1. #1
    Avatar de nagrom
    Morgan 41 ans

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    Le temps passe si vite, il y a un an déjà le 1er février dernier, je débarquais sur le sol Montréalais accompagné de celui qui se révélera être mon plus fidèle ami, une espèce de second cerveau de l'équipe (destiné à remplacer le premier quelque peu défaillant et/ou absent par moment) : mon sac à dos. Le choix de laisser tomber une vie de boulot derrière un ordi et des lignes de code, de no-life geek gamer (wow, starcraft pour les intimes :geek: ) n'a pas été compliqué. Celui du Canada remonte à l'enfance :"Je veux être ingénieur des eaux et forêts au Canada", je ne me suis que trop éloigné de cet objectif mais l'amour de la nature dans sa globalité (et des castors en particulier), du nord, de "l'isolement", de la marche ont toujours été présents. En revanche je suis grandement allergique aux villes (et à la foule), mais n'aimant pas m'arrêter à certaines idées que l'on pense profondément vérifiées et lucide quant à mon inexpérience, en guise de premier saut j'ai tout de même choisi la "sécurité" et Montréal. Bien qu'ayant exercé dans un domaine relativement porteur dans ce grand pays je pars sans que mon avenir professionnel soit une priorité. J'ai 8000€ sur mon compte en banque au moment du départ, j'espère en prendre la moitié pour le Canada et une autre moitié pour un éventuel WHV chez nos amis les kiwis.

    Montréal 1 mois et demi


    Heureux d'arriver sous une grosse neige et des températures dignes du Canada. Les premiers jours resteront forcément gravés, heureux d'être arrivé même si la grande nature n'est pas encore présente. Après une période petites marches administratives (banque, nas, téléphone...), 6 jours après mon arrivée on me vole tous mes papiers et mon argent et ici commence mon véritable "Bienvenue au Canada". Si jamais ce problème vous arrive j'avais fait un post ici : https://pvtistes.net/forum/administr...tml#post461864. Cela m'aura tout de même occupé un mois de plus dans cet grande ville, le temps de refaire mon passeport. J'en ai profité pour remettre mes pieds à l'entrainement en faisant des marches du matin au soir mais je me sentais tout de même bien à l'étroit et loin de ce que j'attendais. Peu de temps après avoir reçu mes nouveaux papiers j'ai commencé une recherche boulot sans énormément de conviction puis j'ai décidé de foncer vers du Woofing à 200km à l'ouest de Gatineau. J'enfile enfin mon sac, en laissant quelques affaires sur Montréal, après une phase 1 accomplie avec quelques contretemps mais une éternelle et profonde joie d'être ici, me voilà enfin parti vers la phase 2

    Woofing 2 mois


    Un premier bus direction Ottawa puis un second direction campbell's bay, une ferme servant de lieu de repos pour ânes. Une très charmante famille de français immigrés au Canada depuis plus de 15 ans et parents de deux enfants. Du boulot physique comme je l'aime, tout seul à travailler comme un acharné à rénover une grange, à préparer le potager, le jardin... J'ai toujours adoré travailler le bois et ces travaux de construction en pieds et pouces aura été l'occasion de renouer avec mes amis les outils. Je vis la fin de l'hiver et le début du printemps émerveillé chaque jour d'avantage. La nature évolue vite, d'un jour sur l'autre le sol peut se tapisser d'un par terre de fleurs des bois changeant radicalement les lieux. Les animaux ressortent à mesure que les températures remontent. Mes premiers castors en nature, je sors tous les soirs pour les observer. Beaucoup de balade en forêt. Si la nature est une préoccupation primordiale pour cette famille ce n'est pas le cas de la majorité des locaux. Niveau dépenses, elles s'équilibrent en gros avec les entrées qui sont nulles.

    Route, bus, sac à dos, rando 1 mois


    C'est le coeur serré que je quitte cette ferme, mais l'envie de repartir sur la route vers de nouveaux horizons prend le dessus. J'ai rendez-vous dans un peu moins d'un mois avec un des membres des hautes sphères de ce site à Tadoussac avant de monter faire une petite promenade quelque part sur la trans-labrador. En attendant de m'équiper un minimum pour cela, j'enclenche le mode touriste pour deux semaines. Le retour à la ville est un immense choque mais je l'affronte sereinement grâce à la présence réconfortante de mon énorme sac. Il me vaut des grands sourires ou des échanges sympathiques (quelques autre moins aussi...). Avec lui j'affronte Ottawa (j'ai vraiment apprécié cette ville et les musées y sont géniaux), Gatineau et son célèbre parc (qui restera le parc où j'ai été sauvé d'une nuée de moustiques par une énorme averse).

    Ensuite petit tour à Toronto (pour aider une copine à pousser son canap') où je conserve mes meilleurs souvenirs de pseudo sherpa en milieu urbain (avec mon backpack qui se coince aux portiques de métro notamment mais pas que...). Sans rien de vraiment organisé ces balades et ses trajets se décident souvent au dernier moment libre d'aller où bon me semble. Re-Montréal (pour aider un copain à déménager), étrange de se retrouver dans une ville qui parait maintenant familière et dans laquelle on a déjà ses repères et ses habitudes c'est ici que je m'équipe pour la rando, j'en profite pour faire un coucou au copain. Petit tour à Québec pour continuer la route et me rapprocher de l'étape finale. Histoire oblige, je dois aller sur les plaines d'Abraham. Une petite grosse ville bien sympathique, surement la seule qui me rappelle Marseille pour ce qui est des traversées piétonnes uniques. Avant tout, ces villes laisseront un souvenir commun, des perpendiculaires et des feux piétons. Direction Tadoussac que j'ai appelé la ville aux motels (je pense qu'il y en a plus que de maison). Son auberge de jeunesse fort sympathique en plein festival de musique de Tadoussac, mais l'heure de la préparation mentale nous empêchera de profiter de la fête. Un dernier très gros morceau de route nous attend avant d'attaquer notre marche.

