- 01/07/15, 16:38 #1Je ne sais pas bien par où commencer ma publication...Je voudrais partager mon expérience ici au Canada, mais elle est si personnelle et de longue haleine que je ne sais par où commencer.
Mon amour pour le Canada a débuté à l'âge de 17 ans lorsque j'ai rencontré en France un touriste québécois qui voyageait seul dans notre beau pays, nous avons par la suite gardé un contact assidu, puis j'ai à mon tour voyagé à de multiples reprises au Canada, enfin surtout au Québec et tout particulièrement à Montréal. Au fil des voyages nous nous sommes mis en couple, une magnifique histoire a commencé (et se poursuit toujours), nous prenions l'avion tous les 3mois pour aller l'un chez l'autre, puis nous nous sommes mariés (26 ans pour lui 24 ans pour moi) et j'ai immigré au Canada!! Mon billet d'entrée?! Le PVT!!
Avant de partir mon PVT en poche j'avais déjà beaucoup voyagé ici, je commençais à bien connaitre l'île de Montréal, j'étais prête, décidée, volontaire avec en plus mon mari à mes côtés, bref j'avais toutes les cartes en mains pour réussir mon immigration. Cependant dès mon départ une petite déchirure / amertume du point de vue professionnel. Depuis ma plus tendre enfance je voulais être enseignante, malgré mes nombreux voyages j'ai travaillé avec assiduité pour ce beau projet. J'ai toujours su rapidement ce que je voulais faire de ma vie et j'ai travaillé de toutes mes forces pour y parvenir, menant tout de front!! La même année je préparais donc : 3 voyages au Canada ainsi que mon PVT, mon mariage, mon CAPES, mon master, mon mémoire, et 2 stages dans l'enseignement, j'ai tout obtenu et réussi, avec en plus déjà en ligne de mire la RP pour l'année suivante! Mais quitter la France et surtout abandonner mon CAPES, ce puissant moteur depuis mon enfance ont été un choix difficile! Mais tant pis, je suis partie avec tous mes beaux projets en tête et puis que diable il y a bien des profs au Québec aussi!!
Première désillusion dès mon arrivée à Montréal, je comprends que ma carrière professionnelle va être plus compliquée que prévue au Québec! Pour enseigner tu dois PROUVER en allant dans une clinique agréée que tu n'as ni sida, syphilis ou tuberculose! Ce que j'ai trouvé très insultant et humiliant, ne voyant à mon sens aucun rapport entre une supposée séropositivité et mes capacités à enseigner ou non. J'écrase alors ma fierté et passe tous leurs test pour un peu plus de 300$ non remboursable. Mes déboires ont continués pendant des mois et des mois pour faire reconnaitre mes diplômes, mes papiers n'étant jamais suffisamment officiels au regard du Québec bien que tous mes diplômes étaient des originaux et tout ce qu'il y a de plus officiels!! Je ne suis pourtant pas la première français à immigrer dans ce pays, surtout dans cette province!!! Mais non, mon attestation de master ne leur plaisait pas, elle était pourtant officielle, tamponnée et tout le tremblement, hélas les diplômes définitifs n'étaient pas édités au moment de mon départ de Bordeaux, l'université m'avait alors immédiatement délivré une attestation de diplôme avant mon départ. Je me suis donc battue avec ma fac, à distance malgré le décalage horaire (et les toutes petites heures d'ouverture des bureaux que je devais contacter) pour me faire parvenir mon nouveau beau diplôme! Ensuite c'était les relevés de notes qui ne leur plaisaient pas, pourtant ce sont les papiers qui m'avaient été délivrés par l'université, mais les tampons n'étaient pas net, pas au bon endroit, la présentation n'était pas ressemblante avec les relevés de notes du Québec (évidemment!! Puisque je fais la demande d'une équivalence, c'est donc que je ne suis malheureusement pas diplômée d'une école québécoises et que nos us et coutumes universitaires sont quelques peu différents de ce qui se fait à Montréal!). Et chaque chose était demandée une par une, avec plusieurs mois d'intervalles. Jamais d'envoi groupé, concis... Des infos, des contestations de l'administration égrainée ça et là...
Cette affaire de diplômes m'a semblé interminable... Mais j'ai du prendre mon mal en patience, et puis, soyons honnête l'administration française n'a rien de simple non plus, j'ai donc mis de l'eau dans mon vin. J'ai dès lors mes papiers et suis prête à travailler dans ma branche, avec enfin mes classes, mes élèves... Hélas!!!! Ici on commence par du remplacement. ça peut aller du prof qui a un rhume aux congés maladies longs et congés de grossesse-maternité-paternité. Si tu travailles dans un établissement pour un congé maladie d'un collègue de deux mois, ils peuvent t'appeler en "à côté" pour remplacer le prof enrhumé dans UNE AUTRE MATIÈRE. Même si tu ne connais rien à cette matière là, les échos que j'ai eu c'était : "Oh bah les élèves non plus ils n'y connaissent rien... alors..." Hélas c'est pas avec moi qu'ils vont en apprendre davantage en maths! Enfin beaucoup de désillusions du point de vue professionnel! Des classes surpeuplées, (si certains pensent que les classes sont surpeuplées en France c'est bien pire ici, malheureusement) des conditions de travail LAMENTABLES pour les élèves comme les enseignants, un désastre! Je suis amère d'avoir cédé ma place en France en renonçant à mon CAPES que je n'ai eu que pour faire joli sur mon CV (et aussi pour avoir un plan B et rentrer en France si ça n'allait pas, car le gouvernement m'a généreusement accordé une année off tout en conservant les bénéfices de mon concours pendant une année).
