2L’histoire de Taïwan, un roman national(iste) ?


Culture taiwanaise 2

Vue depuis le mémorial dédié à Chiang Kai-Shek face au Théâtre National et à la Salle de Concert Nationale

La façon de raconter l’histoire de l’île peut varier grandement d’un narrateur à l’autre, et le sujet est hautement sensible depuis quelques années, au fur et à mesure qu’émerge – notamment au sein de la jeunesse – le désir d’une identité taïwanaise bien distincte de l’identité chinoise, comme nous avons pu le voir lors de la révolte des lycéens contre la réforme des programmes en 2015. Aussi, il est important de distinguer l’histoire de l’île de Taïwan de l’histoire de la République de Chine, qui est le nom attribué au territoire (auquel s’ajoutent quelques îles dont les îles Pescadores) de nos jours. La rédaction de ce chapitre n’est pas sans risque d’inexactitudes comme précisé en introduction, mais nous cherchons plutôt ici à vous offrir en amuse-gueule quelques éléments historiques que vous retrouverez, sans aucun doute, au cœur de l’actualité lors de votre séjour sur l’Ilha Formosa, plutôt qu’un plat de résistance bien consistant.

Pour vous y retrouver plus facilement, voici en condensé, les périodes qui marquèrent l’histoire de l’île de Taïwan :