    Route sous fréquentée, seuls d'énormes camions font le trajet et empruntent cette route de gravelle qui mène au Labrador. Une bonne nuit de sommeil sur place avant d'attaquer notre fameux trek, qui devra durer 4 jours et pas un de plus, un concert de Supertramp nous attend à notre retour. Aucun chemin, aucun bruit autre que celui de la nature, un seul panneau au début du "parcours" : "Aucun secours ne peut vous être apporté ici : vivez libre". Je me demande si il existe quelque chose de plus grandiose que de partir comme ça en autonomie plusieurs jours au milieu de nul part. Pieds congelés et trempés pendant 4 jours, genoux épuisés, des moments où on se demande ce qu'on fait ici et d'autre où on se sent privilégié de voir ce qui s'étend sous nos yeux ou finalement peu de personnes vont. Premiers contacts avec la mousse de la toundra, premier caribou, premières nuits dans une tente au dessus du 51e parallèle. Par chance il y avait encore de la neige et donc pas trop de ces moucherons carnivores que l'on voit tout de même parfois s'envoler avec un petit morceau de chair (à peine exagéré)

    Retour Québec (coucou les copains je suis en vie), puis Montréal (coucou les copains je suis en vie) où il est maintenant temps de songer à... travailler ? L'été étouffant arrive à grand pas et je ne tiendrai pas 1 jour de plus ici. De la nature encore et encore ! Je sais me débrouiller, je ne me sens plus débutant dans le voyage. 5 mois de Québec ca sera suffisant pour un tout petit premier aperçu, je n'ai qu'un an et d'autres choses à voir. 5 jours plus tard me voilà dans le bus en direction du Yukon. Ce choix était déjà plus ou moins dans ma liste, allier nord (pour les aurores), présence des castors, relative accessibilité, côté soit disant anglophone, en y ajoutant une population d'ours plus élevées que celle des humains.

    Yukon de juin 2011 à maintenant


    Rien que le bus pour y arriver est une expédition en soit. La dernière portion, le début de l'Alaska highway, est simplement magnifique et une fois arrivé ici en été, les longues nuits habituelles ne seront plus avant un bon petit bout de temps et pour un dérangé du sommeil comme moi ça risque de faire des ravages. Arrivé à Whitehorse je tombe sous le charme de son auberge de jeunesse et de mes premières rencontres. Et oui... à mon grand étonnement, je venait chercher du wild mais la chaleur bipédienne y est remarquable. Néanmoins le goudron et ses maudits feux piétons me pousseront à partir un peu plus au nord moins d'une semaine après mon arrivée. Je ne connaissais à peu près rien du Yukon mais je n'étais pas venu ici pour rester dans une ville "ordinaire". Dans le monde du pouceux roi, Dawson city sera donc la prochaine destination.

    Dawson aura été un évènement plus que marquant dans mon voyage. J'avais fait un petit post à ce sujet ici : https://pvtistes.net/forum/vos-impre...du-commun.html. J'y ai travaillé comme plongeur et vécu dans une tente dans les bois. Un petit paradis, premier ours furieux, premières aurores boréales, premières confitures de baies sauvages et champignons sauvages. Quelques sorties à Tombstone park (l'immanquable du coin). Premiers moments difficiles avec le froid également à la fin de l'été. A la fin de la saison j'ai décidé de redescendre sur Whitehorse avec la ferme intention de continuer sur la route et descendre en BC. Finalement un road trip de dernière minute d'une semaine à travers le Yukon et jusqu'à Inuvik m'aura permis de découvrir enfin le bout de cette route : la dempster highway ainsi que Kluane park.

    Les derniers mois sont là, et je réfléchis beaucoup... trop ??!!

    La suite, deux histoires d'amour qui commencent : celle d'un homme pour le nord et celle de cette même personne pour le tronçonnage et fendage du bois. La recherche d'un boulot sponsorisé pour avoir un nouveau permis de travail n'est pas évidente quand il reste peu de temps de permis valide. Finalement en dernier recours c'est passé grâce à une célèbre chaîne de fast food. Ca permet de m'engraisser un petit peu pendant l'hiver mais surtout de faire ma demande de RP (j'attends mon extrait de casier judiciaire qui ne devrait plus tarder et hop le fédéral sera envoyé). Rester sur Whitehorse la goudronnée sera ma concession pour retourner dans le nord accompagné de mon fidèle compagnon qui pleure depuis maintenant plusieurs mois. Le Canada est grand, le nord est vaste il va me falloir plusieurs vies encore pour tout voir. Un jour viendra ou mon armée de castor et moi reprendront le contrôle de ce pays mais ceci est une autre histoire...

    Après cette brève introduction attaquons quelques sujets choisis au hasard. Loin de moi l'envie de froisser qui que ce soit ici, ni la prétention d'apporter des réponses. Juste quelques concentrés d'observations d'une année au final bien trop courte pour espérer avoir un jugement objectif.

    Partir seul


    Partir seul était pour moi le seul moyen de vivre pleinement cette aventure. Tout le travail intérieur ne se fait efficacement qu'avec cette solitude, et ça reste régulièrement mon refuge pour faire le plein de motivation mais également pour les moments plus difficiles. Une amie qui ne prend pas de place, qui nous écoute, nous aide à porter le sac quand il est trop lourd et qui sait se montrer discrète quand il faut (encore que...). C'est bien beau tout ça mais il existe toujours tout de même des moments de doute, surtout quand au final on a été habitué à revoir ses proches régulièrement. Ces moments sont difficiles mais les épreuves les plus durs apportent plus d'expérience. On ne finit jamais d'apprendre sur soi et ces moments y sont particulièrement propices.
    Seul c'est aussi rencontré plus facilement du monde. Dans les auberges par exemple il sera toujours plus facile d'inviter quelqu'un qui est seul plutôt qu'un gros groupe de potes déjà formés. Pour les coloc', couchsurfing, les excursions de dernière minute c'est également bien plus simple seul je pense. L'intégration même est, je pense, plus simple seul pour certaines raisons évoquées plus haut mais il est évident que je n'aurais pas eu autant de conversations avec les locaux si j'étais venu avec ma bande de potes.
    Je change d'avis comme de chemise et je ne prévois jamais rien... certains aiment vivre comme ça, d'autres juste un temps, et d'autres ne supportent pas. Dans mon cas j'ennuie personne avec mon comportement, bref seul c'est encore un peu plus libre.

    Les langues



    Le québécois :
    J'ai souvent entendu ou lu mes compatriotes dénoncer toutes les "fautes" de français, les anglicismes de nos chers et tendres cousins. Je n'arrive pas à comprendre comment on peut concevoir qu'il y ait des expressions, patois, accents différents dans le si minuscule pays qu'est la France, ou que nos cousins belges aient eux aussi des expressions qui leur soient propre et ne pas arriver à transposer cela de l'autre côté de l'océan pour nos cousins qui vivent assaillis et oppressés par notre adversaire historique : les anglois ! Je trouve celà parfaitement insultant de venir ici, de se permettre de critiquer sans même essayer de comprendre ou même de se regarder soi-même . Ce côté insultant, et fier qui est souvent l'étiquette du français n'existe certainement pas sans raison. Ces différences de langages ont souvent été des sujets de conversations mémorables avec nos cousins, des fous rires exceptionnels qui amorcent très souvent une relation plus sincère. J'ai volontairement réduit ce thème aux québécois mais je n'oublie pas tous nos autres cousins francophones de toutes les autres provinces.

