Bonjour Caroline, peux-tu nous parler un peu de toi ?
J’ai grandi dans une ville près de Montpellier où j’ai commencé des études dans le domaine du cinéma. J’ai poursuivi ces études dans l’audiovisuel, à Cannes. Lors d’un stage j’ai rencontré mon futur employeur avec qui j’ai passé 14 ans à travailler sur le Festival de Cannes, entre autres.
J’avais une belle carrière professionnelle mais je commençais à en avoir fait le tour. J’avais envie d’autre chose sans avoir de réels projets de reconversion.
Je suis partie quelques jours en septembre 2015 chez une amie à Montréal pour m’évader de la routine parisienne. C’était mon deuxième voyage au Canada, au Québec.
J’ai alors réalisé que j’avais réellement envie de vivre une expérience seule, à l’étranger et pour quelques mois, afin de sortir de mon quotidien mais aussi pour parfaire mon anglais.
Pour moi, c’était une évidence de faire une demande de PVT pour le Canada. D’une part, je sentais déjà une vraie affinité avec ce pays, mais aussi parce j’avais 32 ans quand je me suis inscrite dans le bassin des pvtistes, et le Canada était le seul pays où je pouvais encore postuler.
Me voilà donc à m’inscrire en ligne dès l’ouverture, en décembre 2015, à EIC. Et à attendre impatiemment d’être tirée au sort… Je me suis résignée lors du dernier tour, fin mai 2016.
Et puis petit miracle, en juillet, je reçois un mail car « ma demande vient de faire l’objet d’une mise à jour » et je suis tirée au sort ! Ils avaient ajouté 1 500 places supplémentaires.
J’ai pris quelques mois pour m’organiser, après avoir choisi Vancouver, en me disant que je pourrais éventuellement continuer à travailler dans mon secteur, cette ville étant réputée pour ses nombreux tournages.
Et te voilà en route pour le Canada !
Je suis finalement partie fin novembre 2016. J’ai atterri à Toronto, où j’avais décidé de prendre le train pendant 4 jours pour rallier la côte ouest.
Un voyage mémorable ! J’ai adoré les paysages, l’ambiance avec les passagers et le personnel de bord. J’ai d’ailleurs gardé contact avec quelques-unes des personnes rencontrées dans le train.
Vancouver, cela a été très facile pour moi de m’y adapter. C’est une ville tournée vers la nature, loin d’être aussi stressante que Paris. Mais je suis arrivée dans cette période creuse où il n’y avait pas de tournage, et surtout, je me demandais, pourquoi vouloir partir aussi loin et essayer de recréer la même vie que j’ai quittée ? J’étais en plein doute !
Donc, pour y voir plus clair, j’ai fait ce que je sais faire de mieux : booker un billet d’avion et voir ailleurs ce qui s’y passe ! C’est comme cela que je me suis mis en tête d’aller à Whitehorse, dans le Yukon, en plein mois de janvier, pour observer les aurores boréales.
Je devais y rester 4 jours, j’ai finalement décalé mon retour pour pouvoir pleinement en profiter !
Tu es restée combien de temps et tu as fait quoi du coup ?
Je suis restée un peu plus d’une semaine. C’était en plein mois de janvier, il faisait froid… J’ai loué une voiture, et nous sommes parties avec des amies rencontrées au Beez Kneez, l’auberge de jeunesse, à Kluane National Park et Carcross. Nous avons fait du chien de traîneaux, passé de belles soirées à observer les aurores boréales en dehors de la ville.
On a aussi profité des Hot Springs, des bons cafés en ville où se réfugier quand il fait -35°, des scènes musicales ouvertes le soir pour rencontrer du monde.
Des vacances parfaites !
Quel a été ton ressenti en découvrant le Yukon ?
J’ai eu une réelle connexion, ne serait-ce qu’en descendant de l’avion.
Ces -35 degrés, c’était pour moi du jamais vu ! Et bizarrement j’ai adoré cette sensation. Comme celle de conduire sous la neige pour aller à Kluane, ou celle de dormir dans une cabine sans eau courante ni électricité à Atlin, petite ville située en Colombie Britanique à la frontière du Yukon, que j’ai visitée lors de mon deuxième voyage en mars.
Mais aussi, et surtout, j’ai rencontré en peu de temps des personnes accueillantes, j’étais bien loin de la froideur des grandes villes !
Instinctivement, je me suis dit : c’est ici que je veux continuer l’aventure.
Mi-mars, j’ai dû rentrer à Paris pendant quelques mois pour raisons professionnelles.
