Localisation
Profession
Dessinateur
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Ville de provenance
Chicoutimi, dans la région du Saguenay – Lac-Saint-Jean. C’est environ à 250km au nord de la ville de Québec, de l’autre côté du massif appelé « Parc des Laurentides ».

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Ville de destination
Besançon, dans le Doubs (25), région Franche-Comté. C’est tout à l’est de l’hexagone, pas très loin de la frontière suisse.
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Sur place depuis combien de temps ?
Arrivé depuis août 2008, nous y sommes toujours. Nous, c’est ma copine et moi.

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Baroudeur ou pas ?
Issu d’une famille plutôt casanière, j’avais très peu voyagé jusqu’à il y a 5-6 ans. Puis, j’ai connu quelqu’un qui m’a fait découvrir une communauté (sur le net) de baroudeurs. C’est en furetant sur le forum de cette communauté que l’envie de bouger s’est inventée en moi. Été 2006, je préparais donc un vélo-trip à travers l’Amérique, direction plein sud. J’avais le vélo, une bonne partie de l’équipement, quelqu’un pour sous-louer mon appart… C’est à ce moment que j’ai rencontré Marie, justement par le forum cité plus haut. La belle Française venait faire son tour au Québec et voulait rencontrer des baroudeurs. Nous lançons donc l’idée d’une rencontre entre voyageurs et je propose d’organiser la chose à Chicoutimi. Plusieurs membres du forum se montrent intéressés et Marie est particulièrement heureuse de se rendre dans cette localité au nom si exotique et rempli de promesses. Finalement, personne d’autre ne s’est pointé au rendez-vous… que Marie et moi. Sans oublier la flèche de Cupidon (c’est donc cute) qui s’est rapidement chargé de réorienter nos chemins respectifs. Le vélo-trip jusqu’à la pointe sud de l’Amérique s’est donc transformé en voyage de découverte dans la pointe nord de l’hexagone. Marie habitant à ce moment à Lille, j’ai donc passé trois mois de l’automne 2006 chez les ch’tis. Mon premier voyage dans une ville superbe où il ne pleut pas plus qu’ailleurs et le début d’une belle histoire qui se poursuit aujourd’hui.

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Que faisais-tu, au Québec ?
Formé dans un Cégep en ébénisterie (entre autres), je tâchais d’exercer mon art avec plus ou moins de bons résultats (au sens comptable du terme) dans un petit atelier personnel, en travailleur autonome, un statut qui ressemble à son copain français appelé auto-entrepreneur. Il est vrai que j’avais malgré tout une vie relaxe et confortable. Je louais un appart à mes parents dans l’immeuble familial et occupais quelques mètres carrés d’atelier à côté de celui de mon papa qui est rembourreur de meubles, c’est-à-dire tapissier. Mais aussi relaxe et confortable que pouvais être ma vie à ce moment-là, elle n’en demeurait pas moins convenue et en phase (trop sans doute) avec le modèle hérité de mes parents et plus généralement, de la société où j’évoluais. Il fallait secouer tout ça. Dans nos WC, Marie a affiché une citation du Talmud qui dit que « comme le saumon, l’Homme n’est jamais autant lui-même que lorsqu’il remonte le courant ». Notez que pour ma douce et tendre, les lieux d’aisance sont un temple de méditation et de réflexion.

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Pourquoi cette envie de t’envoler pour la France ?
Donc on y vient. Mars 2007, Marie, qui vient d’obtenir sa résidence permanente au Canada après de fastidieuses démarches amorcées bien avant notre rencontre, s’installe dans mon modeste logis de Chicoutimi. Plus d’un an passe quand l’envie nous prend de faire un grand changement dans notre vie. On décide donc de faire les saumons (enfin, surtout moi) et de remonter le courant du grand océan pour recommencer quelque chose en France. Sans que cela ne soit dit clairement, l’idée est d’une certaine façon de tout remettre à plat pour reconstruire une vie au plus près de ce que nous sommes vraiment. Je m’explique. Au moment de notre rencontre, Marie et moi sommes déjà assez écolos. Même que, lorsque Marie emménage chez moi en mars 2007, elle arrive pile à temps pour m’aider à poser les affiches électorales des Verts, vu que moi je suis candidat aux législatives provinciales (quelle drôle d’aventure, d’ailleurs). Petit à petit, nos convictions s’affinent si bien que nous devenons anti-consuméristes, puis décroissants. Pas évident alors d’accorder notre vie avec notre ressenti, sachant que notre existence est tout à fait imbriquée dans celle de nos proches, dont ma famille, plutôt digne représentant de son époque, qui consomme beaucoup et gaspille en conséquence. Quiconque s’est un jour retrouvé dans cette situation sait combien il est difficile de faire demi-tour sur un chemin quand tout le monde autour continue dans la même direction. L’idée de migrer se présente donc pour nous comme l’occasion de faire un immense tri (au propre comme au figuré) pour ne conserver que l’essentiel et construire à partir de cela. C’est ce qu’on a fait.

