De la part d'une Francaise à Montréal.
Vous, jeunes diplomés francais ou trentenaires désabusés, vous qui rêvez de nouveaux horizons, d'une vie plus simple, d'un climat serein, d'un eldorado en somme, et qui pensez trouver tout ca au Québec, cette lettre est pour vous.
Montréal, la grande et belle Montréal, attirante par ses multiples facettes aussi bien culturelles, architecturales ou environnementales, qui brille par ses verdures, son centre ville animé et polyvalent, ses quartiers multiethniques, ses festivals à l'année… Une ville où il fait bon vivre tout simplement, dont moultes Francais sont tombés amoureux, et qu'il est donc bien naturel de vouloir conquérir à son tour.
Oui, mais tout cela a un prix.
Un prix chers Francais, qu'il est important de connaître avant de s'engager dans l'aventure nord-américaine. Sachez le quand même, vous ne venez pas, même si on pourrait en avoir l'impression en arrivant, dans une région de France un peu éloignée. Vous mettez les pieds dans un nouveau pays, qui a ses moeurs, ses procédures, ses visions politiques, et ses habitants, les Québécois, qui même s'ils seront toujours prêts à vous aider, ne vous attendent en aucune sorte les bras ouverts. Il est de plus en plus connu que nos « cousins » outre-atlantique ne sont pas les plus ouverts pour ce qui est des relations amicales avec des inconnus, alors n'espérez pas vous faire des amis locaux en arrivant. Ici l'amitié n'est pas un dû après avoir discuté quelques minutes autour d'une bière, c'est un ensemble de relations qui s'établissent au fil du temps avec des gens avec qui on partage certaines affinités, et qui ont appris à nous connaitre. Certainement, en tant qu'immigrants sans connaissance aucune, on saura adapter nos affinités, mais ce n'est pas le cas de ceux qui sont nés ici (et même des Francais immigrés depuis plusieurs années) et qui n'ont pas besoin de nouveaux amis pour vivre bien. Ce n'est pas pour ca qu'il faut y voir un désintérêt de leur part au contraire, ca s'appelle juste de la patience et surtout... De l'ADAPTATION ! Ce n'est pas le maitre-mot quand on change de pays ?
De la même manière, en arrivant il est commun de chercher du travail, vous aurez l'impression de tout faire comme on vous a dit, de parfaire votre CV à la lettre près, d'envoyer mille candidatures par jour, de faire des efforts pour construire votre réseau et même de vous investir dans le bénévolat. Tout comme on vous a dit, mais vous ne verrez probablement rien arriver. En tout cas au début. Le deuxième maitre-mot : la PATIENCE. Qui va de paire avec persévérence. Non, l'emploi de vos rêves ne vous tombera pas tout cuit dans les mains. Il faut faire preuve de volonté, accepter de repartir à zéro, faire ses preuves. Alors vous finirez par avoir l'opportunité que vous attendiez qui va vous permettre de décoller dans le monde du travail québécois. Le premier bareau de l'échelle est dur à atteindre, mais une fois dessus on se rend compte qu'il est facile de monter. C'est ca, la réalité du marché de l'emploi en Amérique du nord. Et ce n'est pas fait pour tout le monde.
Et parlons d'immigration puisque c'est le sujet. La paperasse, on connait ca en France n'est ce pas ? Tant que vous resterez dans les catégories EIC, obtenir un permis de travail est extrêmement facile. Vous avez l'impression que demander un PVT est compliqué ? Attendez vous à bien pire pour la suite. Car trouver un travail après des mois de persévérence ce n'est que l'entrée du tunnel. Lancez vous dans une demande de permis de travail fermé et vous devrez faire face à des délais de plusieurs mois, des lenteurs aussi parfois de votre employeur qui ne vous prendra pas forcément par la main, du stress quant à l'acceptation de votre dossier... Et peut être faire face à un refus et devoir malgré tous vos efforts rentrer en Hexagone, faute de quoi. Et la résidence permanente ? Ca reste un trophée, une quête de longue haleine qui fait appel à des ressources financières considérables, et qui encore une fois n'est certainement pas ouverte à tous.
Je ne cherche en rien à décourager qui que ce soit, mais à mettre un acent sur les réalités d'ici qu'on a tendance à négliger dans sa préparation au départ. Depuis 18 mois que je vis à Montréal j'ai fait ma place dans le monde professionnel, j'ai des ami(e)s québécois, j'ai construit mes repères, en bref j'habite à Montréal et je m'y plais, parce que j'ai pris le temps de tout construire. Et je vous souhaite à tous également de réaliser vos projets et vos rêves. Mais même en y mettant tou votre coeur, il n'est pas exclu que vous deviez rebrousser chemin après plusieurs mois de galère intense, désillusionnés, avec les poches un peu plus vides. Ce n'est pas pour ca que vous n'en sortirez pas grandis de votre expérience. Gardez en tête que l'échec est possible, et votre réussite vous paraitra encore meilleure.
Pour conclure, oui l'eldorado existe au Québec, mais seulement pour ceux qui arrivent à l'atteindre.