« Hier, j'ai appliqué pour un poste de ... », « Il a crossé la route et tout à coup ... », « je te forwarde son message » sont des phrases qui, aujourd'hui, ne nous étonnent plus lorsqu'elles sortent de la bouche de nos camarades pvtistes. Mais, si ma mémoire est bonne, n'étions-nous pas il y a encore peu de temps ceux qui critiquaient les Jean-Claude Vandamme, les David Charvet lorsque ceux-ci osaient demander « comment on dit déjà en francais ? » ? Si, si, il s'agit bien de nous et je suis ravie de cette prise de conscience. Pourquoi me direz-vous ? eh bien, je suis venue ici pour « découvrir une nouvelle culture », comme nous l'avons quasiment tous expliqué dans notre lettre de motivation pour le dossier PVT. La culture, je la découvre, elle ne me plait pas toujours mais ces 9 mois passés ici m'ont déjà donné un aperçu assez complet de la culture canadienne, même si je ne prétends pas la connaître sur le bout des doigts. Par culture, j'entends... mentalité, habitudes, nourriture, monde du travail, mais également langue.
Ici à Toronto, il faut croire que toutes les langues au monde sont parlées, il n'est pas rare d'entendre parler chinois, portugais, italien, francais et d'autres langues encore mais la langue principale reste bel et bien l'anglais. Dés les premiers jours du PVT et ce malgré la présence de francophones autour de nous, il nous est demandé de construire des phrases en anglais, de comprendre nos interlocuteurs anglophones et d'essayer de perdre cette fâcheuse habitude de traduire du francais vers l'anglais. On cherche un appartement, un emploi, on demande son chemin, un renseignement et pour cela, nous avons besoin de l'anglais. Et c'est ainsi que cette « nouvelle » langue prend de plus en plus de place dans nos têtes...
Ne cherchons pas à devenir bilingue en deux semaines, il faut du temps pour acquérir du vocabulaire mais aussi pour comprendre la formation des phrases en anglais. Il est dit que l'on devient bilingue en vivant sept ans dans un pays anglophone donc prenez bien conscience qu'en un an, vous ne le deviendrez pas, mais que vous serez sans doute ce que l'on appelle ici « fluent ». Bilingue signifie qu'il est possible de parler de n'importe quel sujet dans deux langues, que ce soit d'une partie de pêche, de l'économie mondiale en passant par le nom des os humains, et c'est là qu'apparaît le « franglais », langue très couramment parlée au Québec et qui prend de l'ampleur à Toronto, chez la population francophone.
Je pensais que c'était un jeu, un moyen de se donner de l'importance, une certaine forme de prétention que de prétendre ne pas se souvenir d'un mot dans sa propre langue, et aujourd'hui je joue à ce jeu assez naturellement car outre les fois où l'on perd son mot francais, il arrive qu'un mot anglais soit plus pertinent, plus « exactement-ce-que-je-veux-dire » et que l'on choisisse de l'utiliser lui plutôt que son homologue francais. Le résultat est plus exotique et tout aussi compréhensible si vous vous adressez à des gens qui ont les mêmes connaissances que vous en anglais, et puis, et c'est ce qui me fait le plus plaisir, c'est bien la preuve que nous finissons par penser en anglais