La vie extraordinaire d'un type ordinaire V : l'été à 71$

[Boudiniz]

Mon été à Québec m’a coûté 71$. Pour ce prix-là, j’ai vu 8 concerts, 3 spectacles, 2 films, 2 expositions, lu 7 livres, bu 2 bières et vu un Orignal !

C’est probablement le Festival d’Eté de Québec qui a le plus grevé mon budget, et pas seulement à cause du pass au forfait de 35 dollars qui me donnait accès à 9 jours complets de concerts dans tous les sens.
C'est en partie à cause de PLACIDO DOMINGO, parce que le jour où je suis allé l'écouter, j’ai eu un petit creux. C’était mon premier Opéra et je me disais que j’allais m’ennuyer. Alors s’ennuyer ET mourir de faim, non. Comme le jour précédent j’avais finalement vu KISS parce que la salle accueillant l’excellent groupe de Toronto METRIC – que je rêvais de voir – était bondée, j’avais pu expérimenter déjà l’emprise de la foule compacte – bien que respectueuse au Québec, c’est agréable – qui m’avait empêché de quitter ma place pour aller boire une bière sous peine de ne jamais retrouver l’emplacement de mes amis au milieu des Plaines d’Abraham. En prévision d’un tel épisode à répétition, et eu égard au creux à l’estomac qui m’habitait, suivez-moi bien, je suis donc allé m’acheter une Queue de Castor banane-chocolat à l’avance : 9,5$.
En fait, ce jour-là, j’ai eu tord de m’en faire, car chacun avait apporté sa chaise et était confortablement assis sous les étoiles pour écouter le ténor, j’aurais pu facilement me faufiler pour me diriger vers la roulotte à beignets et revenir. C’est d’ailleurs ce que mon camarade a fait ce soir-là pour m’offrir une bière, une petite Molson Dry, parfaite après le dessert.
Du coup, pour Sting, j’y suis allé tranquillos. Je me suis installé sur la pente douce, bien en face de la scène, avec les deux écrans géants de chaque côté pour refléter mon idole en grand format. Le son était absolument parfait ! Sting en grande forme, j’avais rêvé de « Bring on the night » avec son solo de piano jazzy exceptionnel, et il l’a fait ! Merci Sting ! J’ai offert une bière à mon ami pour fêter ça : 12$.
Avec Jeff Beck qui ouvrait le festival et les Lost Fingers pour danser au milieu de la nuit, ce début d’été à Québec commençait sous les meilleurs auspices.

Pour alterner avec un peu de culture, je suis allé au Musée des Beaux Arts voir « l’art américain de 1850 à 1950 ». Je ne savais pas à quoi m’attendre, je savais que Calder y était représenté, j’y suis allé les yeux grands ouverts. Plusieurs toiles illustraient des courtes périodes rapprochées et permettaient de voir l’évolution de l’art et de la pensée sur la continent, le tout franchement bien ficelé, avec des œuvres peu connues. Puisque j’avais payé mon entrée (13$), j’ai fait le tour du Musée, ses deux pavillons sur quatre étages, j’ai même vu une retranscription du conflit Franco-Anglais en peintures. Content de moi, je suis allé m’inscrire à la Bibliothèque publique (gratuit) et j’y ai emprunté mon premier livre de l’été (gratuit). Puisqu’ils avaient des tas de films en DVD également, je m’en suis pris un pour la soirée (1,5$).
Question cinéma, j’aurais pu profiter gratuitement des projections en plein air du Parc Roland-Beaudoin, qui diffusait notamment « Coraline » tout juste sorti au cinéma, en alternance avec les concerts de l’Orchestre Symphonique de Québec qui reproduisait les grandes musiques de films ; mais non : pas eu le temps !
A la place, je suis allé voir le Moulin à Images, ces fameuses projections sur les silos à grains du vieux port, retraçant l’histoire de Québec. Avant d’y être allé, c’est difficile de s’imaginer le génie qu’il y a à utiliser un écran de 600 mètres de large, soit pour laisser l’image traverser la scène, soit tournoyer sur elle-même en dizaines d’exemplaires ou la laisser briller comme dans les vitraux d’une église : une expérience sensorielle intense (et gratuite).
En terme de représentations, nombreux sont ceux à avoir raté « le fil de l’histoire », un spectacle de danse, démarrant au petit séminaire (juste après Simons dans le vieux Québec), les acteurs partageant avec le public le fameux « fil » :

et dévalant ensuite les rues en dansant et grimpant sur les monuments, jusqu’au Musée de la Civilisation en basse ville.