Nous ne sommes cependant pas rentrés en France, mon mari ne pouvant pas obtenir d'équivalence pour ses diplômes en France (trop spécifiques). Il devrait refaire ses études en France et trouver une carrière qui lui corresponde, ce qui est difficile dans le contexte économique actuel en Europe, même si évidemment (et heureusement) d'autres y sont parvenus. Ce serait à notre sens un bien grand risque étant donné qu'à long terme j'aurai sans nul doute une carrière ici, même si pour le moment c'est galères et prises de tête, avec l'ancienneté les choses s’adoucissent nettement.
J'ai la chance et le désavantage de vivre ici avec un adorable mari, qui me soutient énormément malgré les galères. Un gros avantage car je ne suis pas seule, il m'épaule, me fait rire et surtout profiter de la vie dans ce pays, qui malgré ma situation professionnelle décevante, nous réserve de belles surprises! Nous avons un joli logement 4 1/2 spacieux lumineux, assez bien situé pour un loyer de seulement 700$. Les salaires sont plus élevés qu'en France , même sans rouler sur l'or (disons que la proportion du loyer sur le salaire est moins importante. Essayez donc de vivre à Paris avec un seul job par personne dans un grand F3-F4 en centre ville). Il y a à Montréal des choses magnifiques et nous y avons passé d'incroyables moments. De plus, les québécois que j'ai appris à connaitre sont adorables, généreux et agréables à vivre (il y a évidemment des cons, comme partout, mais il suffit de ne pas leur parler ) Le désavantage d'avoir un adorable mari québécois c'est de ne pouvoir rebrousser chemin pour rentrer seule en France, mais dans un couple il faut hélas faire des concessions.
Voilà, ce long pavé, surtout pour mettre un peu en garde ceux qui partent en laissant derrière eux une carrière professionnelle en pensant vivre une sorte de "american dream". La réalité est parfois un peu cruelle, même sans nécessairement regretter son choix de départ, il est fort probable que l'on soit déçu(e) d'avoir quitté sa zone de confort. Il y a c'est vrai des avantages à vivre ici (il suffit de lire les expériences de tous ces pvtistes et immigrés qui quittent l'Europe pour vivre au Canada, qui vivent des expériences humaines et font des voyages à couper le souffle). Mais si on veut immigrer à long terme il faut être conscient que c'est un sacré combat à mener!! Un autre GROS GROS GROS BÉMOL pour ceux qui veulent vivre au Canada après leur PVT, la Résidence Permanente est pour ainsi dire BOUCHÉE désormais (mis à part pour ceux qui trainent une fortune colossale derrière eux, cela n'auront pas de problèmes )). Attention, depuis qq mois, on coupe énormément dans l'immigration au Canada (certains en sont ravis ici, d'autres catastrophés, le but n'est pas d'ouvrir un débat politique sur ce site), il faut juste tenir compte des réalités sociales que vivent le Québec et le reste du Canada en ce moment, il est pratiquement impossible d'obtenir sa RP au Canada sans parrainage ou tout au moins sans avocat spécialisé en immigration et droit des familles ET fonds financiers substantiels (comptez un minimum de 5 000$ pour une RP aujourd'hui- et oui en quelques mois BOUM grosses évolutions de ce côté là).
Bon courage à tous dans vos choix respectifs, et beaux PVT pour tous les chanceux qui viennent de recevoir leur lettre d'introduction et qui s’apprêtent à partir!!
Lucie
-
- 01/07/15, 17:28 #2
- 01/07/15, 19:09 #3
- 01/07/15, 19:35 #4Très belle histoire ! Et d'une autre part, gros dommage pour les RP. Enfin il faut s'y attendre aussi. Beaucoup la demandent. Mais dans un sens, $5000 une RP, c'est le prix d'une voiture ?
Il faut par la suite être relatif. Merci pour ce témoignage ! J'emménage à Vancouver fin août ! J'espère vivre ce que tu vis et as vécu !Dernière modification par KevinTramp ; 10/07/15 à 22:27.
-
- 03/07/15, 21:49 #5Témoignage très intéressant! (c'est ce que j'aime le plus lire ici).
Intéressant de savoir que le touriste québécois rencontrés en France t'a menée au Québec!
Enseignante...en effet, c'est un domaine assez particulier au Québec et obtenir les équivalences est un parcours du combattant. Et encore, c'est plus facile pour un Français...
Sans vouloir te décourager, ta situation comme prof est la même pour la majorité des jeunes enseignants québécois...Le copain de ma nièce est un enseignant de 28 ans et l'autre jour m'a raconté exactement les mêmes déboires que toi...il semblait découragé et envisage même quitter un jour la profession, même s'il adore enseigner. Il rêve d'une permanence et de ne plus être un balle de ping pong
Donc je peux comprendre pour toi qui a mis toutes tes énergies dans tes études, diplômes et tout le tralala...ouf!
Sinon, immigrer au Canada a toujours été plutôt coûteux, ça demande un grand investissement, c'est pourquoi je recommande presque toujours à ceux qui me disent qu'ils veulent venir au Canada de commencer par un permis temporaire (travailleur, PVT, etc.). Je vois encore trop de gens dépenser plusieurs milliers de dollars dans une RP et repartir quelques mois plus tard...
Bref, tu as quand même l'air de te plaire ici et je te souhaite bonne continuation!
Identifiez-vous pour répondre
Pour accéder à cette fonctionnalité, vous devez vous inscrire au préalable ou vous identifier grâce au formulaire ci-dessous.