- Âge au début du PVT : 27 ans
- PVT : solo en 2018 à Montréal puis Matane (Québec)
- Domaine professionnel : Mixeur son
- Activité professionnelle au Canada : Mixeur son
- Économies en arrivant : 3 000 euros
Partir pour dépasser sa timidité
En partant à l’étranger, tu dois forcément faire des démarches administratives et il faut sortir rencontrer des gens. À force de se « forcer », la peur du jugement des gens disparaît. Je trouve que c’est vraiment agréable parce que ça te permet de découvrir d’autres facettes de toi-même et d’apprendre à mieux se connaître. Au-delà de la découverte d’un pays, c’est une façon de grandir, de devenir adulte. C’est l’impression que j’ai maintenant : d’être devenu un adulte, en me retrouvant autonome, tout seul. T’es quand même à 6 000 km de ta famille, tu peux pas dire : « Papa, j’ai un problème, comment je fais ? ». T’es obligé de te débrouiller par toi-même et si t’as besoin de conseils, tu dois aller voir des gens, poser des questions.
Au-delà de l’émerveillement culturel, c’est aussi une belle évolution, une belle expérience.
Travailler comme mixeur son sur un dessin animé connu
Ça fait à peu près cinq ans que je fais ça, j’ai fait une école de son dans le sud de la France. Après, j’ai travaillé un peu à droite et à gauche en prestations, en studio d’enregistrement. Dans le son comme dans beaucoup de métiers maintenant, y a beaucoup de monde qui veut travailler et y a pas beaucoup de travail. Il faut forcément monter sur Paris. J’ai jamais aimé la ville de Paris.
De toutes les possibilités de PVT qu’il y avait, c’était le pays qui me paraissait le plus ouvert sur les possibilités de travail. Il se passe beaucoup de choses au Canada et au Québec. Ça a fait pencher la balance.
C’est en envoyant des CV à droite et à gauche dans les boîtes de production qu’on m’a contacté. On a commencé à discuter et à envisager un contrat. Ça s’est pas fait tout de suite ! D’abord, ils m’ont fait venir jusqu’à Matane pour faire un essai et discuter avec eux. Matane-Montréal, c’était 7 h 30 de voiture, c’est pas la porte à côté. Ils m’ont payé la voiture, l’hôtel sur place, vraiment, ils m’ont mis à l’aise en arrivant. On a surtout discuté avec le mixeur son, le directeur et le producteur de la société. Ils m’ont dit : « Pour nous c’est ok, tu reviens en février pour commencer à travailler ! ».
Il y a eu presque six mois de délai entre le moment où j’ai fait l’entretien et le moment où j’y suis allé parce qu’il y a eu énormément de retard qui s’est accumulé au fur et à mesure, sur le projet de dessin animé Tom Sawyer !
Je connaissais bien l’univers de Tom Sawyer et c’était un gros projet à l’international, une coproduction française, diffusée dans plusieurs pays. C’était pour moi un palier supérieur. Travailler dans le dessin animé, c’était pas un rêve de gosse mais presque, ça change de la musique ! Travailler dans la musique, c’est cool, mais je trouvais ça plus stressant, pourtant je n’ai jamais eu autant de responsabilités qu’ici. Peut-être que les gens sont plus détendus de travailler sur des dessins animés.
Mon employeur veut pas que je parte, il fait tout pour prolonger mon permis de travail. Il m’a dit : « Non, tu restes avec nous, tu restes à Matane ! ». Y a d’autres projets qui arrivent après. Moi je me régale à faire ça. Ils m’ont formé parce que c’est une architecture de travail différente. Évidemment, ils m’ont appris quelques façons de travailler pour aller plus vite, pour être meilleur. Chaque mix que je fais, je le réécoute avec le mixeur son qui a vingt ans de métier.
