Voici un article sur le wwoofing paru en août sur Le Monde, bon c'est du wwoof en France mais ça peut être intéressant quand même
Le wwoofing ? Tout sauf des vacances !, Le Monde, 19/08/09
Lorraine Gublin, Saint-Victor (Ardeche), envoyee speciale
Dos courbe dans le jardin, concentree sur la cueillette des haricots, Lucie, les cheveux noues dans un foulard, experimente son premier sejour en tant que "wwoofeuse". Objectif pour la jeune femme de 23 ans : profiter de ses deux semaines en immersion totale dans une ferme biologique pour decouvrir "une autre maniere de vivre". Lucie est une adepte du "wwoofing", un principe plus simple que l'acronyme dont est issue la pratique (Wwoof : World Wide Opportunities on Organic Farms) : en echange du gite et du couvert, elle participe a la vie d'une ferme biologique.
Ne en Angleterre en 1971, ce principe connait aujourd'hui un succes mondial. D'apres l'association Wwoof United Kingdom, plus de 6 000 fermes bio accueillent des dizaines de milliers de wwoofeurs dans une centaine de pays.
C'est dans la ferme-auberge de Corsas, surplombant les etendues d'herbes seches de Saint-Victor, en Ardeche, que Lucie, etudiante a la ville, a pose ses bagages pour quelques semaines. Pour elle, qui reve un jour de s'installer sur sa propre exploitation, le wwoofing est l'occasion de tester sa resistance a la realite du metier. "Je voulais voir si j'etais capable de ramasser des pommes de terre pendant quatre jours, de desherber... Car il y a une difference entre avoir un petit jardin et produire pour vendre sur un marche."
De fait, ces voyageurs en quete de depaysement, qui profitent de leurs vacances pour sejourner dans les fermes bio, ne sont pas la pour se prelasser au soleil. A la ferme de Corsas comme ailleurs, ils s'immergent dans le quotidien des agriculteurs.
Ancien chef d'entreprise, Julio Soares a tout plaque, il y a cinq ans, pour venir s'installer sur ce bout de terre ardechoise. Seul sur son exploitation, il accueille en moyenne deux wwoofeurs par mois, d'avril a octobre. Et encore, Julio refuse au moins une demande par jour alors que l'association Wwoof France compte 450 fermes dans son reseau. La France est l'un des pays d'Europe qui attire le plus de wwoofeurs (avec l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne). Cette annee, pres de 4 500 d'entre eux ont partage la vie de fermiers bio dans l'Hexagone.
Bavard et un brin militant, Julio a trouve dans ce principe l'opportunite de transmettre ses connaissances. Environnement, decroissance ou vie en societe, les sujets de conversation a table ne manquent pas. "Ce n'est pas une relation patron-salarie. Avec les wwoofeurs, on est alles au cinema, se baigner, a des concerts", ajoute Julio.
Une telle relation n'est envisageable, selon le fermier, que si les wwoofeurs s'investissent pleinement dans la vie de la ferme. Agace de voir le wwoofing presente comme des "vacances bon marche", ce boulimique du travail fait une piqure de rappel : "Nous, on n'est pas en vacances. Ceux qui viennent chez nous ne sont pas en vacances non plus, sinon ce n'est pas un echange. Alors, aller sur une ferme pour partir tous les jours a la plage, ce n'est pas le but."
Les journees sont bien remplies, "parfois hard", precise Julio. Pour autant, les woofeurs n'ont pas le sentiment d'etre au travail. " Tu ne te sens oblige a rien, a la difference d'un contrat de travail", resume Lucie. Pas d'horaires fixes, pas d'obligations de resultats, l'essence meme du wwoofing repose sur le volontariat. Une notion qui pose probleme au fermier, oblige de jouer sur les mots dans les mails qu'il echange avec ses futurs hotes.
Wwoof France souhaiterait, elle aussi, que soit clarifie le statut de ses adherents. "Le volontariat est tres encadre en France. Il faut que les sejours soient prevus a l'avance, qu'il y ait une date d'arrivee et une date de sortie. Le volontariat ne peut pas coller a ce qu'est le wwoofing a l'heure actuelle", deplore l'association. "En Australie, pays accueillant 11 000 wwoofeurs par an, si un jeune titulaire d'un visa Vacances-travail fait du wwoofing, le gouvernement lui permet de rester un an", constate le president de l'association francaise. Face a ce flou reglementaire, la Mutualite sociale agricole (MSA) a decide d'apprecier cette pratique au "cas par cas", afin de verifier que le wwoofeur n'agit pas sous la subordination du chef d'exploitation. "On reste en marge des lois, mais cela ne nous derange pas plus que cela car nous sommes un mouvement alternatif a la base", relativise le responsable de Wwoof France.
Lucie partage l'une des grandes chambres de la maison avec Caroline, une Allemande de 50 ans, arrivee peu apres elle. Levees a 7 heures, les "wwoof-heureuses", comme les appelle Julio, partagent le petit dejeuner - et tous les repas de la journee - avec le fermier et sa fille, avant d'aller nourrir les animaux, cueillir les legumes du jardin, entretenir la vigne, plumer les volailles...
Pour Lucie, c'est une premiere. Pas pour Caroline. Cette biologiste de formation, employee dans une administration en charge de la protection de l'environnement en Allemagne, s'est accordee cinq mois de conge sabbatique pour renouer avec la nature. Avant d'arriver chez Julio, elle a deja "wwoofe" deux mois chez un vigneron, desormais " un ami", aux alentours de Cahors. Lassee d'etre assise derriere un ordinateur toute la journee, Caroline voulait "faire quelque chose a l'exterieur, avec (ses) mains et en lien avec le travail biologique, confie-t-elle dans un francais presque parfait. Le wwoofing, c'est aussi une facon de decouvrir la France. Partager la vie d'une famille, c'est tout autre chose que de partir en touriste."
Pour en savoir plus :
wwoof.fr