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Pourquoi Besançon ?
Nous avons choisi Besançon comme on choisit une paire de chaussures. Marie n’est pas originaire de Franche-Comté et n’y avait jamais habité, hormis quelques séjours à récolter le raisin dans les vignes du Jura. En fait, nous n’avions au départ aucun endroit « tout désigné » pour nous installer. Nous cherchions une ville pas trop grande (les grandes agglomérations nous insupportent), mais suffisamment importante pour espérer nous passer de voiture et accéder à une vie sociale satisfaisante. Nous avons donc repéré quelques villes correspondants à ces critères (il y avait Rennes, si je me souviens bien, puis deux ou trois villes du sud. Et même Lille qui, bien que grande, nous plaisait bien). Au final, Besançon sortait du lot. Une ville verte, avec la nature à deux pas, un beau relief et des montagnes à proximité… Du coup, Marie est partie en éclaireur pendant une semaine. Elle a visité Besançon et sa région en mode couchsurfing, c’est-à-dire en dormant chez l’habitant, ce qui demeure quand même la meilleure façon de connaître un endroit. Elle a rapporté plein de photos et documentation, puis on a décidé que Besançon serait notre point de chute. Août 2008, nous débarquions à Besac.

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Est-ce que c’est la première fois que tu vivais à l’étranger ou que tu partais aussi longtemps ?
Comme je l’indiquais plus haut, je n’avais jamais vraiment bougé auparavant. La migration a été pour moi une expérience totale.

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Quel a été ton sentiment dominant au cours des 2 premières semaines en France ?
Nous sommes arrivés en août, tout était fermé et tournait au ralenti. Ça m’a tout de suite plu. Nous avions réussi à louer un appart à distance depuis le Québec, dans une petite commune (Beure) du grand Besançon. Cet appart n’étant pas libre immédiatement à notre arrivée, le proprio nous avait prêté un petit studio au centre de Besançon. Nous n’avions vu notre appartement qu’en photos, alors sitôt que nous avons pu, nous sommes partis direction Beure pour le « trouver » et constater l’environnement. Je me souviens qu’il faisait beau et que nous avons marché tranquillement le long du Doubs pour parcourir les 5 km qui séparent Besançon de Beure. Cette route que je connais maintenant sur le bout des doigts, nous la découvrions alors. Vous savez, dans « l’Auberge Espagnole », Romain Duris raconte son arrivée à Barcelone, avec ses rues aux noms étranges et il sait qu’au bout d’un temps, il les aura parcouru dix, vingt, cent fois, qu’il se les sera appropriées. Et bien c’est exactement ça. Toujours que lorsque nous sommes arrivés à Beure, en franchissant la limite entre les deux communes, le temps a tourné à l’orage et il est tombé une averse monumentale. C’était exactement comme dans « Bienvenu chez les Ch’tis ». On a bien ri. On était trempés, mais heureux.

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Est-ce que ta situation professionnelle te parait satisfaisante, en France ?
J’ai eu la chance de trouver un boulot peu de temps après notre arrivée. Un de nos voisins venait de monter sa boîte dans les terrasses bois et cherchait quelqu’un pour la pose. J’ai été embauché un peu à la québécoise. Pas de lettre de motivation, je ne me souviens même pas lui avoir transmis mon CV. L’entretien s’est déroulé chez moi autour d’un café ou d’une bière (je ne me rappelle plus) et la semaine suivante, je commençais à bosser. J’ai passé trois ans dans cette boîte, dont la dernière année en bureau d’étude, ce qui m’a beaucoup plu. L’entreprise a fait faillite l’été dernier et j’ai donc été licencié. Avec un collègue, nous voulions alors monter un atelier d’ébénisterie et nous avons étudié les possibilités pour ce faire. Au final, les chances de réussite dans l’activité que nous désirions faire se révélaient beaucoup trop minces et nous avons mis ce projet de côté. Du coup, je suis toujours au chômage et je viens de commencer une formation en CAO (ce que je faisais juste avant d’être licencié). J’espère bien que cela débouchera sur quelque chose. Alors pour répondre à la question initiale, je suis très satisfait de ce qui s’est passé pour moi au niveau professionnel. Déjà, les deux ans passés sur des chantiers m’ont permis de bien connaître ma région d’accueil et même un peu plus loin. Je me souviens avoir installé des terrasses près de Lausanne et autour de Genève. En plus, le cheminement vers le bureau d’étude m’a fait mettre un pied dans une profession que j’aime beaucoup et que je n’aurais peut-être pas exercée autrement. Finalement, le travail étant un vecteur d’intégration hyper efficace, j’ai pu connaître une multitude de gens et apprécier d’autant plus mon expérience française.

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Quelles ont été tes plus grosses difficultés en France ?
J’ai tendance à occulter les parties moins agréables, alors il n’est pas évident de répondre à cette question. Évidemment, immigrer n’est pas une partie de plaisir et certains moments sont plus difficiles que les autres, ou plus angoissants. Je me souviens entre autres de la fin de mon PVT. Je me suis pris bien tard pour commencer les démarches afin d’obtenir un titre de séjour et Marie et moi avons dû manœuvrer en vitesse grand V, nous marier rapidement et faire un tas de démarches. Je me souviens de courriers recommandés en express en provenance du Québec et du livreur qu’on attendait au pied de notre immeuble. Ce sont des moments pas très agréables parce qu’on sait que si un truc merde et bien tout le reste fout le camp… et c’est retour au pays et à la case départ.

