Pourquoi, quand on part vivre à l’étranger, tout nous semble plus intense, plus stimulant ?
Que ce soit en Erasmus, en PVT, ou via d’autres programmes de mobilité internationale, la sensation est souvent la même pour tout le monde : on vit des années incroyables et bien souvent, au retour, c’est la douche froide, ce retour à sa vie d’avant.
L’éphémère qui motive
Dans la vie quotidienne, on a tendance à ne pas être pressés de faire les choses, on attend, on reporte… Quand une personne, un lieu, un emploi, un contexte est par définition éphémère (au fond, on n’oublie jamais que notre expérience à l’étranger a une date de fin), on se dit qu’il faut en profiter.
C’est souvent pour cette raison qu’en vivant à l’étranger, on sort beaucoup, on part beaucoup en week-end, on veut voir et faire des tas de choses. On a conscience qu’on est en train de vivre une de ces années qui marquent, qu’on oubliera sans doute jamais alors consciemment ou non, on vit tout à fond. Il y a comme une urgence.
Quand dans notre propre pays, on ne connaît parfois même pas la région d’à côté, à l’étranger, on ne veut manquer aucun lieu incontournable. On se dit sans doute aussi qu’une fois rentrés chez nous, on ne reviendra peut-être plus jamais ici.
Même chose pour les rencontres : tout va plus vite. Quand on a un coup de cœur, on ne tourne pas autour du pot. On sait que dans 1, 2, 3 mois (voire moins pour les plus nomades), on ne se verra peut-être plus alors si on s’entend bien, on ne perd pas de temps.
Le mimétisme qui inspire, le goût de l’imprévu qui s’affirme…
Pour certains d’entre nous, aller vers les autres, partir en road trip sans savoir où on va, tenter plein de choses nouvelles, c’est instinctif, c’est comme un appel. Pour d’autres, ça l’est moins. Et quand on part à l’étranger dans des contextes qui nous poussent à rencontrer d’autres jeunes qui vivent la même chose que nous, on est happés par la vague et on se laisse porter.
Voir les autres vivre des choses folles nous donne envie de faire pareil et nous fait réaliser que c’est possible, que c’est accessible.
Combien de pvtistes se sont dit « OK j’arrive dans telle ville, j’y reste 9 mois et je voyagerai un peu à la fin » et ont en fait vécu un PVT totalement différent : 2 mois ici, road trip d’un mois avec ces voyageurs rencontrés en auberge, vacances en Thaïlande avec d’autres copains rencontrés au travail, etc.
Le PVT est en ça l’un des plus beaux programmes qui existent : il ne vous lie à aucune ville, à aucun employeur ou à aucune université comme d’autres programmes de mobilité. Vous faites ce que vous voulez.
Si ce côté imprévu peut faire peur avant le départ – pouvoir tout faire, c’est parfois ne pas trop savoir ce qu’on va faire justement 😀 – une fois sur place, dans le grand bain, on réfléchit moins, on fait au feeling, au gré de nos envies, des opportunités et des rencontres.
En laissant la place à tout ce qui peut nous arriver, sans tout intellectualiser, on est, en quelque sorte, la meilleure version de nous-mêmes. Pour beaucoup, être loin, c’est ne pas avoir les mêmes enjeux qu’à la maison : trouver un CDI, gagner de l’argent, acheter un logement, cocher toutes les cases de la « vie normale », ça peut mettre une grosse pression. Loin, on s’en fiche de tout ça, on n’est pas là pour ça. On est là pour ouvrir ses yeux, ses oreilles, se débrouiller, tester des choses, aimer ça, ne pas aimer ça, gagner en expérience. C’est génial.
Et puis, loin de chez nous, on se dit souvent que personne n’est là pour nous juger, personne ne nous connaît… On se sent plus libres d’être nous-mêmes, sans les filtres et les masques habituels qu’on affiche parfois sans forcément s’en apercevoir.
Je considère ce type d’expériences comme une chance. Comme une leçon, même. Pas évident d’appliquer cette façon de penser et de faire pour tout le reste de sa vie, mais je dirais que ça laisse toujours des traces (positives) pour ses futurs projets, choix, rencontres…
… ou pas !
J’énonce tout ça comme une vérité absolue mais il arrive que certains n’arrivent pas à se détendre complètement, à profiter de chaque journée, à savourer. Parce qu’ils n’ont finalement pas de coup de cœur pour leur pays de destination, parce que leurs proches leur manquent, parce que l’absence de repères les déstabilisent, parce que l’expérience n’est pas à la hauteur de leurs attentes. Ça arrive et ce n’est pas grave. C’est décevant, mais ce n’est pas grave. On apprend toujours quelque chose (sur soi notamment) dans ces situations-là.