    L'anglais


    J'étais bon élève, mais je n'ai jamais pratiqué à l'étranger donc on peut dire que mon niveau approche celui d'une vache espagnole. Il a fallu beaucoup de temps pour que je me jette à l'eau et ose parler, et au final ca reste très long pour vraiment progresser. Il y a énormément de voyageur au Yukon, ils viennent des 4 coins du globes (:O_o et au final il m'aura souvent été plus facile de discuter avec eux qui ont aussi un accent et font (parfois) des fautes. Tant qu'on fait un effort les gens sont toujours extrêmement compréhensifs, ça offre là aussi souvent l'occasion d'aborder une discussion banale (tu es d'ou ? et pourquoi le Yukon ?) au début difficile puis de plus en plus fluide. Comme beaucoup de discipline ça demande de la pratique. Il va me falloir encore beaucoup de temps pour être à l'aise mais ça faisait aussi parti du but de ce voyage.

    Les relations franco-canadiennes


    Un sujet si souvent abordé est un sujet qui doit intéresser, mais je vois difficilement comment le résumer simplement. Ma gamme de relation expérimentée s'étend du coup de poing basique d'un étrange personnage à Montréal, à la découverte d'une deuxième maman. Il est par définition impossible de retrouver la "stabilité" d'une longue amitié quand on voyage et ce n'est pas un but. En sac à dos on rencontre des gens sans arrêt, on partage, des fois on s'attache puis on repart. Un peu difficile au début, puis on s'y fait... On dit d'ailleurs par ici que c'est une des lois du Yukon. On dit également que tu reviens toujours au Yukon, et par chance toute la gang de l'été dernier passant l'hiver au Québec s'en vient la saison prochaine . Très loin d'être naïf voir plutôt même méfiant avec les bêtes sur deux pattes, je peux affirmer avoir eu des relations franches et sincères, aucun sujet de discussion n'a été épargné (les plus épineux souvent même abordés) et cela c'est toujours bien passé. Après, et comme partout, il faut voir avec qui et la manière de faire évidemment mais toutes ces rencontres et discussions ont été un moteur dans mon voyage et mon désir d'immigrer (voila d'ailleurs Ma plus grande surprise). De manière plus générale je pense que l'effort à faire (si on peut parler d'effort) sera toujours de notre côté. Admettre que ça peut se passer différemment qu'en France, accepter la critique si on veut se permettre de critiquer si le désir français est plus fort que tout. Mais venir en voulant recevoir des leçons plutôt qu'en donner changera à mon avis toutes les perspectives d'une "relation".

    Les québécoises (ou canadiennes)


    Que ces messieurs (ou dames) se rassurent il y en a !
    Mais ne désespérez pas trop vite mesdames (ou messieurs), il y a aussi des messieurs.
    C'est à peu près tout ce que je sais sur le sujet et pour rester scientifique, le Canada c est en gros la moitié de la population de la France et une densité de population 30 fois inférieure. Ce qui doit vouloir dire qu'il doit falloir marcher 30 fois plus pour le ou la trouver...

    Le coût (coup ?) de la vie


    Je n'ai jamais fait les comptes, le relevé est fait pour ça et je regarde une fois par mois les sous qu'il me reste sur le compte... Les plus grosses dépenses sont souvent celles liées au logement. Pour ma part j'ai essentiellement dormi en auberge, en tente, chez l'habitant, il n'y a que depuis le mois d'octobre que je vis en payant un "vrai" loyer. J'ai tout de même passé un peu de temps à chercher ces logements et il est indiscutable que les prix pratiqués à Montréal n'ont rien à voir avec ceux du Yukon. En fait ici tout est un peu ou beaucoup plus cher qu'ailleurs et on observe les prix grimper en montant encore plus au nord. J'ai la chance d'être dans cette coloc' grâce à des contacts mais son prix n'a rien à voir avec les prix pratiqués ici. Sans quoi une partie trop importante de mon salaire passerait dans le logement, heureusement l'entraide, la dépanne, la récup' sont rois ici. Globalement, sans voiture ni téléphone j'arrive tout de même à m'y retrouver et à songer à jouer mon rôle de consommateur en changeant mon appareil photo . Pour schématiser un peu plus je trouve que le coût de la vie au Canada est relativement le même qu'en France, avec les disparités qu'on peut connaître ne serait-ce qu'entre Paris et la province.

    Le monde du travail


    En dehors du wwoofing au Québec je n'ai travaillé qu'à Whitehorse et à Dawson city. Je ne suis pas regardant niveau style de boulot, j'aime faire à peu près tout. Je sais aussi que mes méthodes de recherches sont à plusieurs vitesses de motivation. Et qu'il n'y a qu'à fond que ça marche, le monde du travail canadien ne m'attendais pas... Actif et motivé seront les clés ensuite tout s'enchaîne souvent très vite. On s'encombre peu avec les détails administratifs et on met directement les mains dans le cambouis ici. Travailler avec d'autres migrants, voyageurs et dans une autre langue ajoute une touche d'originalité non négligeable et une ambiance de travail fort sympathique. Mais travailler c'est arrêter de voyager et laisser la place à cette maudite routine. C'est aussi maintenant devenu le moyen d'avoir ma RP et comme ma boss disait :"Ca veut dire liberté !". Là aussi, comme en France, si on ne recherche rien de spécifique on peut trouver assez facilement, plus on cible et plus c'est difficile. Le réseautage est plus qu'important (voir vital dans le Yukon).

    Le froid


    Il y'en a qui disent qu'il fait froid ! Mais pas du tout, d'ailleurs nous venons tous ici dans ce grand pays réputé pour sa chaleur, ses cocotiers et ses plages de sables fins . Le froid et l'hiver canadien font partis de mes motivations également et depuis le début. Comme je me lève toujours heureux un matin de pluie, un matin de grand froid en vélo sera mon petit rayon de soleil pour la journée. J'ai parlé de ce sujet récemment concernant le Yukon (ici) donc m'éterniserai pas. Mais ce n'est vraiment pas la mort selon moi (ce qui n'est pas l'avis de la majorité suivant le jour). Pour résumer donc tout ceci n'est vraiment qu'essentiellement une histoire de chaussettes .

