Bonjour tout le monde,
Moi qui voulais faire un petit topo de mon voyage ça tombe bien.
Je suis parti début juin 2013 et revenu fin novembre 2013, presque 6 mois dont 4 mois de voyage. Un ami comme pied à terre à Montréal, en général retour tous les mois pour 2 semaines de repos et profiter de la vie montréalaise.
Avant de partir, on m'a dit : "tu n'es pas un baroudeur". C'était vrai

mais on change.
5 jours à Montréal pour ouvrir compte en banque/forfait de tél/récupérer le NAS puis départ pour 1 mois au Québec, direction le Saguenay/Chicoutimi/lac St Jean avec le parc et village Val Jalbert puis Tadoussac puis remontée vers le Nord Est au Havre St Pierre (archipel des îles Mingan). 1ère fois que je faisais "du pouce", 1ère fois que j'allais dans une auberge de jeunesse, que je faisais du couchsurfing, du covoiturage avec Amigo Express, location de voiture à l'étranger et que je transportais toutes mes affaires.
Tout n'a pas été facile... Mais j'ai appris et retenu : faire du pouce nécessite du temps et une destination pas trop en dehors des sentiers battus (et pas de pluie). Sinon, on peut marcher 10 km en plein soleil au bord de la route... Un camping ne peut avoir aucune aire de restauration (trop tôt dans la saison) et nécessiter d'aller à 10 km pour trouver un dépanneur. Il y a des nuées moustiques en juin (il faut des vêtements amples sinon ils piquent à travers et prévoir la moustiquaire de visage, j'étais équipé) et les taons sont très agressifs. Quand on est seul, se trouver à 19h dans sa tente, 100 moustiques sur la paroi, ce n'est pas drôle.
Mais le pouce m'a permis de rencontrer une dame âgée qui m'avait remarqué en passant et qui, revenant de sa course, s'est arrêtée ; elle est passée chez son frère pour qu'il lui indique à quel endroit elle pouvait me déposer pour que j'aie le moins possible à marche. J'ai aussi rencontré : un chef de chantier du barrage géant en construction dans le Nord, une prof qui m'a fait découvrir le slam québécois, un musicien qui se rendait chez les Inous et qui tissait des liens de confiance au fil des ans, des français qui venaient en voyage, 1 mère dont le fils était curieux de savoir quels arbres poussaient en France et s'il y avait des orignaux, un québécois dans la construction qui m'a emmené faire mes courses avant de me ramener à l'auberge etc... bref, des expériences superbes. J'ai croisé un cueilleur de champignons, un chasseur d'ours, un chauffeur d'énorme camion. Le chef de chantier m'a recroisé quand j'étais sur le retour, c'était en fin de journée et il pleuvait. Je vois 2 voitures qui me dépassent rapidement, l'une pile, recule à fond sur 50 mètres, c'était lui :"je vous ai reconnu, mais un peu tard..."
J'ai rencontré des gens dans les auberges, fait un bout de chemin avec eux, certains sont devenus des amis. Je me suis retrouvé perdu dans une ville à 19h30, sans aucune idée d'où j'allais dormir ; une gérante de motel, devant la tête que j'ai fait quand elle m'a annoncé 100 $/nuit, m'a appelé un gîte local (50$) et m'a réservé une chambre en me donnant l'adresse.
Puis retour à Montréal via Québec grâce à un super pouce, une vraie amitié avec un québécois. Sur la route (4h), il m'a fait visiter de jolis petits villages, m'a fait découvrir une réserve indienne et m'a offert un déjeuner en demandant à la serveuse de partager la soupe de crabe en 2 pour faire goûter "son ami français".
Cela, je crois que je l'ai vécu parce que j'étais tout seul ; parce qu'à deux, on a moins besoin d'aller vers les autres ; on se soutient, on partage ; et les autres n'osent pas forcément venir vers nous.
Retour à Montréal pour 2 semaines, pour profiter des festivals, aller à la plage et à La Ronde.
Puis départ vers l'Ouest pour 1 mois avec une française rencontrée sur couchsurfing et qui avait le même projet que moi, faire de la rando dans les Rocheuses.
