Témoignage : pratiquer le cosplay en France et au Japon

Kanda pratique le cosplay depuis maintenant 18 ans. Elle a commencé en France, durant son adolescence, et depuis presque un an, elle expérimente cette pratique au Japon, grâce à un PVT.
Elle nous parle ici de ce qu’est le cosplay et de la manière dont il s’exerce en France comme au Japon !

Retrouvez également le récit de son PVT au Japon : En PVT au Japon, Kanda nous raconte son aventure !

Salut Kanda, est-ce que tu peux nous dire ce qu’est le cosplay ?

Le « cosplay » est la contraction du mot « costume » et « playing » car les pratiquants font aussi de l’acting/roleplay. Quand nous mettons un cosplay, nous devenons aussi le personnage en imitant son comportement, un peu comme des « acteurs ».

À la base, la pratique vient des USA avec les conventions Star Wars, mais c’est devenu extrêmement populaire au Japon il y a une trentaine d’années puis il y a une vingtaine d’années chez nous en France. Ça a commencé à venir avec, en 1999, la première Japan Expo à Paris, qui est le plus gros salon européen dédié à la culture japonaise.

Maintenant le cosplay regroupe différentes activités manuelles : couture, stylisation de wig (perruque), électronique pour certains, bricolage, SFX (effets spéciaux), maquillage, …, et quasiment tous les univers possibles : films, séries TV, mangas, jeux vidéo, comics, créations personnelles, grandeur nature, …

Il faut aussi savoir qu’il y a 20 ans, les cosplayers étaient vus comme des « gamins qui se déguisent ». De nos jours, l’activité tend à se professionnaliser et est désormais vue par les médias comme une vraie passion.

Depuis combien de temps tu pratiques cette activité et qu’est-ce qui t’a amené à commencer ?

Je pratique le cosplay depuis plus de 18 ans, à l’époque où les réseaux sociaux commençaient à faire leur apparition. J’ai commencé le cosplay suite à un harcèlement scolaire. Je n’étais pas spécialement bien dans ma peau et je voulais prendre confiance en moi en devenant quelqu’un d’autre.

Je faisais aussi du théâtre à ce moment-là, ce qui rejoignait le cosplay, mais à l’époque je ne savais pas ce que c’était et je voulais juste m’habiller comme les personnages de manga (en 2007, dans mon collège, nous étions 5 à en lire, pour dire à quel point ce n’était pas aussi populaire que maintenant). En cherchant sur Internet au CDI, j’ai appris que ça s’appelait du « cosplay » et que ce n’était pas un style vestimentaire, mais un loisir occasionnel.

En France, de quelle manière tu pratiques le cosplay ?

J’ai d’abord commencé le cosplay avec un costume acheté (le classique pour la plupart). J’en ai eu 2 pendant environ 4 ans (de mes 14 à 18 ans). Pour mes 18 ans, ma grand-mère m’a offert une machine à coudre Pfaff de chez Lidl. J’ai créé environ une vingtaine de costumes (plus ou moins moches au début), avant qu’elle ne rende l’âme et pour mes 20 ans, je me suis offerte une machine électronique Husqvarna (oui, comme les tondeuses ) garantie à vie, avec laquelle je conçois toujours mes cosplay.

Je suis autodidacte pour la couture et je n’ai jamais utilisé de patron (tout au feeling, des fois ça fonctionne des fois non). Aujourd’hui, je suis à environ 160 costumes, une bonne trentaine de wigs (perruques), une quinzaine de répliques d’armes en tous genres et environ 200 € de maquillage juste pour le cosplay (alors qu’en temps normal, je n’en porte pas).

Est-ce qu’en France, la pratique du cosplay est très répandu ou c’est plutôt une activité qu’on dirait niche ?

Depuis une dizaine d’années, ça s’est bien répandu avec l’arrivée de l’animation japonaise sur les plateformes de streaming grand public. Les gens découvrent les animés, puis les mangas, et par extension la culture japonaise (la mode, le cosplay, l’histoire, la gastronomie, etc).

Est-ce que tu dirais que c’est plutôt facile de faire du cosplay en France/Europe ?

Il n’y a pas autant de boutiques de cosplay qu’au Japon mais avec Internet, tout est plus facile, les costumes sont qualitatifs, mais aussi plus chers que quand j’ai commencé. Et des conventions, si on cherche bien, il y en a tous les week-ends quelque part en France. Les cosplayers sont de plus en plus jeunes, ils se font offrir un cosplay pour leur anniversaire ou Noël.

Pendant ton PVT au Japon, comment as-tu pratiqué le cosplay ?

Au départ, je voulais mettre en pause le cosplay. Je suis juste partie avec mon cosplay de Furina du jeu Genshin Impact et je voulais faire l’année avec seulement celui-là. Dans le pays où le cosplay est hyper développé, j’y ai vraiment cru. C’est un cosplay avec énormément d’accessoires et c’est un personnage très apprécié au Japon, d’un jeu extrêmement populaire actuellement.

J’ai commencé à faire des événements cosplay à Ikebukuro en juin 2024 (il y en a 1 à 2 par mois), et début août, à Nagoya, il y a le World Cosplay Summit (WCS). C’est la plus grande convention au monde dédiée au cosplay, mais aussi, un concours mondial où 36 binômes de 36 pays différents font le show sur la scène du Aichi Prefectural Art Theater, afin de désigner le meilleur binôme. J’avais plusieurs connaissances qui passaient sur scène.