    L'histoire du pays


    Et oui... j'ose employer ces mots ! Certes, l'histoire des européens ici est relativement courte ce qui n'empêche nullement de parler d'histoire. Je sais qu'il n'est pas possible de parler de tout à l'école mais je regrette grandement que ce coté de l'atlantique soit pratiquement occulté de nos programmes. Il y a largement de quoi s'instruire et de se repencher en parallèle sur l'histoire de l'Europe donne un sacré élargissement à sa vision de "l'histoire".
    Pour ce qui est du Yukon c'est pire et je m'insurge ! . Que le fier français riche de toute sa culture mondialement connue me dise "Ouais pfff des ruines en taule qui n'ont qu'un siècle" ça passe encore, où du moins il va vite me répondre "Ouep mais y a pas de château-fort" , mais maintenant même les locaux s'y mettent... Il y a plus de 20 000 ans les tous premiers colonisateurs sont restés ici bloqués par la glace quelques milliers d'années avant de pouvoir emprunter divers chemins vers le sud et coloniser tout le continent américain. Ensuite seulement la vieille Europe est venue et c'est après avoir ravagé qu'on commence à remonter l'histoire... Affirmer qu'il n'y en a pas parce qu'on ne la connait pas ne restera qu'une fourberie
    Si je résume donc d'un côté on ne parle pas d'histoire parce que ça n'a que quelques siècles et de l'autre parce que ça en a trop ? :O_o:

    Conclusion


    Il est impossible de raconter tout ce qu'une telle aventure peut apporter, impossible de choisir un "meilleur moment". Je ne sais même pas ce que je vais raconter à mes proches quand je les reverrai... Toute cette expérience est tellement personnelle finalement. Quitte à changer de vie ne serait-ce qu'un an et si on peut se le permettre, les WHV peuvent véritablement être aussi un tournant dans une vie et le début d'une nouvelle (ce qui veut aussi dire repartir à 0). Que le choix soit ville ou trou perdu, côtoyer une autre culture m'aura apporté une bouffée d'oxygène inespérée et je pèse mes mots, et tout ça sans parler des castors... Je sais que mes amis pessimistes risque de trouver ce retour un peu trop "Pays des bisounours" malheureusement mon aventure c'est bien passée et se continue plus que bien. Et si vous aviez vu tous ces arcs-en-ciel à Dawson cet été (des fois 4 en même temps) donc si ça ce n'est pas le pays des bisounours je ne comprends plus rien !
    Dernière modification par nagrom ; 08/02/12 à 10:01.


  2. #2
    Avatar de Cedric
    Cedric

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    De toute façon, les Bisounours sont une espèce en voie de disparition et il faut les protéger à tout prix (parait-il).

    Merci pour ce beau retour sur ton expérience et bonne continuation dans tes aventures !


  3. #3
    Avatar de lapoire
    Mathieu 43 ans

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    Ah sacré Morgan ! Tu nous a pondu un magnifique pavé et sa lecture est captivante

    Merci pour ce magnifique retour sur ton expérience au pays des castors et des sous-marins 6 pouces !!!


  4. #4
    Avatar de JMlescastors
    Emilie 41 ans

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    Bon je ne pouvais pas m'empêcher de laisser mon petit commentaire! La lecture de ton texte m'a fortement émue bizarrement! C'est magnifique tout ce que tu dis ! Et puis je veux bien faire le recrutement des castors pour ton armée


  5. #5
    Avatar de Kiwilekiwi
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    Récit captivant ! c'est très agréable à lire. Si tu pouvais revenir en arrière, qu'est ce que tu changerais dans ton parcours (t'organiserais tu différemment ? ...). Avant de travailler, sur les 8000 € tu en as dépensais combien ? et à ce jour combien te reste t-il ?


  6. #6
    Avatar de vancounessa
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    Quelle aventure ! Ton parcours est vraiment intéressant et très enrichissant, c'est vrai que parfois les meilleurs moments sont parfois ceux qu'on ne planifie pas forcement. Franchement, j'ai été heureuse de te lire à nouveau
    Bonne continuation et bon courage pour la suite de tes démarches


  7. #7
    Avatar de Ayuno
    Anthony

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    Très sympa retour, j'ai pas zappé une ligne


  8. #8
    Avatar de nagrom
    Morgan 41 ans

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    Merci à tous !

    Message de lapoire
    des sous-marins 6 pouces
    Sous-marins radioactifs 6 pouces

    Message de Kiwilekiwi
    Si tu pouvais revenir en arrière, qu'est ce que tu changerais dans ton parcours (t'organiserais tu différemment ? ...).
    M'organiser différemment... je ne sais pas morganiser ...
    Si je pouvais revenir en arrière je ferai un parcours complètement différent que celui là, vu que je le connais maintenant
    Plus sérieusement si je commence à réfléchir "j'aurai du faire ça et ça" je ne m'arrêterai jamais. Comment regretter de vivre au jour le jour ?? Par contre au niveau logistique je me suis très mal organisé, je suis parti sans ma tente pour vivre au pays du camping et sans l'essentiel de mes affaires d'hiver au Yukon par exemple... Mais bon on ne se refait pas, et j'aime les anecdotes qui soulignent ma stupidité

    Message de Kiwilekiwi
    Avant de travailler, sur les 8000 € tu en as dépensais combien ? et à ce jour combien te reste t-il ?
    Niveau compte refaire une évolution sera compliqué. Mais j'ai essentiellement fonctionné avec mon compte français pratiquement tout le temps. Ce que je sais c'est que j'ai dépensé bien plus que prévu sans pour autant avoir fait d'énormes folies. Quelqu'un qui sait compter aurait dépensé bien moins que moi pour la même chose. Par exemple pour les bus je conseille toujours de se renseigner et d'acheter 21 jours à l'avance (c'est demi tarif) mais moi je vais quand même acheté mon billet sur un coup de tête pour partir de suite.... Ce qui a mis la plus grosse claque à mon compte reste l'équipement pour le trek, et la location de voiture pour le road trip au Yukon (à eux deux ça doit faire 2000$-2500$). Egalement un nombre de nuit incalculable en auberge ce qui revient assez cher à la longue.
    En gros à l'heures actuelle il me reste 2500€ et 3000$ en ayant gagné en gros 5000$ je pense

  9. #9
    Avatar de Alex-France
    Alexandre 35 ans

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    Très beau résumé, très intéressant à lire.. have a good trip


  10. #10
    Avatar de Sim28
    Sim

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    Un grand GRAND merci pour ce beau texte


  11. #11
    Avatar de yepaland
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    Merci Morgan pour ce retour formidablement écrit ! Carpe diem

    Bonne continuation (RP + Nouvelles aventures)


  12. #12
    Avatar de Cyndy
    Cyndy

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    Il n'y a rien de bisournours dans ton histoire, ça s'est bien passé, parce que c'est toi Morgan, c'est ton point de vue et ton caractère bien plus positif que tu le dis, qui donne ce récit :thumbsup2: Je pense que tu le sais bien

    Moi je suis admirative de ton parcours, je me souviens avec un émotion (oui, oui) de toutes nos conversations et de ce par quoi tu es passé parfois. J'étais sûre que tu y arriverais et je suis sûre que tu vas tenir le coup jusqu'à la RP maintenant


  13. #13
    Avatar de nagrom
    Morgan 41 ans

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    Encore merci à tous, mais remettons le "beau" à sa juste valeur