  • On a retrouvé des traces d’occupation de l’île remontant à 30 000 ans  av. JC et on a donné à ces restes humains le nom d’Homme de Zuozhen, mais il semblerait que les habitants de l’île aujourd’hui n’aient pas de lien direct avec ces premiers résidents.
  • L’origine la plus lointaine des populations actuelles occupant l’île remonte à 4 000 avant notre ère, lorsque les ancêtres des populations austronésiennes actuelles migrèrent depuis la baie d’Hangzhou, sur le littoral sud de la Chine. On les considère comme les ancêtres des populations aborigènes de l’île aujourd’hui.
  • En 1542 ap. JC, l’île apparut aux yeux des Européens pour la première fois, par l’intermédiaire d’une expédition portugaise. Ce sont les marins de cette expédition qui seraient à l’origine du nom de « Formose » qui resta longtemps le nom de Taïwan à l’échelle internationale. Cette « découverte » marqua également le début d’occupations alternées de l’île par différents peuples européens et asiatiques.
  • Après deux tentatives de colonisation avortées par les Japonais, les Hollandais entreprirent à leur tour la colonisation de l’île entre 1622 (île de Penghu) et 1624 lorsqu’ils se réfugièrent sur l’île principale, délogés par les Chinois. C’est à cette époque qu’ils firent construire le fort Zeelandia et la ville d’Anping (Tainan). L’île attira également les Espagnols installés aux Philippines à cette époque qui tentèrent leur chance plus au Nord, à Keelung, à partir de 1626. Après la construction du fort de San Salvador à Keelung et celle du fort de San Domingo à Tamsui, ils abandonnèrent finalement leur plan d’expansion sur l’île et la quittèrent en 1642 après une énième tentative des Hollandais de les chasser.
  • Afin d’asseoir leur domination sur les populations aborigènes, les Hollandais utilisèrent des moyens militaires mais développèrent également le potentiel agricole et commercial de l’île, incitèrent des paysans de la province chinoise de Fujian à immigrer à Taïwan, et tentèrent de christianiser la population. Cette politique aura une forte influence sur le métissage de la population taïwanaise entre aborigènes et chinois.
  • Zheng Chenggong, général chinois plus connu sous le nom de Koxinga, fidèle à la dynastie des Ming tombée face aux Mandchous (dynastie Qing) en 1644 en Chine continentale, prendra finalement possession de l’île en 1662 afin d’en faire une base arrière pour reconquérir la Chine (tiens, tiens… vous verrez que l’histoire se répète).
  • Tout en fomentant leur projet de reconquête, Zheng Chenggong et ses descendants établirent un gouvernement autoritaire et très militarisé, étouffant quelques révoltes de la part des populations aborigènes et les migrations d’Ouest en Est, dans le détroit continuèrent malgré l’interdiction en cours. Mais les Mandchous n’avaient pas dit leur dernier mot et passèrent à l’attaque en 1683. Les Zheng se rendront finalement après le débarquement d’une force militaire sur les îles Pescadores. Cette expédition n’avait pas vraiment pour but de coloniser Taïwan mais plus de faire chuter la dynastie Zheng qui représentait une menace pour l’empire. Après un premier retour de nombreux Chinois vers leur terre d’origine, les migrations vers Taïwan reprirent par la suite sans jamais vraiment s’arrêter, ce qui exerça une pression de plus en plus forte sur les populations aborigènes qui vivaient principalement dans les montagnes (ce qui est le cas encore aujourd’hui).
  • Au XIXe siècle, Taïwan fut le théâtre de conflits divers et variés entre populations chinoises de différentes régions, mais aussi avec des forces armées britanniques, japonaises ou encore françaises dans le cadre de guerres opposant ces différents pays à la Chine (guerre de l’opium, guerre franco-chinoise…).
  • Affaiblie par de nombreuses défaites consécutives, le prestige de la dynastie Qing et la tradition classique en Chine subissent un revers considérable dont la défaite de la guerre sino-japonaise (1894-1895) sera l’apogée. C’est à l’occasion de cette guerre que l’île passera sous le joug japonais par le traité de Shimoniseki. En parallèle, en Chine continentale, de nombreuses protestations finiront par donner naissance à la révolution de 1911, la chute de la dynastie Qing et la création de la République de Chine par le parti nationaliste de Sun Yat Sen en 1912 (une date à retenir, vous le comprendrez très vite) – voir à ce sujet, le très beau film « Le dernier Empereur » de Bernardo Bertolucci (1987).
  • Sous le contrôle du Japon, la population de l’île fera face à une politique d’assimilation très forte, passant non seulement par l’acquisition de la langue, mais aussi par la maîtrise des us et coutumes des habitants de l’empire du soleil levant. L’occupation contribua aussi significativement à un nouveau développement agricole et à l’industrialisation. On peut déjà apercevoir ici les prémices d’une mixité culturelle sur laquelle sont fondés de nombreux débats actuels, sur la construction de l’identité taïwanaise (si tant est qu’il puisse n’y en avoir une incarnant cette diversité).
  • En 1945, lorsque la seconde guerre mondiale prend fin, le Japon est contraint de libérer l’île des forces nippones, et celle-ci repasse sous contrôle chinois – entendons ici, sous le contrôle de la République de Chine du Kuomintang (KMT), parti nationaliste de Sun Yat Sen (considéré comme le père de la Chine moderne).
  • De nouvelles migrations d’importance créent de vives incompréhensions et tensions entre Chinois venus du continent et Taïwanais (« melting pot » de nombreuses populations aborigènes et vagues successives de migrants chinois acculturés après une occupation japonaise de 50 années). Finalement les Taïwanais n’avaient-ils pas fait le jeu du Japon pendant la guerre, enrôlés au sein de son armée ?
  • Une gestion plus que contestable de l’île par le KMT (réputée largement corrompue et violente à l’égard des Taïwanais) associée à une imposante sinisation, doublée d’un anticommunisme paranoïaque, mènera à l’événement tragique référencé aujourd’hui comme « l’Incident 228 » en référence à la date de 28 février 1947, début d’une révolte taïwanaise faisant suite à une énième bavure du régime politique en place et marquera le début d’une période douloureuse sur l’île, celle de « la Terreur Blanche ». En 2008, Stéphane Corcuff, sinologue et taïwanologue basé à Taipei, parlait de l’évènement en ces termes en 2008 : « L’Incident 2/28 était à tous points de vue un massacre fondateur, signant le certificat de naissance du mouvement indépendantiste taïwanais, qui se développa rapidement à l’étranger sous la forme initiale d’un sentiment anti-chinois, anti-Chiang Kai-shek et anti-KMT, faisant la promotion de « l’indépendance de Taïwan » contre la République de Chine à Taiwan ». Cet événement reste aujourd’hui très polarisant lorsque l’on évoque l’histoire taïwanaise.
  • La défaite du parti nationaliste du Kuomintang face aux communistes ralliés derrière Mao Zedong en Chine continentale, entraînera le repli de celui-ci sur l’île : ses dirigeants ainsi qu’environ deux millions de continentaux s’exilent massivement à Taïwan, dans l’espoir d’un jour reconquérir la partie continentale de la Chine (l’histoire se répète !). Le Kuomintang prend désormais le plein contrôle de Taïwan, et se considérera toujours comme représentant légitime du peuple chinois.
  • La « Terreur Blanche »,  mentionnée précédemment sera incarnée légalement par la loi martiale mise en cours sur l’île de 1949 à 1987 par le gouvernement de Chiang Kai-Shek. Celui-ci fait la chasse aux intellectuels et membres de l’élite sociale soupçonnés de sympathie avec le parti communiste chinois (emprisonnement, disparitions et meurtres rythment bien malheureusement la vie de ces catégories de la population principalement). Les « lois contre la subversion » sont finalement utilisées contre tous les opposants.
  • La guerre froide permet au régime du KMT de se positionner comme fidèle allié des Etats-Unis et l’importante aide américaine permettra de continuer la politique de modernisation entreprise sous l’occupation japonaise. À cette époque, c’est bien la République de Chine qui siégeait à l’ONU comme représentation légitime de toute la Chine.
  • Puis, les relations entre la République populaire de Chine et l’Union soviétique se refroidissant, les Etats-Unis voient leur intérêt à se rapprocher de cette première, notamment à des fins commerciales, et en 1971 le siège de membre permanent à l’ONU est retiré à la République de Chine pour être offert au gouvernement de la Chine populaire.
  • Une fois la loi martiale abolie, un nouveau parti politique voit le jour, le PDP (Parti Démocrate Progressiste), signe fort d’un premier pas vers une forme politique démocratique.
  • Dans les années 1990 et 2000, le KMT et le PDP se sont partagés alternativement le pouvoir, avec une question toujours au centre du débat : se rapprocher de la République populaire de Chine notamment pour des raisons d’essor économique, ou s’en éloigner pour se maintenir le plus loin possible les ambitions souveraines de celle-ci ?
  • D’autres partis politiques ont vu depuis le jour et la question de l’indépendance au cœur du débat reste plus qu’épineuse. Quand certains privilégient le développement économique à tout prix, quitte à accroître leur dépendance vis à vis du continent, d’autres se concentrent sur le développement de l’idée d’une identité taïwanaise bien distincte de celle du « continent « .
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Annaïk

