conjugaison, grammaire, vocabulaire… j’ai toujours voulu voir quelles serraient mes capacités organisationnelles et pédagogiques et je suis étonnée de réussir à animer pendant deux heures des cours. Jamais je n’aurai eu cette chance en France. Mon français est loin d’être bon à l’écrit mais ça marche.
Il y a forcément des choses ici qui ne me plaisent pas : les produits du terroir canadien sont bons mais chers et le gouvernement ne semble pas motivé à en faire la promotion. Dieu sait si le marché Jean Talon aurait besoin d’être couvert en totalité pour l’hiver. Montréal est une ville du 21ème siècle qui profite depuis peu du dynamisme de certaines nouvelles technologies, cette ville est peu ou pas mis en valeur, il y a le réseau des transports à repenser (surtout les bus), les rues sont défoncées,… même des maisons magnifiques sur le plateau mériteraient d’être refaites. Ca reste quand même une ville pleine d’animation.
Ce qui m’ennuis aussi, c’est la politique d’immigration : certaines personnes qui vivent à Montréal depuis cinq ans avec un anglais médiocre et un français quasi inexistant. Après ces gens demanderont à leur enfant de lire le courrier et leur expliquer ce qu’ils n’arrivent pas à comprendre. En changeant de pays, vous vous engagez à faire de votre mieux, n’oubliez pas ce qui vous a poussé à quitter la France. J’ai entendu un français qui me disait qu’il était hors de question de faire du bénévolat, qu’il veut être payé pour son travail. Sachez que le Canada n’a pas besoin de vous chers français… acceptez votre condition d’immigré, soyez humbles et motivés, au moins un an !
Les Montréalais sont loin d’être chaleureux, tout dépend aussi de la personne. Il y a chaque jour au moins 2 000 nouveau migrants, vous êtes un sur des milliers, vous n’êtes pas un objet de curiosité pour eux. A moins d’être au Saguenay…
On trouve une mixité rare ici. Rien n’est figé, on ne peut se fier à rien. Il y a de tout : des bavards, des pudiques, des cons, des optimistes, des arrivistes. La vie ici n’est pas fondamentalement différente de Paris où Londres. Les grandes agglomérations canadiennes sont des ilots urbains tout aussi conformistes. Vous vous rendrez vite compte que ce qui change à la rigueur, c’est vous.
Jusqu’ici je n’ai vu que Montréal, le Montorford... et heureusement, Montréal ce n’est PAS LE CANADA. C’est une vision parmi tant d’autre. N’idéalisez pas votre séjour, n’attendez rien des canadiens, ils ont aussi leurs problèmes de société. Ce n’est pas mieux ici, c’est juste un peu différent dans la forme.
Au passage, je tiens à remercier Marie pour prendre le temps de répondre avec gentillesse à chaque question comme si elle était posée pour la première fois. Viviane pour les conseils sur le CV et les personnes qui travaillent à l’enrichissement de ce forum qui, croyez moi, vous aide considérablement dans l’organisation de votre voyage.
Ça c’est une chance que d’autres immigrés non pas !
Maintenant mon projet est de mettre assez de coté pour me faire une visite du pays et pourquoi pas visiter les US ou le Mexique. On verra… Je reste attachée à la France, même si je ne prendrai pas plaisir à revoir la tête de l’hyper président à la TV, les grèves et les idées stéréotypées de nombreux français. Les débats sur l’identité nationale sont tellement loin des préoccupations des canadiens.Dernière modification par fonclea ; 18/12/10 à 17:36.
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- 21/12/10, 20:29 #2Les débats sur l’identité nationale sont tellement loin des préoccupations des canadiens.
Sinon, merci pour tes retours, et bonne continuation
- 21/12/10, 21:05 #3Bonjour Karima
J'aime ton écriture, le message passe bien c'est limpide et direct.
Pourtant je suis pas prof de français ou éditeur !
Tu penses être sur Montréal (ou au Canada) jusqu'à quand ?
Merci pour ce témoignage !
Redouane
- 21/12/10, 21:59 #4Merci, merci, merci et merci! Depuis des mois que je participe à enrichir le forum du mieux que je peux et souvent j'ai l'impression que ce que j'essaie d'expliquer n'est compréhensible pour personne. Tu as réussi à décrire le message que je souhaite livrer depuis mon arrivée sur le forum et aussi depuis que je fais connaissance avec des français, il y a déjà plusieurs années maintenant. Tout ce que tu as rédigé est vrai et terriblement juste. Permet-moi tout de même de te contredire sur la question de l'identité nationale... Les québécois n'en sont peut-être pas à en faire des débats publics toutes les semaines mais c'est un thème qui les préoccupent. On a beau voir défiler des immigrants tous les jours par centaine, on se demande encore où est la ligne qui sépare le vrai québécois du faux. D'ailleurs, je crois que c'est un sujet qui dépasse largement les frontières. C'est un débat qui a lieu d'être partout dans le monde. Par ailleurs, je crois que le Canada, en l'occurrence le Québec, devrait se questionner plus souvent là-dessus. Je qualifie la nation québécoise comme étant flasque et je considère le manque de fougue concernant une quelconque lutte identitaire comme une sérieuse lacune.
Or, merci d'avoir partagé ton expérience ici et d'avoir su dessiner un portrait que j'arrivais à peine à gribouiller.
- 22/12/10, 02:29 #5Merci de vos retours.
Oui c'est vrai que le débat sur l'identité québécoise n'est pas discuté de front mais c'est insidieux. Je pense à juste titre que la société québécoise pourrait vivre des situations aussi difficiles qu'en france voir pire comme aux US. En France, il y a des idées un peu représentatives défendus par pas mal de français. La laïcité entre autre. Et puis vrai y a aussi des français qui en ont rien à b****** de l'identité nationale.
RedOne, j'aime bien ton pseudo lol
Et puis je rappelle le titre "y a tellemeent de choses à dire"
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