    Message de Cyndy
    Il n'y a rien de bisournours dans ton histoire, ça s'est bien passé, parce que c'est toi Morgan, c'est ton point de vue et ton caractère bien plus positif que tu le dis, qui donne ce récit Je pense que tu le sais bien
    Je reste profondément pessimiste mais effectivement ce voyage m'aura permis de repartir à 0 et donc de mettre de côté tout à pripri sur l'espèce humaine mais aussi d'apprendre à renouer contact avec elle. Je ne me fais néanmoins pas plus d'illusion quant à son faux potentiel

    Message de Cyndy
    Moi je suis admirative de ton parcours, je me souviens avec un émotion (oui, oui) de toutes nos conversations et de ce par quoi tu es passé parfois.
    Si tu peux retenir une chose c'est qu'il n'y a pas à être admirative mais juste que ce n'est pas si difficile de sortir des sentiers habituels. Effectivement nous avons pas mal parlé, mais regarde plutôt ton frère, ce que ça lui apporte et comment il va te remercier (ou pas ). le PVT ça peut tout simplement être le début du changement tant espéré d'une vie et/ou d'apprendre à se connaitre encore un peu mieux...

    Message de Cyndy
    J'étais sûre que tu y arriverais et je suis sûre que tu vas tenir le coup jusqu'à la RP maintenant
    Y arriver à quoi je ne sais pas . Mais tenir jusqu'à la RP j'y compte bien, ils ne vont pas se débarrasser de moi comme ça....


  14. #14
    Avatar de Miya83
    Morgane 41 ans

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    Superbe récit!! J'ai adore te lire!!


  15. #15
    Avatar de fab06
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    Alors là juste une chose: MAGISTRAL!!!
    J'ai adoré ton récit des tes aventures et je dois dire que c'est écrit de manière intelligente et délirante à la fois donc que du bonheur.
    Cela change des récits linéaires que j'ai pu lire (qui sont très sympa aussi, me faite pas dire ce que je n'ai pas dit ^^)

    Maintenant j'ai qu'une envie c'est d'être en 2014 et de partir à l'aventure avec ma copine sauf qu'il y aura moins de nature que toi dans notre périple mais j'espère tout aussi passionnant et riche en rencontre.


  16. #16
    Avatar de CaroA
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    Merci pour ton témoignage vraiment intéressant. Visiblement, ton PVT se devrait d'être un voyage initiatique et il a pleinement rempli sa fonction.J'espère qu'entre temps, tu as eu des nouvelles pour ta RP et que tu as pu rester.


    Je te rejoins sur la culture et l'histoire du pays. Je pense que nos habitudes d'Européens nous poussent à rechercher l'histoire d'une ville avec les yeux : architecture des rues, des maisons et monuments historiques.
    Alors qu'en fait, au Canada, l'histoire, c'est avec les oreilles qu'elle se découvre, sous formes de contes ou de témoignages.


    C'est un pays marqué par les colonisations, les mouvements de populations, la lutte pour la transmission et le maintien des traditions.
    Certains peuples ont vécu des choses terribles (et je ne parle pas que des Autochtones), ils ont été chassés, décimés ou réprimés, ont dû se battre pour que leurs cultures ne disparaissent pas. Les descendants sont fiers de cet héritage et c'est un vrai enrichissement qu'écouter ces témoignages du passé, apprendre à comprendre pourquoi ils sont si fier de leurs cultures et de leurs origines, découvrir ce que leurs ancêtres ont vécu.
    Mais bien sûr ça, quand on vient en touriste pour 10 jours, on n'y a pas accès et c'est normal. On est bien chanceux, nous qui avons la possibilité de rester plusieurs mois/années, car c'est tout un monde culturel totalement inconnu qui s'ouvre à nous… si on prend le temps de tendre l'oreille :-)

    Tu aimerais surement le Manitoba...


  17. #17
    Avatar de nagrom
    Morgan 41 ans

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    J'avais complètement oublié ce post, c'est rigolo de se relire mais beaucoup moins de ne pas pouvoir éditer pour corriger ces horribles fautes...

    En tout cas encore merci pour vos commentaires.

  18. #18
    Avatar de nagrom
    Morgan 41 ans

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    Bientôt trois ans déjà que je suis arrivé au pays des castors, l'occasion de repasser par ici vous faire un petit retour. L'histoire s’arrêtait à l'obtention de mon permis de travail via le Yukon Nominee Program et l'envoi de mon dossier pour la RP il y a deux ans. J'étais donc toujours dans une maison en colocation dans la capitale yukonnaise.

    L'école de l'Immigration au pays du sandwich

    Alors que l'immigration est un quasi gros mot en France, se mettre dans la peau de « l'autre », du migrant, a été une expérience pour le moins enrichissante. Grâce à ce fat-food j'ai eu la chance de subir une formation approfondie et accélérée. L'équipe de travail se composant d'un japonais, un coréen, 27 philippins et un français, les mots travail et immigration deviennent intimement liés. Tous en attente, en cours de processus pour la RP mais pour des raisons parfois diverses. Les raisons économiques motivent l'essentiel de mes camarades philippins, faire le «sacrifice» de partir dans le grand nord et son hiver éternel pour un salaire rêvé de 12$ permet de faire vivre la famille encore au pays. A leurs yeux, le migrant venant du pays de la Eiffel Tower et du french kiss reste une totale énigme qu'ils appelleront Napoleòn. Mais ce grand pays, bien que sans tour Eiffel, est connu pour accueillir chaleureusement et simplement les migrants : «Un passeport acheté, le deuxième offert» certains disent-ils en rigolant.

    De l'autre coté du comptoir l'essentiel de nos clients sont des habitués. Certains n'ont même pas besoin d'énoncer leur commande. Si le titre du métier est sandwich artist, nous sommes pour beaucoup de nos clients bien plus que des artistes cela se voit dans leurs yeux quand il nous regarde poser vigoureusement les tranches de tomates presque trop parfaites pour être vraies. Pour eux un sandwich qui coute plus d'une heure de travail de ce «pauvre» artist n'est pas grand chose, et il faut avouer que la sympathie et le sourire sur le visage de mes collègues n'y est pas pour rien dans la fréquentation du «restaurant». Nombreux sont les clients qui envoient des mails à la maison mère pour nous féliciter. Surement les joies de vivre dans une petite communauté du nord.