Et voilà, le plus dur est fait. Nous sommes partis. Ce qui était un lointain projet est désormais notre quotidien; nous faisons un (petit) pas de côté pour quelques mois, en Nouvelle-Zélande. Nous sentant pousser des ailes, nous nous transformons temporairement et enfilons notre costume de Nouveau Zélé. But de l’expédition : retrouver un anneau magique, ou un truc du genre. Yihaaa.

Comment ? Ha ? Oui, bien. Entendu. Merci.

Bon, le projet a déjà été réalisé apparemment. Un mec avec des poils sur les pieds et ses potes, pas très bien compris le topo. En trois épisodes de plus de 3h; forcément, difficile de lutter. Enfin on va peut-être rester un peu quand même, prendre un café puis voir s’il y a de belles balades à faire dans le coin. La bonne nouvelle, c’est que ça va nous laisser plus de temps libre que prévu; du coup, pourquoi ne pas concocter un blog avec ce qu’on a sous la main ?

Pour préparer deux beaux Nouveaux Zélés bien chauds :

- Débiter plusieurs gros morceaux de Kiwis – d’autres Nouveaux Zélés ayant eux aussi fait un pas de côté, à découvrir dans nos rencontres.
- Presser quelques litres de sueur, puisqu’on va se retrousser les manches et enfiler le bleu de chauffe – plus de détails sur nos expériences terrain et terreau dans L’écoquille.
- Ajouter un zeste de jus de cervelle, à retrouver dans Envolées, pour avoir certaines de nos impressions / réflexions de voyage (édition limitée).
- Saupoudrer çà et là de photos accompagnées de nos écoutes du moment, dans Gazouillis.
- Faire revenir le tout dans une marmite au court-bouillon afin de voir si la soupe est meilleure ailleurs, à savourer dans la Kiwisine.
- Toutes les étapes-clés de la recette sont résumées dans Plan de vol.
Au final, nous espérons que cette année nous permettra d’expérimenter un cocktail alliant nature, temps et rencontres. En bref, il sera question de kilomètres avalés, et de courgettes parcourues. Ou l’inverse.

Bon ap’ et rendez-vous sur: https://www.lesnouveauxzeles.com/ !

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