- Âge au début du PVT : 36 ans
- PVT : solo en 2017 à Montréal puis Thetford-Mines (Québec)
- Domaine professionnel : Aide-soignante
- Activité professionnelle au Canada : Gérante d’une résidence pour personnes handicapées
- Économies en arrivant : 2 500 dollars
De serial pvtiste à résidente permanente
J’ai fait un premier PVT en 2007 en Australie, ensuite je suis revenue en France, puis j’ai fait un 2e PVT en Australie parce que j’avais cumulé assez de temps de travail spécifique pour y avoir droit. Puis, je suis partie en PVT en Nouvelle-Zélande. Je suis revenue en France mais j’avais pour objectif d’immigrer en Australie. Comme je n’avais pas de qualifications, j’ai passé mon diplôme d’aide-soignante. Je me suis dit que ça allait m’aider pour immigrer en Australie. J’ai eu mon diplôme et j’ai laissé couler un peu tout ça. Comme j’ai eu 35 ans, je me suis dit : « Si je dois repartir, je n’ai plus que le Canada comme option ! ». C’est comme ça que je suis venue au Canada en février 2017. Et voilà, j’ai eu ma résidence permanente hier ! *Rires* Je suis allée la chercher hier dans les bureaux de Montréal. Presque trois ans jour pour jour après être arrivée. Sincèrement, hier, en allant au bureau pour aller chercher mon document de résidence permanente, quand l’agent d’immigration m’a dit : « Ben, félicitations et bienvenue », ça m’a fait quelque chose, ça m’a touchée. Je me suis dit : « Ce pays m’accueille, je suis pas une enfant du Canada et ils sont prêts à me donner tous les privilèges d’un Canadien ». C’est touchant. Je suis française, je suis née en France mais la France m’a pas choisie. Là, le Canada me donne l’opportunité de vivre ici, de construire ma vie ici. Je pensais pas que ça allait me faire ce « swing » là.
On ne peut qu’avoir de la reconnaissance envers un pays qui nous accueille et qui nous donne de belles opportunités, parce qu’en France, c’était plus difficile pour avoir du travail, un logement. Avant d’avoir mon diplôme, je galérais au niveau du travail et là, j’arrive et ils me donnent tout. Ce que j’ai jamais eu en 36 ans, j’ai pu le construire ici en deux ans.
Quand que je suis rentrée d’Australie et de Nouvelle-Zélande, j’arrivais pas à me refaire à ma vie en France, j’arrivais pas à me refaire une routine métro/boulot/dodo, j’avais vécu trop de choses fortes et intenses, trop de rencontres, jamais d’ennui. Là-bas, j’avais pas le temps de me lasser de quelque chose parce que dès qu’un travail commençait à me tanner, je changeais. C’était toujours de la découverte, des rencontres, en fait, c’est ça un PVT. C’est enrichissant tous les jours.
En retrouvant mes amis, il y a eu un gros décalage parce que mon absence a fait qu’on n’avait plus les mêmes intérêts, j’avais pas vécu les mêmes choses qu’eux, j’avais évolué différemment d’eux. Je m’y retrouvais pas et je me suis dit : « Faut que je continue cette vie de découvertes que j’aime, faut que je reparte ».
J’ai eu une relation qui s’est terminée et ça a été le déclencheur : « Bon, profites-en, repars, t’as pas d’attaches ». J’ai quand même démissionné d’un emploi que j’avais dans la fonction publique et puis voilà, j’ai osé. J’étais aide-soignante dans un centre hospitalier et j’ai dit : « Écoute, je repars au Canada. Si ça marche pas, on verra bien ». Tout va bien, je suis toujours là !
Un projet originel déraillé !
De base, je voulais atterrir à Montréal, ce qui me permettait de faire mes papiers en français, puis travailler un petit peu, acheter un camper van et partir à la découverte de l’Ouest. J’ai acheté mon van et à trois semaines du départ, j’ai rencontré un Québécois. J’étais sur Tinder et j’hésitais à rencontrer un garçon. Je me suis quand même dit : « Je vais y aller, j’ai pas le goût, là, je suis un peu fatiguée mais je vais y aller ». J’y ai été, on a mangé une glace et puis, ça y est, c’était parti. Depuis ce temps-là, on s’est pas quittés. Sincèrement, c’est fou ce que la vie réserve quand on s’y attend pas. Je me suis dit : « Je vais retarder un peu mon départ ». Finalement, on s’est installés ensemble…
Devenir responsable d’un établissement pour personnes handicapées
Avec mon conjoint, on cherchait une résidence de soins qui soit à vendre. On en a visité plusieurs et cette maison-là nous a interpellés plus que les autres parce qu’il y avait un grand terrain et une rivière. C’est la pleine campagne, on est à côté du Parc National de Frontenac. Nous qui aimons la nature, on s’est dit qu’on allait s’y épanouir. C’est comme ça qu’on a signé pour cette résidence-là ! On a passé une accréditation auprès des établissements de santé de Québec et on a pris possession des lieux et de la gestion en 2019. Une opportunité que j’aurais pas pu avoir en France. En arrivant au Québec, j’ai travaillé dans une résidence de jeunes handicapés et c’est ma boss de l’époque qui m’a vraiment donné envie !