    Passés ces clients fortement majoritaires nous avons également régulièrement à faire aux bons franchouillards de base (râleurs pardon). Ceux qui nous crient à la figure « Vous venez voler nos jobs », « Retournez dans votre pays ». Un discours qui n'a définitivement pas choisi d'oublier ce petit coin perdu d'un pays soit-disant épargné. Étant entendu bien évidemment que travailler dans un fast food est dans l'échelle des jobs comparable à la France (en dessous de la première marche donc), et que rares sont les canadiens «pure souche» rêvant d'une carrière chez le roi du sandwich au dessus de 60e parallèle. Ces clients ne semblent malheureusement pas réaliser que sans ces «voleurs de jobs» ils seraient obligés de se faire eux même leurs sandwichs.

    Mes collègues de travail prennent ça avec le sourire (dangereusement contagieux) la plupart du temps, mais je les ai vu pleurer aussi. C'est toujours déroutant de faire un job, considéré ingrat, d'y mettre tout son cœur et de s'en prendre plein la figure. Mettez vous à la place deux secondes d'un père de famille qui laisse sa femme et son fils au pays qui fait du sandwich 8h par jour 6j/7 se faisant insulter par quelqu'un à qui il doit dire merci et montrer ses belles dents blanches. Comment avec ce genre de réaction peut-on blâmer le migrant de se tourner vers les siens et une certaine forme de communautarisme ?

    De mon coté j'arrive à en faire abstraction pour éviter de couper le client en tranche de 6 pouces. J'avoue parfois avoir envie de faire ressortir mon accent et mes insultes provençales pour lâcher toute ma haine sur ce client mais l'uniforme me l'interdit. Parce que oui plus que tout j'aspire à rester au Canada, je n'en conserve pas moins mes origines et la bonne mère a des pieds bien assez grand pour ses petites fesses. Ma blancheur dans ce milieu m'aura permis d'entendre des « Mais tu es blanc, qu'est ce que tu fais là ? », « Merci mec, le meilleur sandwich que j'ai jamais mangé ! Tu es le premier blanc à nous faire notre sandwich depuis notre trip ». Ca me dégoute tout autant mais avec le sourire (forcé), au moins mes camarades ne sont pas en premières lignes.

    Après de nombreux jobs, cette expérience de travail restera certainement la plus mémorable. Le boulot n'était pas des plus valorisants mais l'expérience humaine bien plus riche qu'espérée. Passer de développeur dans le monde de la carte vitale en Provence pour atterrir vendeur de sandwichs de fast food pas loin du cercle polaire ne se situe pas vraiment dans les schémas classiques et attendus d'évolution de carrière certes. Mais enlevés l'uniforme et la casquette il reste que je considère avoir participé à ma plus belle école de vie dans le monde du travail. Au diable l'évolution, je vis pour apprendre.

    RP, démission, retour en France

    Le deal était ainsi, j'étais clairement à ce post pour ma RP. A sa réception la patronne me tape dans les mains en criant "LIBERTéééééééééééééééé", William n'aurait pas fait mieux. Mais je décide de rester travailler le temps des fêtes avant de rentrer en France. Je suis parti en disant que j'allais faire une petite balade d'un an au Canada, je reviens avec un an de retard et résident permanent.

    L'angoisse sera le sentiment dominant du voyage... Partir du Yukon dans lequel je suis coincé depuis 1an et demi, en cette magnifique journée d'hiver pour arriver en survolant Berre l'étang (mais surtout ses raffineries)... non, l'image ne passe pas... Le survol du pays me rappelle a quel point la densité de population a toujours été une raison importante de mon départ. Mais la France est belle, je regarde la carte indiquant notre position avec excitation. Que de belles régions, de la bonne bouffe... hmmmmm je sens déjà l'odeur d'une bonne vieille tome de montagne entourée de charcutaille (de la vraie).

    J'ai tellement de chose à raconter, en dehors de quelques articles dans un blog je ne donnais pas de nouvelles aux proches... Par ou commencer ? J'ai l'impression d’être parti hier, que rien a bougé pendant toutes mes « aventures ». TF1 est toujours là. Je me réjouis de retrouver mes proches, là aussi rien n'a changé nous avons juste pris un coup de vieux. Je me soule à radoter des « vieilles » anecdotes canadiennes aux uns et aux autres. Chaque histoire est une aventure tellement personnelle qui devient fade une fois racontée. Chaque jour passé au chaud à la maison familiale est un jour de loupé là bas, chez moi... Le nord me manque, ma hache, ma pile de bois et savourer ma liberté, enfin !

    Un passage au ski dans les Alpes me remontre la beauté des montagnes. En France on les parcourt par des routes sinueuses, il y a des stations un peu partout dans des paysages magnifiques. Nous sommes nés avec ça, cette beauté devient presque une banalité. Au Yukon, les routes sont droites, les montagnes au loin.

    1 mois ça passe vite, j'ai l'impression de ne pas avoir dit l'essentiel à mes proches. Ce n'est qu'au moment du départ que me reviennent tous ces moments de solitude à penser à eux et je retourne vers cela pour une durée indéterminée.

    Retour au Yukon... pour de bon

    A ce moment il me reste environ 6000$ et 1000e, je paie toujours pour ma chambre à Whitehorse un loyer que je considère « demi-tarif » vus les prix habituels du coin. C'est le mois de février, il reste un peu moins de 3 mois d'hiver. J'ai dans mes plans un petit trip de canot pour la fin du printemps avec un ami de l'Abitibi qui vient chaque saison travailler au Yukon, d'ici là je dois me transformer en vrai résident yukonnais. Voyant venir les grosses dépenses arriver je décide de retourner faire du sandwich où j'étais le bienvenu.

    Suit achat de voiture, après tout ce temps en vélo ou à pied, c'est un évènement important. C'est non sans difficulté que je parviens à l'assurer et obtenir la tant désirée plaque du Yukon. Je pars directement fêter ça avec un petit trip de 500km et du camping. 1 ans et 4 mois, « coincé » à Whitehorse, à travailler 50 heures semaine sans avoir pu profiter (ou très peu) de ce pourquoi j'avais fait tout ça : un immense terrain de jeu à découvrir qui m'émerveille chaque fois d'avantage et qui me retient inexplicablement. Je peux maintenant parcourir ses routes par mes propres moyens, c'est une grosse première réjouissance.

    Les derniers achats d'équipement pour la petite sortie en canot. Nous emprunterons la Teslin river puis la Yukon river jusqu'a Dawson city soit environ 800Km. Des petites marches, sessions pêches, du camping sauvage et quelques coup de rame seuls au milieu de nul part - grosse deuxième réjouissance. La vie dans les bois peut facilement être rêvée, fantasmée mais elle est tout ce qu'il y a de plus basique : feu, bois, eau, abris, riz/pâte. L'amour de ces choses essentielles et s’accommoder d'un manque de confort certain ceci sans compter les moustiques. Les récompenses sont là, de la vie sauvage tout autour de nous (sans compter les moustiques). Un peu trop proche quand un ours grogne en face de notre tente, un moment redouté, qui parait certainement surfait raconté mais qui restera un souvenir inoubliable pour deux compagnons d'aventures.

