Discussion: 7 ans à Montréal

  1. #1
    Avatar de MrBungle
    Bungle

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    Ça va bientôt faire 7 ans que je visà Montréal et je dois dire que j'aime ça


    Je suis arrivé de France en 2009 avec un DEUG en Math/éco et 2 ans d'expérience professionelle comme testeur de jeux vidéo.
    Autant dire pas grand chose.


    Mon objectif était double:
    1- Découvrir Montréal, le Québec et le Canada avec une expérience d'expatriation. Je trouve que quand on voyage quelques semaines en touriste on a pas le temps de vraiment s'imprégner du pays.
    2- Progresser sur le plan professionnel.


    Voici mes 7 ans en cinq chapitres:

    I Premiers mois, premier job, premières rencontres


    Ma première impression de Montréal fut comme pour beaucoup je pense: "C'est pas super beau mais il y fait bon vivre!" (je venais de la région parisienne).


    Au début je me suis retrouvé comme pas mal de français: un petit studio sur le plateau, un job payé au lance pierre (testeur de jeux video) et faire la fête sur Saint-Laurent tous les week-ends.


    Au niveau social, il faut savoir que je suis un peu solitaire. Disons que j'ai plutôt tendance à me faire quelques amis que je garde longtemps plutôt que des bandes de potes avec du va et vient.
    En arrivant je me suis trouvé un partenaire de fiesta français, et j'ai sympathisé un peu avec 2 ou3 Québecois au travail.


    Faire la fête et être payé au salaire minimum ça a été un temps, mais au bout de 4 mois j'en ai eu marre.
    Un soir en rentrant d'un bar aux petites heures du matin, je me suis senti seul, vide et déprimé.
    J'ai réalisé que sortir et boire dans des bars/clubs où on s'entend pas parler était une tentative de m'amuser qui ne fonctionnait juste plus. C'était plus mon truc (j'avais déjà bien pratiqué avant le Canada).
    J'ai aussi réalisé que mon emploi ne m'emmenait nul part à long terme et que je ne voulais pas passer tout mon séjour dans un job que j'aime pas sans tenter de trouver un job qui m'offre plus de perspectives d'avenir.


    C'était l'automne, quelques semaines avant Noël. Mon pote de sortie m'annonçait qu'il rentrait en France définitivement bientôt, ce qui ajoutait à mon sentiment de solitude.
    Je pris alors une décision: quitter mon job avant les vacances de Noël que je passerai en France, et à mon retour à Montréal je me concentrerai 100% sur la recherche d'un job qui en vaut le coup. Et si je ne le trouvai pas, je rentrerai en France quand mes économies seraient à 80% dépensées.


    Revoir la famille à Noël fut une bouffée d'air frais.
    Pourtant autant à l'arrivée à Paris,qu'au retour à Montréal, je compris quelque chose: je me sentais bien mieux à Montréal.

    II Hiver, chômage et sorties


    L'année 2010 commença avec la rencontre d'une nouvelle bande de français, ainsi que le chômage et la recherche d'emploi à plein temps.
    D'un côté, j'étais plus épanoui socialement avec des sorties plus conviviales: fête de la neige, soirées pokers, etc et je me trouvai même une copine française.
    De l'autre je galérais, candidature sur candidature, sans aucune réponse.
    Je cherchais à devenir testeur de logiciel (QA), ce qui est mieux payé que testeur de jeux vidéos. Je lisais beaucoup sur le sujet, m'entrainais sur internet, etc.
    Au bout deux mois et demi, j'avais le moral dans les chaussettes car je venais juste de râter le seul entretien que j'avais eu.
    Puis comme par miracle, une entreprise me contacte par Monster, ils ont besoin d'un testeur en urgence pour deux mois, je les rencontre, ça clique je signe puis passe finalement permanent.


    Dans le fond cette période dans les trois premiers mois de 2010 fut cruciale et charnière.
    Autant elle fut difficile car pleine d'incertitude sur ma capacité à trouver un emploi et rester au Canada.
    Autant c'est le moment où j'ai trouvé ma copine actuelle, et LE job qui m'a permis d'avoir plus d'argent pour profiter, et d'évoluer à long terme.

    III L'absence de décision de rentrer


    Avec mon nouveau job et ma copine, je dois dire que tout est devenu plus facile et agréable.
    Nous avons emménagé ensemble et voyagé en Amérique du Nord dès qu'un long week end se présentait.
    La bande de potes s'est perdue de vue mais j'ai commencé à me faire d'autres amis par le travail principalement: aussi bien français que québecois, franco et anglo.
    D'ailleurs sur le sujet de l'amitié ici je peux dire une chose: oui les Québecois peuvent se montrer plus sympathiques que les français de prime abord, mais au fond il ya une glace à briser quand même avant de pouvoir accèder à leur amitié. Et ça prend un certain temps.
    Pour moi ça n'a pas été dur en fait,car mon mode de fonctionnement est d'avoir une poignée d'amis sur la durée.


    Bref, entre l'été et Noël 2010, ma copine et moi nous sommes retrouvés dans la recherche de solution garder un statut qui nous permette de continuer à travailler au Canada.


    Au bout d'un moment, nous nous sommes rendus compte de quelque chose: Nous n'avons jamais vraiment décidé de rester ici, ou en tout cas pas dans le long terme.
    Et pourtant nous étions là, à préparer la résidence permanente.
    Pourquoi? Simplement parce que nous n'avons jamais réellement envisagé de rentrer en France.
    Le Canada s'est imposé naturellement à nous.