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Quel est ton meilleur souvenir ?
Bizarrement, un très bon souvenir est rattaché aux grosses difficultés mentionnées juste avant. Nous avons fait un mariage tout a fait décalé par rapport à ce qu’on entend normalement par mariage. Un couple de bons amis est venu témoigner à la mairie de Beure avec leurs deux enfants en guise de public, si bien que, le Maire inclus, nous étions sept dans la grande salle de la mairie, où une bonne trentaine de chaises avaient été préparées pour l’occasion. En guise de voyage de noce, une ballade dans le village avec les amis, jusqu’à la « Cascade du Bout du Monde ». Puis retour à l’appart, une bonne bouteille et un repas tout simple. Nous avions tout de même fait des efforts vestimentaires puisque tous les conviés à la cérémonie, nous inclus, étaient habillés en rouge et noir, si bien qu’un ami à moi m’a fait la réflexion qu’il s’agissait d’un mariage anarchiste, ce qui nous a bien fait rigoler. On n’est pas trop portés sur les institutions, alors le mariage…

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Est-ce que certaines choses québécoises te manquent ?
Hormis les gens, parents et amis, qui représentent le manque le plus grand et le plus palpable, les autres manques sont plus subtils. Ce sont des sensations, des odeurs. L’atmosphère joyeuse et affairée d’un lendemain de grosse tempête de neige, le bruit assourdi des bottes dans la neige, l’odeur de la souffleuse. L’excitation des premières vraies journées de printemps, le sentiment de délivrance, les voisins pressés qui répandent la neige dans la rue pour qu’elle fonde plus vite. Une relative simplicité dans les relations de tous les jours, sans code ou convention cachés, la dame du guichet qui connaît votre tante. Une bière avec des chums au bord du lac, à la fin d’une chaude journée d’été, et les maringouins qui s’invitent à la fête sous les épinettes. Des petites choses comme ça.

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Qu’est ce qui te manquera si tu rentrais au Québec ?
C’est pareil, ça sera principalement les gens. Les relations humaines sont le sel de la vie. Je n’ai jamais eu beaucoup de monde autour de moi, seulement, les relations que je choisis d’entretenir sont importantes. Il en est de même depuis mon arrivée et je serais attristé de quitter ceux qui sont devenus mes amis ici en France.
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Qu’est ce que cette expérience t’apporte, du point de vue personnel ou professionnel ?
Côté pro, j’en ai parlé un peu plus haut. Ce n’est pas le plus important. Côté personnel, ça m’a fait du bien de changer d’univers. Quand on reste longtemps dans une même situation, on peut finir par ne plus savoir qui on est vraiment. On confond notre identité avec notre environnement, on ne voit plus le monde que d’un point de vue, on ne se remet plus en question, puisque peu de questions nous effleurent de toute façon. Immigrer est l’occasion de se secouer, de faire tomber les peaux mortes et de remettre le doigt sur ce qui est vraiment solide en nous. On garde ce qui est vraiment l’essentiel et on refait autre chose avec. Je pense qu’il faut vivre ce genre de passage au moins quelques fois dans sa vie.

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Quels conseils donnerais-tu aux futurs pvtistes ?
J’ai très peu de conseil à donner. D’une manière générale, je suis pour tout genre d’expérience comme celle de partir à l’étranger. Donc je dis go for it. Sinon, pour ceux qui auraient des interrogations plus précises, il ne faut pas hésiter à me contacter en privé ou sur le forum public. J’aurais aimé que le volet pvtistes France soit aussi développé en 2008 qu’aujourd’hui. C’est tellement bien de pouvoir échanger ses expériences. D’ailleurs, un grand merci au administrateurs et rédacteurs de ce site, vous faites un très beau travail ! À bientôt.

isa

Amoureuse des Etats-Unis, de l'Utah et du voyage en train, j'ai passé 7 mois à Montréal en 2010, et j'en ai profité pour découvrir la Nouvelle-Angleterre en long, en large et en travers !
Mon coup de cœur avec Montréal date de 2008, et d'un mois estival là-bas... Depuis, je ne fais qu'y retourner !

J'ai réalisé deux tours des Etats-Unis (& Canada) en 2012 puis en 2014. Plusieurs mois sur les routes, c'est formateur... De retour à Montréal en 2019-2020 pour un PVT, avant de raccrocher !
Sur PVTistes.net, j'aime partager mon expérience sur le forum, dans des dossiers thématiques ou même en personne ! Vous me croiserez sûrement à Lyon, ma ville de cœur.

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(1) Commentaire

KEVIN I |

Merci pour ce partage d’expérience Daniel 😉 Bienvenue à Besançon ! (comment ça j’ai un train de retard ? ^^), tu n’aurais pas pu faire un meilleur choix 😉

Moi je vais faire le trajet inverse en Septembre 😉