Bonjour,

Je vais ici raconter notre impression, à ma copine et à moi, sur l’employeur SCH dans la Bay of Plenty.

Étant au départ en PVT, nous avons pu bénéficier de l’extension SSE (Supplementary Seasonal Employer), qui restreint donc les possibilités d’embauches au sein des secteurs de l’horticulture et de la viticulture, uniquement pour les employeurs agréés SSE ou RSE.

Nous avons donc candidaté pour des postes d’ « Horticultural Assistants » dans une nursery/greenhouse (pépinière/serre) de plants de kiwis, pour commencer au mois d’Octobre, sur leur site de Pukehina. Après une expérience désagréable dans les orchards (vergers) à Opotiki, le travail en serre nous paraissait assez sécurisant : travail avec horaires fixes, car non dépendant de la météo, le samedi et le dimanche off etc...

Nous avons été reçus par Michaela, qui, elle-même, est slovaque, dans les bureaux de Pyes Pa près de Tauranga. On a été bien reçus, les bureaux présentaient super bien, on a pu lire notre contrat et poser toutes les questions que l’on souhaitait. Le fait étant que ma copine a un petit souci au niveau de la nuque, qui rend la position de la tête en l’air très douloureuse à moyen terme. On nous a dit qu’il n’y aurait pas de soucis du tout par rapport à ça, et que le travail irait jusqu’en Décembre minimum, mais que généralement il y a du travail toute l’année si jamais on voulait.

Le boulot dans la serre, c’était surtout du « Taping » et du « Planting ». Taping = accrocher les plants de kiwis à des tuteurs en bambous avec un « Tape gun », un genre de pistolet à ruban ; Planting = enlever les bébés plants de leurs petits pots, et les replanter dans des plus grands pots. Pas compliqué, on avait même le luxe d’avoir des chariots roulants nous permettant de travailler en position assise, mais c’était franchement très répétitif. Et ce n’était qu’en Octobre/Novembre, mais les jours de plein soleil, on cuisait déjà un peu sous les tunnels de plastiques (quand même ouverts à chaque extrémité). Nous avions pour managers principaux Carl maori (je précise car il y a un deuxième Carl), et Rebeka (slovène), « manager in training ». Ils nous ont bien traités, nous disaient chaque jour qu’on faisait du bon travail (même quand on faisait de la m***e d’ailleurs).

De plus, nous avons refilé le tuyau à un couple d’amis français qui a fini par être embauché aussi. Nous avions trouvé un logement du côté de Tauriko, qui était à environ 60kms de notre lieu de travail. Donc aller-retour = 120km/jour. Ça fait pas rêver, surtout que nos véhicules respectifs n’avaient que 2 places chacun, donc pas de covoit' possible. Et dès le 2ème jour de boulot, un van qui casse. Heureusement notre propriétaire nous a prêté sa voiture (hybride en plus !) pour aller travailler. Donc nous n’avons loupé aucun jour de boulot. Nous avons fini par avoir de la place au Maketu Hilltop, un camping à Maketu, qui nous plaçait à moins de 20kms du travail.

Au passage, c’est un camping de m***e, bien trop cher pour ce que c’est, et en plus le proprio a voulu nous foutre dans des « cabins » séparées, alors qu’on avait réservé un bungalow self-contained pour tous les 4, et qu’on avait pris soin de bien demander à l’avoir indéfiniment. On a dû râler en personne pour lui faire comprendre que ça ne se faisait pas. On a gardé le bungalow, mais on a quand même dû lui rappeler la voie du bon sens nous-mêmes quoi. La Bay of Plenty, ça veut dire la Baie d’Abondance, mais clairement ce ne sont pas les opportunités de logement qui abondent dans le triangle entre Rotorua, Tauranga et Whakatane.

Ça faisait du bien de se rapprocher du travail, et de ne plus brûler des dizaines de dollars d’essence tout le temps.

Mais, comme la chance ne reste jamais longtemps entre les mêmes mains, on a vite déchanté. Car au bout de 3 semaines de boulots, Michaela et Scott, un autre manager, viennent nous trouver ma copine et moi, nous expliquent qu’ils doivent embaucher des néo-zélandais car ils sont contraints de respecter des quotas par rapport au taux de travailleurs étrangers, qu’ils ont embauché 2 néo-zélandais pour la serre, et qu’ils doivent envoyer 2 personnes de la nursery dans les orchards. On était franchement pas emballés, et ils nous ont fait un discours façon vendeur de voiture pour nous vanter les mérites du travail en orchard : c’est mieux payé, il fera moins chaud que sous la serre, ça se trouve vous aimerez +, tout le monde est gentil là-bas...on est obligés parce que les kiwis sont lazy, ils préfèrent les conditions de la nursery...
STOP ! Et nous, on a pas le droit de préférer les conditions pour lesquelles on a postulé nous aussi ?? On a dit qu’on allait y réfléchir. Mais le travail en orchard, on a déjà donné, on en veut plus, et cerise moisie sur le gâteau : les orchards se situent à quelques kilomètres seulement de notre 1er logement à Tauriko, nous contraignant à nous retaper autant de route qu’au départ, alors qu’on venait de déménager !