Mais tu as gardé en tête le Yukon et tu as décidé d’y revenir ?
Tout à fait ! À Whitehorse, j’avais rencontré une personne qui vivait à Dawson City et qui m’avait conseillé de venir y séjourner en été, car on y trouve facilement du travail à cette période.
De là, j’ai envoyé des CV à quelques hôtels et j’ai été embauchée, après un entretien sur Skype, par le Klondike Kate’s Cabins & Restaurant, tenu par des francophones originaires du Québec et d’Ontario.
Et donc, après plusieurs semaines à travailler sur le festival de Cannes, me voici rendue à Dawson, à travailler en tant que réceptionniste, barman, femme de chambre, hostess, préparatrice culinaire et même cook au restaurant pour une journée !
Le début de mon aventure yukonnaise !
Justement, côté travail, ça se passe comment pour toi ?
Je travaillais principalement à la réception des cabines, au front desk.
J’accueillais les clients qui venaient s’enregistrer, je prenais les réservations par téléphone.
J’ai aussi travaillé en tant que femme de chambre et hostess au restaurant. J’accueillais les clients à l’entrée, je les plaçais en salle, ou sur liste d’attente. Le Klondike Kate’s est réputé en ville, et même dans tout le Yukon, pour son restaurant !
En tout, je pense que nous étions à peu près 25 employés, entre les serveuses, la cuisine, les femmes de chambres…
Le salaire moyen ici, pour travailler en tant que réceptionniste ou femme de chambre, est de 15 dollars par heure.
Il faut juste trouver un logement, ce qui est le plus difficile à Dawson !
J’ai eu la chance de vivre dans la Staff House située sur la propriété.
Certains employés vivaient sur West Dawson, de l’autre côté de la rivière, dans des Wall Tents. C’est super calme et c’est une belle expérience, mais il faut savoir s’organiser, car il n’y a pas d’électricité ni d’eau courante de l’autre côté de la rive !
Peux-tu nous parler de la vie à Dawson city ?
Je pense que nous sommes à peu près 5 000 habitants en été, 1 500 l’hiver.
Donc forcément, après septembre, la vie ralentit ici. Certains restaurants ferment, certains bars aussi, le casino…
Mais il y a toujours des endroits pour se retrouver, manger un bout et partager un verre, je vous rassure !
J’ai été étonnée par le nombre de francophones qui vivent ici. Même 1 an après, j’en rencontre encore !
Beaucoup viennent du Québec, mais il y a quelques Français et Belges aussi.
Il y a également quelques expatriés, mais vous rencontrerez surtout beaucoup de locaux ou de personnes qui viennent d’autres provinces du Canada.
C’est au début de l’automne, en septembre, quand les touristes et saisonniers sont partis, que j’ai commencé à réellement rencontrer les Dawsonites et mon groupe d’amis.
Ça s’est fait tout naturellement, je les ai rencontrés dans ma nouvelle colocation, dans mon nouveau travail…
Je me sens intégrée maintenant. Bien que l’intégration, ici, ça dépend surtout de soi.
Si tu veux vivre sans voir personne ici, tu peux. Si tu veux aller tous les soirs boire des coups au Pit, tu peux… Mais pour faire simple, forcément, au bout de quelques mois, on se sent intégré(e).
C’est une petite communauté, et on se rencontre par hasard, à la supérette, au restaurant, au coin de la rue…
Et en ce qui concerne les aspects un peu plus pratiques ?
Le Yukon, c’est une belle terre d’accueil.
Pour le côté pratique, j’ai pu m’inscrire à la Yukon Health Insurance, même en étant PVTiste ! Il faut juste avoir plus d’un an de permis de travail encore valide et être établi ici.
Le salaire est un peu plus élevé que dans les autres provinces. L’assurance voiture y est aussi beaucoup moins chère qu’en Colombie-Britannique par exemple… Et j’ai pu, à Dawson, m’inscrire à des cours d’anglais gratuits ! Bien des avantages dont je n’aurais pas pu bénéficier en restant à Vancouver.
Le logement est par contre assez cher si on ne vit pas en colocation, et assez difficile à trouver.
Et forcément, le coût d’acheminement des produits alimentaires impacte leur prix, attendez-vous à payer un peu plus cher qu’ailleurs !
Parlons de ce qui fait peur ou qui donne très envie à certains : l’hiver
Beaucoup de personnes m’ont dit : passe déjà ton premier hiver, puis tu verras si tu peux rester ici de façon permanente… Je l’ai fait, et je vous rassure, tout s’est bien passé ! 🙂
Certes, il fait froid, mais c’est un froid sec, donc bien couvert, c’est vraiment pas si difficile que ça les -30 degrés !
