J’ai assisté récemment à une conférence à l’OFII (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration) intitulée : malentendus interculturels, donnée par Pierre-olivier SAIRE, qui enseigne le management interculturel et la gestion en contexte interculturel à HEC Montréal.
Mon but n’est en aucun cas de vous retracer l’intégralité de ce qui y a été dit, cela n’aurait pas de sens puisque l’intérêt de cette conférence réside dans son caractère interactif et est agrémentée d’études de cas que je ne développerai pas ici.
Je vous encourage vivement à y assister, on y apprend et y comprend pleins de choses.
A noter que Pierre-Olivier SAIRE est en train d’écrire un livre sur ce sujet…
Ceux qui ont trouvé un travail rapidement, ceux qui sont en stage ou aux études, bref, ceux qui ne sont pas passés par le laborieux cheminement d’une recherche d’emploi à rallonge, n’ont surement pas eu l’occasion d’avoir certaines de ces informations, c’est pourquoi je voulais vous en donner quelques unes.
Les «malentendus interculturels» de cette conférence sont principalement situés dans le monde du travail.
-En parcourant le forum, j’ai remarqué une incompréhension, plusieurs personnes se demandaient pourquoi elles n’avaient pas été retenues pour une job alors que l’entrevue s’était bien déroulée, que le courant était vraiment bien passé avec le recruteur ?
Réponse : malentendu interculturel !
Un petit retour en arrière pour mieux comprendre : A l’école en France, lorsque vous faites quelque chose d’incorrect, vous recevez un blâme (punition, mauvaise note). Les bons comportements sont peu valorisés, c’est le modèle du renforcement négatif.
Au contraire, le système éducatif canadien utilise le renforcement positif, on vous encourage, on récompense davantage tout comportement valorisé socialement.
Donc, sur le même modèle (renforcement positif), lors d’une entrevue, le recruteur va tenter de vous mettre dans le contexte le plus favorable possible pour vous aider à faire ressortir le meilleur de vous même. Et donc, il va acquiescer, vous encourager, vous sourire et ca, même si vous dites… n’importe quoi !!
-Vous savez peut être que les distances physiques diffèrent selon les cultures. Dans certaines, on se tient proches les uns des autres et dans d’autres, c’est très impoli et mets l’interlocuteur mal à l’aise.
Attention à cela sur votre lieu de travail, en tant que français nous sommes des latins, nous avons une distance sociale plus courte que les nord-américains.
En gros, il faut rajouter 15-20 cm entre vous et un Québécois par rapport à vous et un autre français. Avec les anglophones, cette distance est encore plus élevée.
Souvenir d’un cours de psychologie interculturelle : deux diplomates, l’un américain et l’autre d’un pays du Moyen-Orient (je ne me rappelle plus lequel) discutent debout. Le diplomate du Moyen-Orient (distance sociale encore plus réduite qu’en France) se rapprochait de celui d’Amérique, qui mal à l’aise reculait. Le 1er se rapprochait, le 2ème reculait…à plusieurs reprises. On a nommé cela la valse des Nations Unies car cela donnait l’impression d’une danse.
En fait, c’était un malentendu interculturel.
-La communication : de nombreuses différences ici qu’il vaut mieux connaître.
En Amérique du nord, la communication est avant tout fonctionnelle, on ne s’embarrasse pas du contexte, on va droit au but. Les silences ne sont pas synonymes de malaise…dans ce cas le français a tendance à finir la phrase de l’autre, donc à le couper dans son idée, attention !
L’écrit occupe une place moins importante, les fautes (orthographe, syntaxe) sont moins «graves».
Les Québécois débattent très peu, ils ne savent pas le faire, ca peut leur donner l’impression que l’on se dispute quand ils nous entendent.
Le conflit : sujet sensible, les Québécois fuient le conflit, la confrontation (cela ressort dans les posts sur les relations de couples franco-québécoises si mes souvenirs sont bons).
Un exemple (non donné lors de la conférence) : un ingénieur français travaillait dans une société type open space, seul parmi des Québécois. Les bureaux se touchaient et ils partageaient l’agrafeuse. Les québécois trouvaient que le français avait tendance à trop garder l’agrafeuse sur son bureau. Plutôt que de le lui dire, de l’affronter et de risquer un conflit, un des Québécois a été en parler à un responsable des ressources humaines. Toujours pour ne pas entrer en conflit, le français a gentiment été… mis à la porte.
Comme quoi, ca peut aller très loin pour des broutilles !!
-La hiérarchie et la prise de décision :
Vous savez probablement que la hiérarchie est beaucoup moins marquée en Amérique du nord qu’en France. La fonction de chef au Québec a quelque chose de fonctionnel, elle permet la coordination du travail pour une meilleure efficacité.
Lorsque que l’on prend une décision en France, chacun prépare et expose ses arguments en essayant de les imposer au groupe, en conclusion, le responsable hiérarchique qui a tous pouvoirs fini par trancher. En gros, il y en a un qui a le dessus.
Au Québec, le chef anime et le groupe tente de co-construire une solution, c’est un modèle plus participatif. Ici, chacun y met du sien, mais chacun renonce aussi à certaines de ses idées de départ.
Voilà, j’espère que ces éléments vous auront aidé, intéressé et que vous aurez eu le courage de me lire jusqu’au bout (je suis française, ma communication n'est pas de type directe !)
Avec l’aimable autorisation de Pierre-Olivier SAIRE.