Vous connaissez sans doute le hanami, cette célébration du printemps durant laquelle les Japonais pique-niquent dans les parcs en admirant les cerisiers en fleurs. Mais connaissez-vous son petit frère, le tsukimi ? Un peu moins populaire, il est pourtant le pendant automnal du hanami.
N’ayant pas de date fixe (il suit l’ancien calendrier agricole), tsukimi tombe généralement entre mi-septembre et début octobre.
Les origines du tsukimi
Une vision japonaise de la pleine lune
Alors qu’en Occident, la pleine lune est souvent perçue de manière négative dans l’imaginaire collectif (loups-garous, folie, insomnie…), il en va tout autrement au Japon. Là-bas, elle est associée aux récoltes et au travail.
Grâce à sa lumière, les paysans peuvent travailler plus tard dans les champs. On dit aussi que de nombreux bébés naissent les nuits de pleine lune, car elle donnerait de la force aux femmes enceintes pour accoucher.
Même la princesse Kaguya descend de la lune. (Bon, Sailor Moon aussi !)
Les Japonais apprécient donc beaucoup les soirs de pleine lune… et la lune en général.
Il existe d’ailleurs 14 mots en japonais pour décrire ses différentes phases. Certains désignent même les nuits où elle n’est pas visible pendant le tsukimi, comme mugetsu (pas de lune) ou ugetsu (lune derrière la pluie).
Une tradition venue de Chine, adoptée à l’époque Heian
La tradition du tsukimi (ou otsukimi, qui signifie « contemplation de la lune », tout comme hanami signifie « contemplation des fleurs ») vient de Chine. Elle est devenue très populaire au Japon pendant la période Heian.
À cette époque, les aristocrates récitaient des poèmes et jouaient de la musique. Ils buvaient du saké au clair de lune, dans les jardins ou sur des barques, sur les étangs impériaux de Kyoto.
L’automne, saison idéale pour la contemplation
dégagé. C’est le moment idéal pour observer la lune. Juste avant les récoltes, il est de bon augure de la contempler et de la remercier pour les bienfaits qu’elle apporte.
Un lapin blanc, symbole du tsukimi
Quand les Japonais pensent au tsukimi, ils imaginent tout de suite un lapin blanc. Cet animal est d’ailleurs le symbole de cette célébration.
On le retrouve partout : sur les décorations, les emballages de dango (boulettes à base de mochi, une pâte de riz), et même sur certains kimonos.
Mais pourquoi un lapin ?
Une légende de sacrifice et de gratitude
Cette association vient d’une légende japonaise. Un jour, un dieu descendit sur Terre sous l’apparence d’un vieil homme affamé. Dans une forêt, il demanda à plusieurs animaux de lui donner à manger. Tous lui apportèrent quelque chose… sauf le lapin, qui ne savait pas chasser. Voulant tout de même l’aider, le lapin demanda aux autres animaux de dresser un bûcher, puis offrit sa propre vie pour nourrir le vieil homme.
Le dieu, très touché par ce geste, ramena le lapin à la vie. Pour le récompenser, il l’envoya habiter sur la lune. Depuis, on dit qu’on peut voir la silhouette d’un lapin en train de battre du mochi à la surface de la lune lorsqu’elle est pleine.
Que faire lors du tsukimi ?
Rituels et décorations à la maison
Traditionnellement, tsukimi se célèbre en famille ou entre amis. Quelques événements sont également organisés dans des temples ou des jardins publics, exceptionnellement ouverts en soirée.
La coutume veut qu’on décore l’endroit de la maison d’où l’on peut observer la lune, comme une véranda, avec des branches de susuki (herbe de la pampa), une plante qui symbolise l’automne. On y dispose aussi des tsukimi dango, généralement au nombre de quinze, présentés en pyramide. Ces boulettes de riz sont offertes à la lune avant d’être dégustées.
Dango, soba et burgers au clair de lune
D’autres mets de saison accompagnent parfois ces offrandes ou sont simplement partagés : edamame, châtaignes, patates douces, thé ou saké. On peut aussi savourer des tsukimi soba ou udon, des nouilles en bouillon servies avec un œuf cru, dont le jaune évoque la pleine lune. Il existe même des tsukimi burgers, garnis eux aussi d’un œuf pour rappeler la lune. Plus rarement, certains Japonais dégustent des gâteaux de lune venus de Chine. La Chine et la Corée célèbrent d’ailleurs cette fête à la même période.
Contrairement au hanami, devenu avec le temps une fête bruyante et festive dans des parcs bondés, tsukimi a su préserver son esprit d’origine. Il reste un moment calme, intime, centré sur la contemplation de la nature, souvent depuis chez soi.