Je fais une petite parenthèse au sujet du PVT Canada, qui au fil du temps est devenu un peu particulier. Chaque année, certains pvtistes partent au Canada pour explorer le pays comme d’autres l’ont fait avant eux et ont adoré ça. Mais beaucoup n’osent pas voyager pendant leur PVT, car la « mode » en PVT Canada, c’est devenu de se poser quelque part et de demander la résidence permanente. Alors si vous faites partie de ceux qui ont envie de voyage, de road trip, d’inattendu, de rencontres, de paysages incroyables, ne vous mettez pas de pression et vivez votre projet comme vous avez envie de le faire 🙂
Un retour souvent difficile
Pour les voyageurs qui ont vécu leur meilleure vie pendant leur PVT, leur Erasmus… le retour peut être difficile.
Quand on revient à sa vie d’avant, on peut se prendre une énorme claque. D’autant plus quand on ne s’y attend pas (on a toujours plus peur au départ qu’au retour donc on ne prépare généralement pas la fin de son expérience).
Ça y est, tout est terminé. Plus de rencontres différentes toutes les semaines, plus de voyages à gauche à droite, plus d’apprentissages au quotidien (de nouveaux mots dans une autre langue, d’aspects d’une autre culture…), plus de sensation de colonie de vacances. C’est fini.
« Très sincèrement, j’ai toujours cru que le plus difficile était de partir, mais je crois que dans ma situation, le plus dur est de revenir. » – Morgane
Dur aussi, avec les réseaux sociaux, de voir les autres continuer sans nous cette vie qui nous manque déjà, à l’autre bout du monde.
Alors certains repartent à l’étranger, avec un nouveau projet.
Mais alors, est-ce qu’on est condamnés à ne pas pouvoir vivre cette vie si épanouissante dans son propre pays ? Est-ce que même si on se mettait à voyager chez nous comme le font les pvtistes qui choisissent notre pays comme destination (et qui adorent l’expérience), on ne retrouverait pas ces sensations uniques ?
Est-ce qu’au final, pour ressentir tout ça, on a besoin de ne pas être à la maison ? Je n’ai pas de réponse claire à cette question mais mon ressenti, c’est qu’effectivement, en plus du voyage et des rencontres, ce qui fait qu’on vit nos expériences à l’étranger de façon si intense, c’est parce qu’on est loin, parce qu’on n’a plus ses proches, plus ses repères.
C’est comme si ça nous donnait l’impulsion d’être purement et simplement ce qu’on a envie d’être, à ce moment précis de nos vies, sans aucune pression.
« J’avais symboliquement besoin de partir très loin, j’avais besoin de vivre une année pour moi et j’ai été comblée. Ce PVT a été un enchaînement de bonheurs, avec en toile de fond une sensation de liberté et de légèreté. » – Julie (oui je m’auto-cite :-D)
On est dans l’éphémère et le fait d’être physiquement dans un autre pays accentue le phénomène : on est entrés dans une bulle, qui va faire « pop » un jour, on le sait, alors en attendant, on savoure TOUT.
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Je vous invite à prendre quelques minutes pour lire le récit de Pamela qui évoque les difficultés au retour après 3 ans à l’étranger
Sans oublier notre dossier sur le choc culturel quand on part vivre à l’étranger. Dans les chapitres de 8 à 11, on aborde le retour dans son pays d’origine et ce qu’on appelle le choc culturel inversé, une réalité pour beaucoup de voyageurs !
On vous propose aussi régulièrement des temps d’échange en visio, en petits groupes, dédiés au retour après un PVT (à faire un petit peu avant de rentrer ou une fois rentré, quand vous en ressentez le besoin).
(3) Commentaires
Je trouve cela très juste l’idée de la bulle qui va faire POP, et le désir intense de savourer chaque instant.. Je crois aussi qu’avec le temps et l’expérience de voyage (plusieurs pvt, voyage à long terme, tour du Monde peu importe) on apprend à mieux se connaitre en tant que voyageur et en tant que « sédentaire » et on apprivoise davantage toutes les émotions, les mécanismes et les enjeux. Et petit à petit, en restant à l’écoute de soi et ouvert aux autres, il est possible de trouver un équilibre entre ces deux Mondes.
Merci Julie pour cet article!
Quel beau message, je retiens vraiment cette phrase « en restant à l’écoute de soi et ouvert aux autres, il est possible de trouver un équilibre entre ces deux mondes »… C’est très juste !
Merci Morgane. Il m’a fallu presque 10 ans pour en arriver à cela. Pendant des années j’ai considéré le voyage comme une addiction, comme l’unique indispensable à ma vie pour me sentir bien, me sentir vivante, pour vibrer, pour apprendre et découvrir..je me sentais happée par l’euphorie et les émotions qu’il procure, presque « victime ou prise à mon propre jeu ». Et pensais que la vie sédentaire n’avait rien à m’apporter, étais fade, ennuyeuse.. Et avec le temps, les différentes destinations, types de voyage, rencontres..j’ai compris.. et c’est génial de prendre conscience que le voyage et la vie sédentaire sont complémentaires, et que l’on peut tout à fait avoir l’un et l’autre, en équilibre.. 🙂
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