Lors du WCS, la petite cosplayeuse française que je suis a été prise en photo (le cosplay de Furina aidant beaucoup du fait de sa popularité). Ça m’a fait prendre confiance en moi et j’ai adoré la porter (Furina) et faire des évènements au Japon donc j’ai continué. D’autres cosplays sont nés ici (je les ai achetés car, n’ayant pas de machine à coudre, je ne pouvais pas faire autrement).

Pour pratiquer le cosplay, c’est assez simple quand on a l’habitude et qu’on sait où aller pour trouver les lentilles de contact, les accessoires, les perruques, etc. Définitivement, le quartier du cosplay à Tokyo, c’est Ikebukuro. Ils ont plusieurs magasins dédiés à cette activité.

Quelles sont les différences entre la pratique du cosplay en France et au Japon ?

En France, chaque cosplayer fait un peu ce qu’il veut : soit il fait son costume seul chez lui, soit il le commande, peu importe. Au Japon, les costumes sont souvent achetés. Pour ce qui est du make-up, il y a des sessions pour apprendre à se maquiller. Ils ont tous la même façon de faire, ce qui fait qu’ils se ressemblent tous. C’est très uniformisé.

En parlant avec des Japonaises, j’ai appris qu’ils pratiquaient souvent à plusieurs, mais qu’il y en a toujours un plus doué que les autres en make-up, donc il maquille le reste du groupe. Un autre s’occupe de coiffer les wigs (perruques), un autre encore peut faire les retouches sur les costumes, etc. Ils ont un peu chacun leur rôle. Quand j’ai dit que j’avais tout fait sur mon cosplay (make-up, coiffer la perruque, et les retouches du costume), elles semblaient super étonnées.

Est-ce qu’en tant qu’étranger c’est simple d’intégrer le milieu du cosplay au Japon ?

Alors, vu que je suis d’origine laotienne, et qu’en étant au Japon, j’ai appris à me maquiller de la même façon que les cosplayers japonais, j’ai pu m’intégrer assez facilement. Ce qui me trahit, c’est que je ne parle pas un mot de japonais. Généralement, je suis avec des gens qui sont étudiants ou qui vivent ici depuis plusieurs années, donc ça aide. C’est assez friendly comme milieu, puis il n’y a pas à dire, ils idolâtrent la France.

On a souvent une image du Japon, avec des cosplayers dans les rues à toute heure du jour et de la nuit. Quand est-il vraiment ?

En France, il n’est pas rare de voir dans des endroits publics des cosplayers. À Paris, la Défense offre un cadre futuriste, par exemple, ou au moment de la Japan Expo, dans les transports en commun, etc. Au Japon c’est NON !

En France, vous pouvez faire tout ce que vous voulez en cosplay, alors qu’au Japon, même si c’est devenu le pays du cosplay, c’est aussi l’endroit où il y a le plus de règles le concernant ! Pas de cosplay en dehors des événements et changement de tenues obligatoires. Par exemple, il est interdit d’aller en convention déjà en cosplay sous peine de se voir refuser l’entrée. Pour ce qui est des séances photos, au Japon, ils ont des studios exprès pour (j’ai pu en tester) avec plusieurs décors.

Comment tu prépares tes costumes ?

Les costumes uniquement faits de tissus, je les lave en machine et les repasse comme des habits normaux, les autres, c’est au pressing (ceux avec des accessoires dessus). Quand j’ai un événement, j’imprime une photo du personnage et réunis tous les éléments au même endroit pour faire un récapitulatif afin de ne rien oublier. Et le jour de l’événement, au dernier moment (pour éviter de froisser le costume), je le mets dans ma valise.

Quels sont les personnes et/ou univers que tu aimes cosplayer ?

Je ne fais que du jeux vidéo ou manga/animé en cosplay. Je n’ai jamais fait de films ou de séries TV, car c’est basé sur de vraies personnes.

Au Japon, le manga Wind Breaker a un énorme succès. Durant l’année, j’ai fait 2 garçons de cet univers : Suo Hayato et Tasuku Tsubakino. J’ai aussi fait Seiya, un personnage d’un otome game (jeu vidéo de romance) chinois Love & DeepSpace et du Alien Stage, une série musicale coréenne sur YouTube, très populaire au Japon et qui commence à venir en France.

Est-ce qu’après un an d’expérience de cosplay au Japon, tu penses que ça changera ta pratique en France ? Est-ce que tu as hâte de retrouver le milieu du cosplay français ?

Ma pratique ne changera pas, ce qui va changer, ce sont mes maquillages, je pense. Je me suis améliorée pour les faire. Par contre, je pense avoir un peu perdu en couture.

J’ai pas spécialement hâte de retrouver le milieu français, car je ne vais pas cacher le fait que je suis plus âgée (32 ans) et qu’il y a un gouffre avec la jeune génération. Gouffre qui se ressent moins au Japon car les événements sont souvent interdits aux mineurs qui ne sont pas accompagnés d’un adulte. Et que ce soit en France ou au Japon, personne n’a envie de pratiquer son hobby avec ses parents sur le dos.

Mais dans le milieu français, je m’y suis fait pas mal de connaissances et d’amis que j’ai hâte de retrouver (ils vont subir ma dépression, ça va être terrible xD).

Vous pouvez retrouver Kanda et ses cosplay sur son compte Insta @Kanda_Cosplay ! Merci beaucoup Kanda pour toutes ces informations !🙂