2,5 jours de car Greyhound, c'est long mais on n'est plus dans la petite France et je n'étais pas là bas pour le confort. Et puis, on rencontre Eric, un canadien de Toronto venu marcher lui aussi. Finalement on marchera ensemble. Calgary, Banff. Rencontre avec des danois, on passe une journée ensemble, départ à minuit pour du camping sauvage (mauvais plan : plein de moustiques et dans le noir, on s'installe près d'une voie de chemin de fer... le train passe toutes les 2h, quel bruit !). Puis stop le matin, on arrive à monter tous dans la même voiture direction Lac Louise. On rencontre 2 grizzlis sur le bord de la route. A lac Louise, une mauvaise surprise : on ne peut pas faire le chemin qu'on avait repéré car trop de monde, on doit donc faire une moitié, rejoindre l'autoroute puis faire du stop jusqu'à un autre départ de randonnée puis faire la 2nde moitié. Sauf que pas de ravitaillement possible et que pour atteindre le début de la rando, on devra marcher 5 km. Imprévu.
Je suis bavard, je finis donc en bref. On devait faire 10 jours de rando, on en a fait 5. Je ne sais pas quel a été le pire moment : voir un carcajou de trop près (wolverine en anglais... un des animaux les plus agressifs au monde) ; se prendre 2 orages et marcher sans visibilité alors qu'on savait qu'on était dans la zone des femelles grizzlis et leurs petits ; se perdre, marcher sans le savoir dans le sens opposé de notre destination et devoir faire du camping sauvage, escalader les arbres à 4m de haut, accrocher les cordes pour la nourriture et s'apercevoir que les sacs de nourriture sont trop lourds et que la corde se détend ; faire tout ça 3 semaines après les inondations historiques qui ont touché la région, emportant les ponts permettant d'atteindre les campings, effaçant les chemins et en créant d'autres, ce qui nous a obligé 1) de traverser les rivières sur des troncs instables 2) en l'absence de troncs, de les traverser pieds nus ou en chaussures... ou peut-être était-ce de se réveiller au chuchotement de : "j'ai un animal sur moi" (posé sur la toile de tente mais avec le poids, il était sur elle) ou bien se faire bouffer nos chaussures de rando la nuit, par une créature indéterminée et disposer des branches autour des tentes la 2nde nuit afin que l'animal fasse du bruit, ce qui n'a pas manqué d'arrivé ! Ou finalement, c'était peut-être aussi de ne voir personne pendant 2 jours et demi, c'est long.
Oui, c'était galère. Mais ça m'a fait du bien !! Compter sur soi-même, se dépasser, s'aguerrir, ça m'a permis de grandir.
On a fini par s'en sortir, pour arriver dans une auberge de jeunesse à Jasper où il n'y avait pas de douche

et qui n'était pas accessible en transports en communs. Il y a un problème et il ne reste qu'à trouver une solution.
J'ai mis 3 jours à m'en remettre complètement et 7 jours pour trouver que l'expérience avait été vraiment très bénéfique.
Au cours de mon voyage, j'ai continué vers Vancouver puis Vancouver Island (Victoria, Ucluelet, Tofino) puis j'ai pris le train pour revenir à Toronto. Une superbe expérience.
J'ai découvert qu'au bout d'1 mois de voyage, j'ai besoin de me reposer et digérer ce que j'ai vu/vécu et les rencontres que j'ai faites.
De retour, j'ai fait du canoé-camping à la Mauricie, j'ai remonté le St Laurent doucement puis traverser à St Siméon. Puis ayant beaucoup appris de mes voyages, j'ai préparé mes itinéraires pour l'Est, prévu mes auberges, mes voitures, mes déplacements et je suis parti 1 mois et demi pour faire le tour de la Gaspésie, descendre en train à Halifax, aller 8 jours à Terre-Neuve (visiter l'Ouest et l'Est avec une ukrainienne rencontrée à l'auberge de jeunesse), retour à Halifax, me grouiller d'aller visiter les sites historiques qui allaient fermer, puis aller me reposer sur l'Ile du Prince Edouard. Vadrouiller là-bas. De retour à Halifax où j'ai rencontré des allemands et des français, j'ai accueilli un ami français et on a fait le tour de la Nouvelle-Ecosse.
