- Âge au début du PVT : 30 ans
- PVT :solo au Yukon de 2016 à 2018
- Domaine professionnel : Chargée de relations publiques dans un théâtre
- Activité professionnelle au Canada : Serveuse dans un restaurant, chargée de production pour un événement et divers volontariats (ranch et bed&breakfast)
- Économies en arrivant : 3 500 euros
Un congé sabbatique pour partir
J’étais en CDI depuis 4 ans dans une ville où je ne m’épanouissais pas et j’avais décidé de ne pas faire la saison culturelle suivante. Je cherchais depuis quelques temps à quitter mon poste ou du moins prendre l’air par des candidatures, une formation, le PVT était un moyen comme un autre. Il se trouve que j’ai été tirée au sort dans les premières pour le celui-ci, j’ai vu ça comme un signe. Ça m’a « juste » donné un coup de pouce pour m’aider à partir.
J’ai demandé un congé sabbatique à mon employeur, car je ne savais pas combien de temps je partirais et en même temps c’était rassurant, j’étais en CDI quand même. Je partais sereine avec la sécurité de retrouver un poste à mon retour. Ça a été rassurant et en même temps, quelque chose planait toujours au-dessus de moi. Au moment où je suis partie de mon poste, je me suis demandé si je n’aurais pas mieux fait de démissionner pour être plus libre. Je me suis dit : « En fait, je reste attachée à quelque chose ».
Incertitude et charge émotionnelle
Avant de partir, une amie m’a grandement aidée sur les choses pratico-pratiques et les débordements émotionnels, elle était partie en Australie et savait ce que je vivais et surtout le comprenait. Elle m’a permis de relativiser ce que je ressentais, la panique, les crises de larmes, les : « Mon dieu, est-ce qu’il faut que j’ouvre un compte en banque ?! ». J’ai aussi vu un acupuncteur qui m’a fait énormément de bien. C’est une personne qui a voyagé et c’est toujours rassurant d’écouter des gens qui sont partis et te disent que tout ira bien. Je me souviens qu’en y allant, j’avais un poids sur l’estomac et que j’étais à fleur de peau. Il a travaillé sur la charge émotionnelle, et je suis sortie de là en « guerrière » ! J’ai pu respirer et plus rien ne pouvait m’arrêter, je partais ! J’avais déjà remis en question mes projets initiaux, en fait, je n’étais plus sûre d’avoir envie de prendre mon quotidien et de le mettre de l’autre côté de l’Atlantique.
Une rencontre impromptue avec le Yukon
Lors du forum Destination Canada auquel je suis allée deux semaines avant mon départ pour accompagner une amie, je suis tombée sur une offre d’emploi dans un café au Yukon. Le Yukon, c’était la deuxième ou troisième fois qu’il m’arrivait aux oreilles. Lorsque j’ai remis en question mes projets initiaux, j’ai réalisé que le Canada pouvait être autre chose qu’une envie de changement, mais que cela pouvait être ce rêve de gamine né devant un reportage Arte sur la Finlande : voir les grands espaces enneigés !
J’ai toujours été attirée par les métiers de la restauration, l’annonce m’allait donc bien : « Cherche quelqu’un qui aime la bonne bouffe ». C’était une crêperie, je suis bretonne, ils cherchaient une personne passionnée et pas juste une serveuse.
La représentante de l’association Franco-Yukonnaise du forum m’a présenté le lieu comme vivant, avec des concerts, des expositions et en plus avec un accès aux sources chaudes ! Elle me parlait du Yukon avec des étoiles plein les yeux ! Mon amie qui m’accompagnait m’a dit : « C’est pour toi, c’est ce que tu cherches ! ». Je suis rentrée excitée comme une puce en Bretagne, j’ai dit à mes parents : « Je pense que je vais partir au Yukon ». Et eux de répondre « C’est où le Yukon ?! » *Rires*.
Direct, je réponds à l’annonce, avec un anglais approximatif, expliquant à la recruteuse que je vais traduire mon CV, mais que j’ai tellement envie de postuler que je lui transmets déjà celui en français. Elle me répond aussitôt qu’elle est francophone et qu’il n’y a donc pas de problème. Pour le moment le resto est fermé et elle me recontactera alors à son retour de vacances. Notre skype était prévu le lendemain de mon arrivée à Montréal. Je suis donc partie au Canada sans savoir où j’allais « m’installer ».