Une expérience sur le long terme et pleine de promesses
Je me plais à Matane et mes employeurs me proposent de financer mon prochain permis de travail parce que j’ai pas travaillé assez pour avoir droit au CSQ* via le PEQ**. Ils me proposent de faire une EIMT*** et de payer le permis de travail fermé. Pour eux, ça coûte 1 000 dollars pour prouver qu’ils n’ont pas trouvé de Canadiens pour travailler sur le projet. Mon collègue qui travaille sur les documentaires m’a dit : « Je vais te donner des documentaires que moi je dois faire pour que tu puisses faire tes heures ». J’étais gêné quand il m’a dit ça, je lui ai dit : « Je veux pas te piquer ton travail ». Il m’a dit : « J’ai assez cotisé pour toucher le chômage, prends mes heures, je te les laisse, ça me fait plaisir et au moins tu restes ici ». Mon employeur a trouvé un moyen de me faire une formation, ça me fait gagner 50 heures en plus. Il va m’envoyer sur les tournages à partir de cet été. Ils ont trouvé plein de solutions pour me garder. Je m’y attendais pas ! Ça les arrange aussi de me garder parce que je leur coûte moins cher qu’un mixeur son à Montréal. Il m’a dit aussi : « Faire venir quelqu’un de Montréal à Matane, c’est quasi mission impossible » et « Prendre quelqu’un en externe, c’est beaucoup trop cher, nous, on a tout à y gagner à te garder ».
Je pense aussi à mon CV, si demain ils peuvent plus me faire travailler. Le fait d’avoir bossé chez eux, d’avoir fait plusieurs projets, ça me permet d’aller voir ailleurs s’il y a du travail.
Vivre en Gaspésie, à Matane
Ça fait un peu stresser au début, tu te dis : « Où est-ce que je vais, qu’est-ce que je vais faire là-bas ? » mais en fait, j’étais plus à ça près. J’ai déjà fait 6 500 km, je suis plus à 500 km près. On verra bien ce que ça donne. Le travail que je fais est vraiment super cool. C’est beaucoup de responsabilités, c’est un super projet, je pouvais pas refuser. En plus de ça, les collègues sont vraiment cool ! Je vis actuellement chez un collègue de travail qui lui, a été muté à Montréal. Il m’a dit : « Je te laisse mon logement », il est complètement meublé, je paie pas très cher, il y a tout : l’électricité comprise, Internet. Je suis à 100 m de là où je travaille. Il est venu me chercher à la gare d’autobus, il m’a accompagné et il m’a dit : « T’es chez toi ». Ça m’enlevait une épine du pied. Un collègue avec qui je travaille est vraiment adorable, il m’a emmené à plein d’endroits et fait découvrir la Gaspésie. Dès le début, il m’a dit : « Tu viens manger avec moi ». Je me suis vraiment bien intégré, même plus facilement qu’à Montréal. Matane, c’est 15 000 habitants. Du fait que ce soit plus petit, les gens sont plus soudés les uns les autres.
Montréal, c’est une grande ville, chacun fait sa vie, ils n’ont pas le temps de s’arrêter au moindre petit problème de chacun. Mais c’est vrai qu’on ressent cette sensation d’isolement par moment.
Si on veut aller ailleurs que dans les bars habituels de Matane, on est obligé d’aller à Rimouski et c’est à une heure de route. C‘est la grande ville du coin, y a 65 000 habitants.
Y a peu de boutiques différentes donc si on a besoin de choses et d’autres, il y a moins de choses à portée de main. L’avantage, c’est les randonnées, la nature, y a tous les décors possibles et imaginables. Et maintenant avec Internet, on peut tout commander.
Les gens croient que dès qu’on s’éloigne de Montréal ou de Québec, on retombe dans les années 60, où c’est vraiment à l’ancienne, où on trouve rien et c’est la galère. C’est vraiment plus le cas maintenant. Montréal me manque pas plus que ça parce que la qualité de vie ici est beaucoup plus agréable qu’à Montréal. Je gagne pas trop mal ma vie, tout est moins cher, je suis au calme de la campagne. J’ai toujours eu l’habitude d’habiter dans des petites villes alors ça me change pas tant que ça.
C’est vrai qu’à Matane, on n’a pas les belles falaises de Gaspésie, mais quand tu passes après Sainte-Anne-des-Monts, le coin est agréable. Y a aussi le Parc du Bic à Rimouski et le Parc de la Gaspésie un peu plus loin. Y a vraiment des super beaux paysages, c’est super agréable ! J’en ai profité pour aller à Gaspé et à Percé deux fois. L’avantage d’être à l’étranger, c’est que tu deviens aussi une résidence de vacances pour la famille ! Je fais le guide touristique à mes parents quand ils viennent. Si on veut s’occuper dans le coin, on ne s’ennuie pas !
*Certificat de Sélection du Québec.
**Programme de l’Expérience Québécoise, un programme de résidence permanente provincial.
***Étude d’Impact sur le Marché du Travail, une étape indispensable dans bon nombre de professions au Québec afin d’obtenir un permis de travail autre que le PVT. Le gouvernement québécois détermine si le candidat ne prend pas la place d’un travailleur local.
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