Elle avait quatre résidences, deux à Montréal et deux à Québec. Je suis tombée en amour de ça, j’aime bien le concept de petite résidence où les jeunes évoluent dans un milieu familial. C’est petit, c’est pas comme dans les hôpitaux, c’est pas l’usine, c’est pas des grosses équipes. Y a qu’une personne sur le plancher pour s’occuper des jeunes. J’aime le contexte familial qu’on leur offrait plutôt que de les mettre dans des grosses institutions. On a neuf résidents.
C’est des gens qui sont chez eux, ils ont leur chambre. C’est leur habitation, ils sont placés comme ça. Il y a de l’autisme, il y a de la déficience intellectuelle, il y a de la schizophrénie et puis il y a aussi des déficiences physiques. On a un petit trisomique.
Se sédentariser : quelques regrets
Il ne se passe pas une semaine sans que je pense au voyage. Des fois, t’aurais envie de tout plaquer pour reprendre l’avion et reprendre les voyages. Quand on a commencé à regarder pour acheter la résidence, j’étais un peu réticente, j’ai dit à mon conjoint : « J’aime voyager, j’aime partir, je suis quelqu’un qui aime être libre et j’ai peur qu’avec la résidence, je me mette des boulets aux pieds et que je m’emprisonne ».
Il m’a dit : « Au contraire, tu sais ici, y a pas beaucoup de vacances quand on est salariés, au moins, avec la résidence, tu pourras partir. Moi je serai là pour gérer, tu seras plus libre, tu pourras partir quand tu veux, on n’aura pas d’obligation ». Il m’a un petit peu influencée dans ce sens-là. C’est comme ça que j’ai fini par dire : « Ok, on signe » et finalement il a tenu sa promesse et il me laisse partir quand je veux.
Vivre à Thetford Mines, en Chaudière-Appalaches
Y a une différence de mentalité avec les gens de la ville. Montréal, c’est cosmopolite et Québec aussi, y a pas mal de monde, d’échanges. Là, à Thetford, on se sent vraiment dans la campagne québécoise, il faut s’y adapter. Y a pas autant de boutiques, ça vit pas autant qu’à Québec et Montréal. Ça dépend ce qu’on cherche. L’été, c’est agréable d’être à la campagne et dans les grands espaces. On peut faire du quatre roues et du skidoo, c’est vraiment un gros point fort de Thetford.
Mon conjoint est originaire du Québec mais à Thetford, on n’a pas réussi à se faire des connaissances, on est plutôt seuls. On est vraiment occupés dans notre résidence et les fins de semaine, on loue un chalet en bordure de lac.
Convaincre ses proches
Ma mère, quand j’ai démissionné de l’hôpital d’Amiens en tant qu’aide-soignante et que j’ai laissé un CDI (qui est dur à décrocher dans la fonction publique), elle a un petit peu capoté. Elle voulait vraiment pas que je démissionne, que je parte et que je recommence tout à 35 ans. Elle disait : « Non mais t’es folle, c’est l’âge de te poser ! ». Elle savait pas ce qui allait m’attendre. Pour elle, j’étais en train de faire n’importe quoi et aujourd’hui, sans me vanter, elle est trop contente, elle en parle à ses copines. Elle est venue ici passer l’été avec mon beau-père. Ils ont adoré le Québec. Franchement, il en faudrait peu pour qu’ils viennent s’installer là aussi ! C’est une fierté pour tout mon entourage, ma famille, mes proches. Mes amis, par contre, c’est sûr qu’ils disent : « On se manque ». Je manque à mes amis et ils me manquent . Ça, c’est quelque chose de dur à gérer mais ça fait partie du jeu.
Trois PVT changent un chemin de vie
Mes PVT ont littéralement changé ma vie. Du jour où je suis partie en Australie, ma vie n’a plus jamais été la même. J’ai plus jamais eu la même façon de penser. Je me suis mise à percevoir la vie différemment, à me dire que chaque jour comptait. Je supporte pas de passer à côté de ma vie, c’est-à-dire de rien faire, de pas voyager, de rester cloîtrée chez moi, je ne supporte plus ça. J’ai besoin de vivre ma vie à fond, on s’aperçoit qu’elle défile. Oui, dans ma vie, il y a un « avant PVT » et un « après PVT ». Clairement.
Je suis partie en Australie dans un moment de détresse où j’avais perdu mon conjoint, mon travail et mon appartement. C’est dans ces circonstances-là que je suis partie. J’’étais à une époque où je voyais tout en noir. L’Australie m’a sauvée et j’ai vraiment l’Australie dans mon coeur. J’ai une affection particulière pour ce pays.
D’ailleurs, je me suis fait tatouer sur l’avant-bras les étoiles du drapeau australien avec la feuille de la Nouvelle-Zélande et des oiseaux symboles de liberté et j’ai écrit : « Ma route, mes rêves et ma vie » en anglais.
Avant même de venir au Canada, je savais que ça allait être complètement différent. Je me suis dit que c’était pas le même climat, qu’on pourrait pas barouder au Canada comme on baroudait en toutes saisons en Australie.
Entre mon dernier PVT en Nouvelle-Zélande et le Canada, y a quand même 7-8 ans qui se sont écoulés : c’est sûr que j’ai grandi et mûri, aussi. Ça fait aussi une différence !
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