J’avais pas beaucoup d’expérience en restauration mais elle m’a fait confiance là-dessus, ça s’est fait au feeling. On devait être un mardi peut-être, et elle m’a dit : « C’est bon pour moi, si tu peux être là jeudi ou vendredi… », j’ai fait : « Okay ! » sans trop réaliser ce que c’était d’aller au Yukon en plein hiver.
Je dis toujours : « Oui » quand on me propose un emploi, vraiment la mentalité française ou l’héritage familial, je ne sais pas trop, mais il faut que je fasse tout pour l’avoir. J’ai commencé à regarder les billets d’avion, c’était quand même très cher en dernière minute, je lui ai alors proposé d’arriver pour le jeudi suivant. J’ai profité de la semaine pour préparer mon nouveau départ, car je ne savais rien de là-bas. La gérante du café me disait qu’il me fallait une voiture, mais la Bretonne que je suis n’avais jamais conduit sur la neige et c’était pas mes projets d’en acheter toute seule au bout du monde, sans rien y connaître… Il me fallait aussi un manteau d’hiver… Cette semaine n’a pas vraiment été de tout repos !
Mais quand je suis arrivée à Whitehorse, le 12 décembre 2016, tout de suite j’ai eu un sentiment de « Welcome », de bienvenue chez moi. J’ai pris un taxi pour l’auberge de jeunesse du centre-ville, il n’y avait quasiment personne. Le lieu était plutôt familial. Le matin, l’hôtesse écrivait toujours la météo sur un panneau et elle me dit : « Oulala, il va faire froid, couvrez-vous bien, c’est ressenti -39 °C ». Je ne réalisais pas du tout. *Rires*
Les différences entre Canadiens et Français
Une Canadienne anglophone m’a dit qu’elle trouvait les Français hautains. Je lui ai répondu que c’était déstabilisant pour nous Français car les Canadiens sont toujours hyper enjoués et que nous n’arrivons pas à savoir si c’est vrai : avec des « Awesome ! », « Amazing ! » ou « C’est la meilleure chose que j’aie mangé ! » à tour de bras… Je lui ai expliqué que généralement, lorsque l’on dit quelque chose de positif, c’est que c’est sincère et qu’on est plus réservés quand on est contents, du coup cela peut paraître froid. Par contre il est vrai que nous savons facilement dire le négatif !
Aujourd’hui, je regrette ce côté enjoué au quotidien, en fait ça déteint sur nous, ça nous apporte de la bonne humeur. J’aimais bien aussi le fait qu’on l’on se fasse facilement des câlins. J’ai eu envie de garder ça en France, mais ce n’est pas vraiment possible ! En revanche, les Canadiens sont assez lisses, on aborde moins les questions profondes, de religion, de politique… Il y a quand même une différence entre les Canadiens anglophones et francophones.
L’impact du PVT sur soi
Plusieurs personnes m’ont demandé si j’avais trouvé mes réponses. J’ai sûrement donné l’impression de partir avec beaucoup de questions. Je n’ai pas eu de déclic, mais certaines évidences arrivent au fur et à mesure. Ce qui est sûr, c’est que j’ai changé mon mode de vie de manière plus profonde.
Je ne me vois plus reprendre un CDI, je n’ai plus envie d’un train-train, mes cinq jours par semaine à 35 h pour avoir mes vacances en juillet. Ça a vraiment bouleversé ça.
… même si j’ai eu des manques par moments : « Qu’est-ce que je suis tannée de toujours porter le même jean et le même pull ! » *Rires*
On reprend du confort en rentrant mais fondamentalement, je pense que je ne nourris plus l’envie d’aller faire du shopping, je m’ennuie en ville… J’adore aller flâner ou me poser dans un café, écrire ou lire. Ça a changé beaucoup de choses. Je ne sais pas encore où me poser, peut-être même que je repartirai, au Canada ou ailleurs. J’ai toujours ce rêve d’enfant qui est la Finlande… J’ai quand même de plus en plus de mal à passer un hiver sans neige…
Je pense que le plus fort que je retiens de cette expérience, ce sont les débuts, l’avant départ, le départ et les premiers mois. Ce ne sont pas les moments les plus confortables, bien au contraire ! Mais j’ai ressenti ce truc vivant : celui d’être là, à ma place, au bon endroit et au bon moment.
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