    IV Vers une meilleure situation


    Après l'envoi de nos demande de RP,nous sommes rentrés dans une dynamique d'amélioration de notre situation.
    Ma copine en Jeune Pro galérait encore avec son premier job alimentaire au salaire minimum qu'elle aura, au final,gardé pendant un an et demi, avant d'être libérée par la RP, de trouver un job qu'elle aime bien et reprendre les études en cours du soir.
    Moi, mieux loti avec mon job de testeur de logiciels, je me suis donné pour objectif de devenir développeur, ce qui a fini par arriver environ 1 an et demi plus tard, en restant dans la même compagnie.
    Pendant ce temps, nous avons déménagé à nouveau vers mieux, acheté une voiture, tout en continuant à explorer l'Amérique du Nord.

    V La citoyenneté


    Après avoir obtenu la RP, s'être offert une meilleure situation et être définitivement rentré dans le mode d'un couple qui vit à Montréal, la Citoyenneté s'imposait d'elle même.
    Je vais être honnête: oui nous l'avons en partie fait pour obtenir une statut vraiment permanent au Canada.
    Mais j'insiste sur le *en partie*.
    Car il y a aussi eu une reflexion plus profonde sur la France, le Canada, notre identité et notre place dans tout ça.
    Bien que j'aie aujourd'hui ma citoyenneté canadienne, je ne me sens pas à l'aise de me présenter comme "juste" Canadien.
    Pour le moment, je me reconnais plutôt comme Franco-Canadien, ou Canadien d'origine française.
    Mais ce que je peux dire en toute honnêté c'est que je ne suis pas Canadien par complaisance.
    J'aime vivre ici. Bien entendu, tout n'est pas rose, mais j'aime ce pays. J'aime à la fois la France et le Canada.
    La différence, c'est que la France pour moi est maintenant un peu synonyme de passé et figée dans le temps, alors que le Canada est synonyme d'avenir et de possibilités.

    Épilogue


    Aujourd'hui, nous avons tous les deux atteint des situations professionnelles qui nous satisfont pleinement, nous avons développé des amitiés durables, et nous ne prévoyons toujours pas de rentrer en France.


    Je comprends que tout le monde ne se voit pas rester au Canada si longtemps. Mais si je pouvais donner un seul conseil d'intégration à ceux qui viennent ici, que ce soit pour un an ou dix:
    ne restez pas dans une position défensive face à la culture et aux coutumes locales.

    On a tous une période de découverte et d'étonnement, mais il faut savoir passer outre.
    Vous adapter ne remet pas en cause votre identité française, au contraire, ça vous permet de profiter de tout ce qu'a à offrir le pays d'accueil.


    Des exemples anodins:

    • Personne n'attend que vous parliez avec l'accent québecois, mais utiliser des mots québecois pour se faire mieux comprendre ça aide.
    • Pas besoin d'être un fan de hockey pour aller voir une partie dans un bar entre potes ou en discuter superficiellement au travail. Ce n'est qu'un prétexte à la sociabilisation.
    • Il y a une culture ici, elle est différente mais elle existe. C'est normal qu'en tant que français on ne la connaisse pas, mais la nier en bloc est evidemment mal vu.
    • Accepter que nous sommes le cousin dont le québecois se moque gentiment. Ce sera plus ou moins subtil, et plus ou moins fréquent, mais indéniablement inévitable.
    • Etc...



    Bonne chance à tous ceux qui tenteront l'aventure!


  2. #2
    Avatar de Avenors
    Maxime 31 ans

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    Message de MrBungle
    La différence, c'est que la France pour moi est maintenant un peu synonyme de passé et figée dans le temps, alors que le Canada est synonyme d'avenir et de possibilités.
    Tu traduis parfaitement ma pensée, bien que j'habite ici depuis moins longtemps.


  3. #3
    Avatar de nesion
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    Bonjour et merci pour ton super témoignage. Je te souhaite encore plein d'années de réussite.

    Je suis actuellement moi aussi testeur de jeux video à Montreal et j'aimerai savoir si il est possible d'obtenir une résidence permanent avec ce genre de petit job ?

  4. #4
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    Deans

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    Merci à nesion d'avoir fait remonter ce post. J'étais complètement passé à côté!

    Génial et très touchant. Je m'y reconnais beaucoup, j'ai eu un parcours avec des similarités. Je suis arrivé au Canada (Toronto) il y a 7 ans également (en 2010), venant de Paris, étant plutôt solitaire avec peu d'amis (mais des bons amis!), et je suis resté en Amérique du Nord depuis cette date (et me suis fait une copine, qui est devenu ma femme, ca aide beaucoup d'avoir quelqu'un). Je me suis toujours dit qu'il serait bien qu'un jour je poste mon retour d'expérience sur le PVT (qui a littéralement changé ma vie, en fait).

    Merci de partager ce beau témoignage. Je suis dans la phase où je peux accéder à la nationalité (américaine dans mon cas, longue histoire). Mais j'hésite beaucoup. C'est pas une décision que tu prends à la légère. J'ai conscience des engagements que tu prends, il y a des implications. Je ne retournerais pas en France, c'est sûr, et je me suis bien intégré, mais cependant la France reste mon pays. Je sais pas, une peur absurde de devoir choisir, à un moment donné, entre deux nationalités, deux pays. Let's see.