Tout un parcours à suivre, gratuit et très beau, rendant hommage à l’homme et à la femme du quotidien. Si.
Comme ça remuait pas mal, je suis allé me rafraichir à la piscine Lucien Borne, qui offre des bains pour tous à plein d’heures de la journée, jusqu’à 22h parfois, gratos aussi.
J’ai profité également des jeudis au Kiosque Edwin Bélanger, derrière chez nous sur les Plaines d’Abraham, juste avant le Musée des Beaux-Arts : un kiosque de jardin public à l’ancienne, rond et peint en vert, qui abritait ces jours-là des concerts Jazz et Rock, durant tout l’été. Installé sur un couverture, dans l’herbe, j’ai eu droit à une soirée spéciale Aretha Franklin, avec une chanteuse blanche à la voix chaude et profonde ; on s’y croyait vraiment ! Et le jeudi suivant, un compositeur de 18 ans, la chemise à carreaux et les santiags usés, nous a fait des solos de blues à décoller le sable ! Comment ça, à quel prix ? Gratuit, aussi.
J’ai touché l’apogée du monde du spectacle à Québec hier soir, en allant voir celui du Cirque du Soleil. Evidemment, comme tout le monde, j’en avais entendu parlé. Et alors ? C’est du cirque, quoi. J’ai suivi une des trois machines itinérantes censées rassembler le public sous les ponts de l’autoroute. Quelques jongleurs et joueurs de feu s’agitaient. Bon. La première heure était sympa, pour du cirque. C’est la deuxième heure qui m’a prise par surprise : je ne pensais pas qu’un spectacle gratuit pouvait autant être abouti ; ça a été un festival, entre les acrobates musclés, sautant et roulant dans tous les sens, les pantins géants, les farfadets guillerets, les chanteuses émotives, les trapézistes élancés, le tout en musique, en lumière, en étoffes, en cris de joie et d’amour, c’était… surprenant ! Démentiel ! Un vrai bonheur ! Je ne savais pas que c’était ça, l’expérience du Cirque du Soleil. Sans rire, j’aurais payé pour ça !

Alors je fais les comptes : oui, c’est bien ça, tout ce que j’ai vécu cet été-là m’a couté 71$ en tout. Pas plus. Le pied, non ? J’adore Québec !

Et l’Orignal promis dans l’introduction, me direz-vous ? Cerise sur le gâteau, comme j’ai eu la bonne idée de m’abonner pour un an à tous les parcs SEPAQ du Québec (22 parcs, il faudra que je vous en parle dans mon prochain numéro, j’ai quelques photos intéressantes à ce propos), je suis allé faire un tour dans celui de la Jacques-Cartier, à ½ heure de Québec, un soir de semaine, pour voir…
A 19h40, au kilomètre 19, dans l’eau, en plein milieu, pas gênés par les rares voitures encore passantes, deux orignaux buvaient et mangeaient les herbes marines. Tranquilles. Relevant leur tête mouillée régulièrement pour mâcher ou me regarder, je ne sais pas. Moi j’étais les yeux écarquillés :

(merci à Arnaud pour ses photos gentiment prêtées)

[Delph]

Merci beaucoup pour ce post, ça me rappelle pourquoi j'ai tant aimé mon premier été à Montréal... Je n'ai jamais vu autant de films et concerts gratuitement qu'alors!

[Lilou]

Nice ! C'est cheap et complet a la fois, tout ce qu'on aime

[QB122]

Un peut comme les bagel
Non, supère bonne présentation, merci

[valergene]

Tout ça donne vraiment envie de revenir voir cette bonne ville de Québec.
Merci pour ce post très bien narrer