Ce que j'ai adoré : - la Nouvelle-Ecosse pour les paysages, l'activité, l'histoire de la région (c'est là que débute la Nouvelle-France) et des sites superbes tels que la forteresse d'Halifax, Louisbourg sans oublier la presqu'Ile du Cap Breton avec ses magnifiques couleurs et puis aussi parce qu'il y a moins de visiteurs. Tout le monde ne pense qu'aux Rocheuses, à Vancouver... oui c'est bien, sauf que quand vous voyez un beau paysage, ce sera le même sur des centaines de km ! L'Est, ça change, c'est varié, c'est également très beau ! et puis y a moins de français
- Terre-Neuve pour la variété des paysages et pour des vues grandioses, pour la gentillesse et l'attention des gens. Pour l'histoire aussi : qui savait que les vikings ont établi un camp ici ? que toute l'Europe venait un temps pêcher la morue ici ? que lors de la 2nde GM, la GB avait prévu, en cas de défaite, d'y retirer sa flotte ? Et Saint John's ? et Placentia ? Le parc de Gros Morne est absolument magnifique, l'excursion en bateau sur l'un des "étangs" est grandiose. Les guides de voyage parlent de "paysages désolés", "hostiles"... Bah c'est dommage. Un de mes endroits préférés.
- l'Ile du Prince Edouard, pour son charme, sa douceur de vivre. Pour l'accueil dans l'AJ de Charlottetown.
J'ai rencontré des voyageurs solitaires, des baroudeurs d'un autre niveau que le mien, des gens qui n'avaient pas le temps d'aller à plus de 100 km de Montréal. Je crois qu'on voyage chacun pour nos raisons, avec ce qu'on est.
A ceux qui hésitent : allez-y, lancez-vous ! J'ai découvert que l'inconnu est préférable au monde connu mais sans saveur.
Cependant, mise en garde : le Canada a plein d'avantages pour les voyageurs seuls (sécurité, accueil...) mais ne pensez pas que c'est la France en plus grand. Le pays est immense, 90 % de la population se trouve sur une bande horizontale le long de la frontière américaine, ce qui signifie de vastes étendues sans personne. La nature n'a rien à voir avec la nôtre. Vous n'êtes pas à l'abri d'une rencontre. Ne l'ignorez pas et ne vous surestimez pas.
Marcher à 2 dans les Rocheuses, ce n'est pas suffisant. Parc Canada recommande 4 en rangs serrés. Ca semble peut être ridicule sauf que le grizzli est naturellement agressif, il court plus vite que vous, nage plus vite, monte mieux aux arbres, il est capable de vous tuer d'un coup de patte et vous ne lui faites pas peur. Et il n'y a pas que des grizzlis au Canada...
J'ai croisé 2 fois un ours noir. Oui oui, certains disent qu'un ours noir c'est plus petit et naturellement craintif. Ils ont raison. N'empêche que si vous le surprenez avec son petit ou quand il est occupé, vous êtes mal...
J'étais seul, en fin de journée, et je l'ai surpris malgré moi car il était occupé à manger et ne m'avait pas entendu. A moins de 10m, quand vous vous rendez compte de sa présence parce qu'il gronde, on en mène pas large. Dans ces conditions, soit je trouvais la solution, soit la solution n'existait pas. Ayez ça à l'esprit et préparez-vous en conséquence. Ne sous-estimez pas les règles de sécurité ni les consignes de comportement face aux ours. J'avais aussi mis le paquet sur mon matériel : léger, résistant, il ne m'a jamais fait défaut. Si vous partez seul, prévoyez.
Mais bon, mon meilleur souvenir, c'est sans doute cette fameuse fin de journée, dans la balade du Cap Gaspé au parc régional de Forillon (Gaspésie). Alors que je venais d'avoir très peur avec l'ours mais que j'avais eu le bon réflexe, je suis arrivé près du phare. Ebloui par le paysage au soleil couchant, j'ai eu une autre rencontre imprévue. A sa vue, je me fige instantanément. L'animal s'avance sans me remarquer. Et s'assoit pour regarder. Si proche, je peux voir la couleur de ses yeux.
Ce félin plus beaucoup plus grand qu'un chat, cette couleur fauve claire, ces oreilles avec de longs poils... C'est un lynx ! Sauvage. Magnifique.
J'ai été long mais j'espère vous avoir donné envie de voyager !
Si vous avez des questions sur des itinéraires, des destinations, n'hésitez pas.