    Si beaucoup descendent la rivière rapidement nous choisissons la longueur. La route (ou plutôt l'autoroute) est chargée d'histoire des vieilles cabanes en ruines aux petits villages fantômes. Nous faisons durer le plaisir mais le courant nous mène finalement à destination : Dawson. 2 ans que j'attendais ce retour mais cette année je débarque en canot. C'est assez pour moi pour compter cela comme une grosse troisième réjouissance.

    J'ai du mal à me remettre de ces magnifiques vacances, tant attendues mais déjà terminées. Les nouvelles en villes pendant cette première semaine sont : « un ours a saccagé la tente d'un campeur » bin oui je sais c'était la tente de mon voisin de camping, « un grizzly a tué un moose sur le terrain de golfe » ah c'était pas loin... ok je suis bien toujours au Yukon. J'apprends également la disparition puis la mort d'une personne qui a fait la descente de la rivière dans les mêmes dates que nous. Des drames arrivent chaque année sur la rivière, on le sait en faisant ce genre de trip mais j'en prends une autre mesure ce jour là.

    Dawson : Des Cheechakos et des Sourdoughs

    Un Cheechako est un nouvel arrivant dans le nord. Celui qui ne sait pas conduire, ne sait pas se servir d'une hache, démarrer un feu... c'est celui qui vient du sud. Passé un an on devient un Sourdough.

    Cette petite distinction peut paraitre primaire. Pour moi elle a pris son sens après avoir passé un an ici : un cycle complet des saisons. D'avoir connu la descente vers l'hiver, la longueur de l'hiver, la presque sortie de l'hiver, la saison de la boue puis celle des moustiques et on recommence.

    Si au premier plan la chaleur des locaux est toujours aussi remarquable qu'a ma première visite, ma position de non local mais pas tout à fait que saisonnier me laisse voir ce « clivage » sous un autre angle. Dawson, cette petite ville d'un peu plus de 1000 âmes perdues dans le nord où les locaux, à peine sortis d'un hiver enregistrant record sur record de froid voient débarquer tous ces bus de touristes, ces voyageurs/travailleurs en backpack. Les touristes regardent parfois les locaux comme des bêtes de spectacle : « Est-il sincèrement réellement possible de vivre ici à l'année ? ». Les saisonniers-fêtards échangent avec les locaux avec une certaine envie, voir admiration mais ne comprennent pas qu'ils ne fassent pas plus la fête.

    Un local, Sourdough de fait et les dawsonites sont non des moindres, sait que le laps de temps entre deux hivers est court, et qu'il ne peut faire la fête quand son bois, ses provisions, sa viande sont prêts pour l'hiver. Il a d'autre chose à penser, et n'a pas besoin de leçon ni sur le comment fêter ni sur l'âme particulière de la ville. J'ai entendu des locaux me dire à propos des saisonniers : « Ils ne comprennent pas bien que la vie est dure ici ». Ce « dure » n'a pas le sens d'une quelconque plainte, mais vivre ici exige réellement des efforts, tellement qu'il faut même aimer en fournir et en fournir encore.

    Il y a également toutes les activités autres que les bars de Dawson. Les champignons, les baies, la pêche, la chasse - les plaisirs immédiats et les provisions pour l'hiver. Dans toute collecte il y a sa part personnelle et la part à offrir. Seul un Cheechako pourra refuser le cadeau en ignorant l'offense que cela représente. Le généreux Sourdough se vantera toujours que cela représente ce qu'il a de meilleur à offrir. Mes très sélectives papilles gustatives lui donne raison (sauf pour le museau d'orignal peut être).

    Pendant cette saison je travaille dans le même restaurant que deux ans auparavant. Je passe l’essentiel de mon temps libre avec les moustiques à lire. Notamment Early days on the Yukon de William Ogilvie, Captain Jack McQuesten Father of the Yukon de James A. McQuiston et Campbell of the Yukon de Clifford Wilson. Je les dévore, ils sont bien plus intéressants et chargés de détail que tous les classiques livres du gold rush.

    Ayant quelques contacts, le statut de quelqu'un de confiance (cela sous entend sans problème avec l'alcool) et débrouillard (je sais dans quel sens tenir une hache) beaucoup de portes s'ouvrent à moi pour faire mon trou ici. Dans une petite communauté les informations circulent très vite et sont disponibles en live au café du matin avec rediffusions à la bière du midi et celle de l'après midi. Il est possible qu'on en sache plus sur vous que vous-même et ce avant même d'avoir eu le temps de vous présenter. J'ai encore à faire à Dawson mais c'est assez pour cette année. Les rouges de la toundra de Tombstone park me rappellent que je n'ai toujours pas ramassé mon bois pour l'hiver sans compter que j'aimerais aller à la cueillette à l'orignal. J'avais décidé de garder ma chambre à Whitehorse, ça fait 5 mois que je dors dans ma tente dans les bois au milieu de ces insectes sanguinaires, il est temps de retrouver un peu de confort et de sécurité pour refaire le plein de sang.

    Entre ville et bois

    Dawson est déjà une grande ville pour moi, Whitehorse et ses 25 000 hab. me parait gigantesque. Le retour en ville après tant de temps passé dans le bois m'est toujours aussi désagréable. Je suis loin d'être un acheteur compulsif mais le désir de consommer devient énorme. Quand la flemme ou l'envie surviennent en ville il suffit de faire quelques pas (les plus fainéants prendront la voiture) de pousser une porte et de tendre son billet (ou son morceau de plastique) et ceci sera censé nous combler. Quand la flemme survient dans le bois on se met des coups de pied au cul si c'est l'envie on apprend à s'en passer, on en rêve et on remet les choses à leur juste valeur. Mais on se retrouve comblé par la nature et des petits détails qui sont, selon moi, les réels délices de la vie et ne coutant souvent qu'un peu d'huile de coude.

    Mais je ne peux pas nier qu'il soit plaisant de se retrouver dans l'insouciance du confortable petit chez soi. Nous sommes des animaux qui cherchons à se la couler douce. Nous avons tout développé pour nous simplifier la vie et, dans la mesure du possible, gagner du temps. Tellement que l'essentiel y a été perdu. Je n'ai pas le temps de rêvasser sur ces sujets, il me faut un travail et vite !

    Un ami musher à une centaine de kilomètre de la capitale yukonnaise me propose un boulot de construction pas loin de chez lui. C'est avec joie que je re prépare mon sac seulement une semaine après être arrivé. Depuis mon départ en canot tous les colocs ont changé, je n'ai pas eu vraiment le temps de faire connaissance. Pour ces petits Cheechakos je suis le coloc qui n'est jamais là.