Le plus dur je dirais, c’est le manque de luminosité. Il y a eu cette période, en janvier, où le soleil se levait à 10 h 30, et se couchait vers 15 h 30, mais il était si bas qu’il ne passait pas au dessus des montagnes qui entourent Dawson, donc niveau luminosité, c’est sûr qu’il y a mieux.
En hiver, le corps s’adapte, c’est dingue comme on peut dormir ici ! On hiberne un peu comme les ours. Mais heureusement, rien ne nous oblige à rester chez soi pour dormir et regarder la TV.
Il y a toujours plein d’activités prévues en ville, culturelles, sportives… Si vous voulez vraiment sortir et participer à tout cela, vous n’allez pas vous ennuyer !
C’est assez exceptionnel d’ailleurs tout ce qui se passe pour une ville de cette taille. Une Canadienne installée ici depuis 10 ans m’a confirmée qu’il y a très peu d’endroits comme Dawson au Canada.
Ceci dit, dès le mois de mars, les jours rallongent à une vitesse folle, jusqu’au mois de juin où il fait jour 24/24.
Et les étés sont vraiment beaux ici. Les températures peuvent monter jusqu’à 30 degrés. Donc ça compense !
A ton avis, un PVT à Dawson city, c’est fait pour qui ?
J’aurais du mal à dresser un portrait du PVTiste qui aimera Dawson.
C’est une ville particulière, et tout dépend de ce qu’on attend de la vie là-bas. Si tu veux vivre dans une cabine sans eau ni électricité à West Dawson, tu peux ! Si tu veux passer ton temps à simplement travailler et regarder la télé ou surfer sur internet, tu peux aussi.
On vit de façon isolée, à 600 kilomètres de la première grande ville, Whitehorse, mais on peut avoir tout le confort nécessaire…
Le mieux, c’est de venir se faire son propre avis, mais il est évident que cette ville ne laissera personne indifférent 😉
Une chose est sûre : si tu es un citadin pur et dur, cette ville ne sera pas pour toi !
Comment envisages-tu les prochains mois et l’après PVT ?
Quand la saison s’est finie au Klondike Kate’s fin septembre, Josée, ma patronne, avait parlé de moi à une de ses amies qui dirige un autre hôtel en ville, ouvert à l’année, et elle m’a embauchée ! Je ne savais pas encore si je voulais rester à Dawson à long terme, mais j’avais cette opportunité, et je voulais passer quelques mois de plus ici …
Au final, après l’hiver, j’étais sûre à 100 % de vouloir rester, et j’ai eu la chance d’être sponsorisée par mon employeur avec le Yukon Nominee Program. Une belle opportunité, car je compte m’installer au Canada à long terme !
Peux-tu nous expliquer un peu ce qu’est le Yukon Nominee Program (YNP) ?
Certaines provinces ou territoires ont besoin d’embaucher du personnel dans des catégories de travail « non qualifié », tel que réceptionniste, femme de chambre, cuisinier… Pour combler ce manque de personnel, le Yukon permet aux employeurs de sponsoriser des non-Canadiens, qui pourront par la suite faire une demande de résidence permanente.
Il faut avoir 6 mois d’expérience minimum dans son domaine avant de pouvoir appliquer pour le YNP.
Il faut aussi trouver un employeur qui serait prêt à vous sponsoriser. Le mien a voulu que je travaille quelques mois pour lui avant de se lancer dans la procédure. Ce qui me paraît juste, pour moi comme pour lui.
Le YNP, c’est un permis de travail fermé, et on a plutôt intérêt à savoir si le job nous plaît, avant de s’engager pour 2 ans !
Vous pouvez trouver plein de renseignements sur le Yukon Nominee Program, en anglais et en français, sur le site du gouvernement du Yukon.
(NDLR : et dans notre dossier.)
Aujourd’hui, mon dossier est en cours d’étude auprès du Gouvernement du Yukon. Cette procédure prend 2 à 3 mois.
Une fois acceptée comme « Nominée », je vais pouvoir envoyer une demande de résidence permanente, ce qui prendra environ 18 mois.
La suite, on verra…. Des petits projets, comme m’acheter un voiture, et visiter certains endroits du Yukon que je n’ai pas encore eu l’occasion de voir, comme Keno, les Hot Spring de Liard…
J’évite de faire des projets à long terme, car pour l’instant je suis ici et j’en profite !
Et c’était loin d’être mon projet quand je suis arrivée à Vancouver !
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