On a recontacté Michaela par mail pour lui dire qu’on était pas intéressés et qu’ils devraient demander à quelqu’un d’autre. Mais sa réponse laissait entendre qu’on avait pas le choix. Nous l’avons donc appelée pour mettre les choses au clair. On a demandé « Pourquoi nous ? » et elle a juste noyé le poisson « Il faut que ça soit 2 personnes, vous êtes un couple... » On lui a signifié qu’il y avait d’autres couples dans l’équipe, mais elle a encore noyé le poisson. On a dit qu’on avait pas envie de faire ça, et que si ils demandaient à quelqu’un d’autre il y aurait peut-être des volontaires, vu que ça a l’air SI BIEN de travailler dans des orchards. « Avez-vous demandé à quelqu’un d’autre ? » Encore un poisson noyé pour dire que non. Et quand ma copine rappelle qu’elle a mal au cou ? « Je ne pense pas que le travail te fera mal ». On a fini par comprendre que même ayant la logique de notre côté, nous n’aurions pas le dernier mot.

Bon, pour faire acte de bonne volonté, nous nous sommes dit « Essayons ! ».
Lundi : pluie, pas de travail, pas de salaire.
Mardi : pluie pas de travail, pas de salaire
Mercredi : on a dû attendre que le sol sèche, pour recevoir un texto nous disant de commencer à 12h. On a 100km aller/retour à nous taper, on est debout depuis 6h30 à attendre comme des c**s pendus au portable, on a dit qu’on ne se déplacerait pas pour seulement une demi-journée.
Jeudi : beau temps. On commence par du « Flower Picking » (ramassage de fleurs de kiwis pour le pollen) et ensuite on fait du « Twisting » (enroulage des lianes de kiwis autour d’une ficelle en hauteur). Passer toute une journée la tête en l’air a été très douloureux pour ma copine, et quand Michaela est passée nous voir en fin de journée pour demander comment ça se passait, elle le lui a dit, tout en rajoutant que la nursery c’était mieux. Michaela a dit qu’elle verrait avec les managers pour nous trouver autre chose.
Vendredi : on arrive à 8h à l’endroit indiqué, on attend avec un autre employé pendant 1H sur le parking sans que personne ne vienne nous chercher ou ne s’inquiète de savoir où nous étions. Ah ben oui on avait oublié de nous dire d’aller directement à l’orchard ! (y’en a pas qu’un, vous l’aurez compris) On fait du « Bud Thinning » (un genre d’élagage des bourgeons) et Oh ! 3 personnes de la nursery qui sont venues travailler à l’orchard parce que la nursery est fermée pour épandage et qu’on leur a proposé l’orchard pour pas perdre une journée de salaire ! Comme quoi, SCH, ils savent PROPOSER quand ils veulent ! Ma copine, souffrant encore de la veille, n’en pouvait plus au bout de 2h.

Nous sommes rentrés chez nous, nous avons contacté Michaela pour lui dire que ce n’était plus possible, et qu’on voulait retourner à la nursery. Et nous avons reçu une réponse à 20h30, qui disait qu’elle avait parlé à l’équipe de la nursery mais qu’il n’y avait plus de positions disponibles pour nous. En conclusion, elle a ajouté que moi seul pouvait continuer à travailler dans les orchards.

Nous avons donc rédigé un mail ("to whom it may concern") en leur expliquant qu’on s’était montrés honnêtes, notamment par rapport à la condition physique, qu’on était venus travailler tous les jours malgré nos problèmes de transport, qu’on avait déménagé exprès pour nous rapprocher du travail, et que puisque tout ce que ça nous avait rapporté c’était d’être pris pour des c**s, aucun de nous deux ne travaillerait plus jamais pour une entreprise pareille. Le coup de gueule, on n’allait sûrement pas nous gêner pour leur faire entendre. D’autant plus qu’on s’apprêtait à redéménager à Te Puke !

En conclusion : à cause du COVID-19, les frontières sont fermées depuis Mars, et au moment où on travaillait pour SCH, il restait moins de 11000 pvtistes passés en SSE dans le pays, et quelques travailleurs des îles du Pacifique.

Autrement dit : les règles du jeu ont changé. Avant, quand un PVTiste claquait la porte d’une entreprise pour aller voir ailleurs, il y en avait 10 autres derrière qui venaient frapper à la porte. Aujourd’hui, ce sont les travailleurs qui sont en position de force. Alors ayez conscience de la valeur de votre force de travail, et « Stand up for your rights ! »

Pour info : en moins d’une semaine on a retrouvé un travail dans une serre de concombres dans la région d’Auckland, avec un logement rien qu’à nous à seulement 4 minutes en voiture !

Par contre on fait 6h-16h30 du lundi au vendredi + 6h-12h30 le samedi, soit des semaines de 56h30 ! En plus on cuit déjà en cette fin de mois de novembre, et les concombres sont des plantes urticantes, donc soit on travail avec des manches, soit on a la peau irritée en permanence.
10h/jour en plein cagnard, je vous jure que ça vous met une grosse claque ! On fait des journées de 10h car l’entreprise manque de main-d’œuvre et que c’est busy. On a fait notre premier jour avec une néo-zélandaise qui ne s’est pas sentie la force d’aller plus loin que midi. Nous on va tenir aussi longtemps que possible. Mais malheureusement, les entreprises ayant la chance que le visa SSE existe continuent obstinément de faire passer la productivité avant le bien-être des travailleurs, provoquant justement le départ des travailleurs dont ils manquent tant.

Bon courage à tous!