    Je reste dans une tente (oui encore) le temps des travaux en regardant l'hiver difficilement arriver cette année. Je vais affronter mon troisième hiver yukonnais mais je comprends vite que les deux précédents en ville ne comptaient pas vraiment. Nous continuons les travaux jusqu’à la fin novembre. J'adore travailler le bois, la construction et ce depuis mon plus jeune age. Je fais donc un boulot que j'adore mais qui me sera probablement très utile personnellement. Évidemment travailler dans de la grosse neige et par -30°C toute la journée (nuit plutot) n'était pas dans mes habitudes mais je n'apprécie que trop ces petites touches d'originalité.

    Pendant ces travaux je ne peux m’empêcher de retourner de temps en temps chez moi en ville. Là ou je reste/travaille il n'y a ni eau ni électricité. Une petite douche de temps en temps ne peut pas me faire de mal. Pour mes colocs je deviens donc celui qui « quand il est là c'est qu'il pue ». Pour ma part, n'ayant pas d'odorat je constate simplement comment colle le t-shirt à la peau.

    La vie en cabane

    Mon ami musher m'a demandé de garder ses chiens un mois pendant la Yukon Quest. Les travaux finis, il me faut trouver une occupation d'ici là. De récents contacts me proposent de garder leur cabane, maison, chiens voila donc mes vacances d'hiver. Seul au fond des bois dans une cabane, toujours sans eau et sans électricité, parfois même sans bois de chauffage préparé, entouré de chiens.

    On apprend en vivant ainsi le prix de l'énergie, le poids et la valeur de l'eau, à faire une bonne vaisselle minimaliste, l'importance d'une lampe frontale... J'ai toujours eu une profonde passion pour le bois, quand il s’agit de bois de chauffage mes tendances ultra addictives prennent le dessus. Une fois les taches canines effectuées, je passe mon Noël et jour de l'an à jouer avec une tronçonneuse et une hache jusqu’à 3 heures du matin au fond du bois yukonnais. Ça peut faire rire ou rêver mais pour moi, la neige jusqu aux cuisses, éclairé à la frontale, par des températures qui transforme l'huile d'hiver en espèce de chewing-gum, je ne fais que chercher, abattre, couper, splitter, stocker un carburant plus nécessaire et vital que mes pâtes. Considérant passer mes meilleurs vacances de Noël ainsi, mon but est de faire assez de bois pour que la propriétaire puisse finir l'hiver à son retour.

    La vie en cabane quand l'hiver devient plus vigoureux, tout tournera mal. C'est une loi inhérente dans le nord. Il convient donc d'être capable de trouver des solutions pour des problèmes tout au long de sa journée. « Mais qu'est ce que tu fous de tes journées tout seul dans ta cabane ? » me demandent certains amis. Imaginez vivre dans un monde où la loi de Murphy devient la norme. Vous voulez ouvrir votre porte ? La clé se cassera dans la serrure. Vous voulez remplir votre bidon d'eau ? Le bouchon sera gelé. Vous voulez démarrer votre voiture ? la batterie dira non point d'exclamation. Vous voulez brancher votre voiture à un générateur ? Le cordon se brisera... Ceci représente une matinée proche du classique et suffisante pour occuper mes deux mains et mon demi cerveau. C'est aussi là que le concept de Cheechako et Sourdough prend son sens, quelqu'un qui n'a pas connu ça ne connait pas la vie dans le nord.

    « Tu nous fais trop rêver avec tes aventures, j'aimerai trop vivre ça » me disent-ils également. Cela raisonne dans ma tête pendant que je déneige pendant plus de 5 heures simplement pour aller remplir mes 8x20L d'eau, les pieds congelés malgré toutes les précautions ou quand je me retrouve à tirer un traineau de 160Kg dans la grosse neige pour rentrer toute cette eau au chaud. Certaines mésaventures auraient la capacité de plonger bon nombre de personne dans une grande panique et suffiraient à dégouter du nord.

    Mais que je le veuille ou non, mes « aventures » suscitent une certaine envie auprès de mes proches. Le grand classique du gars qui tombe amoureux du nord. L'isolement, la cabane dans les bois, la solitude, la nature... tous ces thèmes vendeurs... J'en rêvais, j'y suis. Ça a un cout, je peux et sais le payer. Cette vie sur du très long terme je doute encore un peu quand je suis en cabane, mais redeviens plein de certitudes après 1 heure passée en ville.

    Vers un monde de chien

    De services rendus en services reçus j'en suis là. Je n'avais pas prévu de tomber dans le monde des chiens de traineau, pas plus que ce coup de foudre pour le nord d'ailleurs. Plus que ne pas le prévoir je m'étais refusé d'entrer là dedans. J'ai un énorme problème avec les chiens : je les adore et je m'attache. Je sais ce qu'est d'avoir un chien animal de compagnie, mais je préférais garder ma vision du petit toutou de maison que d'être confronté à ces pauvres petites créatures dans le froid et la glace attachées à des chaines. J'ai aussi connaissance des inconvénients d'une telle passion : pas de vacances, pas un seul jour d'absence, beaucoup beaucoup d'argent, beaucoup de temps, beaucoup d'effort. Ce future probable me fait peur, je suis heureux de pouvoir encore réfléchir parce qu’une fois lancé l'engagement serait total.

    La première sortie avec les chiens me coupe le souffle, je le redoutais. Températures idéales, levé de soleil magnifique et lumière nordique dans les bois tiré par des dieux chiens, que du bonheur. Je regrette déjà d'avoir tant aimé cela. Musher c'est avant tout un style de vie, la vie de cabane dont je parlais et raffole. Jusqu’à maintenant je n'expérimentais que cela sans le plaisir du traineau. Mais il est un moyen de locomotion extraordinaire et silencieux pour explorer les beautés du Yukon.

    Je repars à nouveau la semaine prochaine pour un mois, seul à devoir entrainer ces athlètes de chiens. Dans un sens l'idéal serait que ça se passe mal pour me décrocher de ce truc, mais j'ai bien peur de ne as avoir le choix et d'être dans l'obligation de faire en sorte que ça se passe bien...

    Qui sait, c'est peut être à traineau qu'on mon armée de castor reprendra la totale possession du pays mais ceci est une autre histoire.


  19. #19
    Avatar de nagrom
    Morgan 41 ans

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    Merci pour vos MP.
    Ne m'en voulez pas, si je n'y réponds pas c'est que les réponses à vos questions sur le Yukon sont toutes dans ce magnifique dossier : https://pvtistes.net/forum/le-yukon-...-au-yukon.html. Il convient de le lire si le Yukon vous intéresse. Je radote déjà bien assez sans qu'on m'y force


  20. #20
    Avatar de Helene
    Hélène 7 ans

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    quel plaisir on a à te lire...Merci Morgan!

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