Tout n’est malheureusement pas toujours tout beau à Hong Kong. Certains aspects viennent quelque peu ternir la réputation du New York de l’Asie. Et on s’est dit que oui, il fallait aussi vous en parler.
La pollution
La pollution est un vrai problème de santé publique à Hong Kong. Les pics de pollution sont beaucoup plus élevés que ce que vous pouvez vivre en France. La pollution est même souvent largement visible, quand par un beau jour de ciel bleu, on aperçoit aisément une masse grise entre les immeubles ou de l’autre côté de la baie. Masse grise qui gâche évidemment la vue.
Les raisons de la pollution de Hong Kong sont multiples : la densité du trafic routier (la plus élevée au monde), du trafic maritime, les centrales à charbon de Castle Peak et de Lamma provoquent une pollution extrêmement élevée. À ceci, il faut aussi ajouter la pollution qui arrive de la Chine continentale, et notamment de la région du Guangdong au nord. Porté par les vents, cette pollution atteint Hong Kong.
Les autorités hongkongaises ont mis au point leur propre outil de mesure de la pollution avec une échelle de 1 à 10 :
- Niveau 1 à 3 : niveau de pollution bas
- Niveaux 4 à 6 : niveau de pollution modéré
- Niveau 7 : Niveau de pollution élevé
- Niveaux 8 à 10 : Niveau de pollution très élevé
- Niveau 10 + : Niveau de pollution très sérieux
Si vous êtes particulièrement sensible à l’air pollué, certaines précautions (bien qu’insuffisantes) pourraient être utiles dès que le niveau de pollution atteint le niveau 6 ou 7 : évitez les lieux où il y a énormément de buildings, ils concentrent énormément de pollution (ex : Causeway Bay ou Mongkok), évitez les activités sportives ou des efforts importants, portez éventuellement des masques (même s’ils n’ont que peu d’effets).
Mais la pollution ne se limite pas à la pollution de l’air. L’eau est elle aussi assez polluée, et notamment par le plastique. Certaines années, ce sont littéralement des marées de plastiques qui viennent se répandre sur les différentes plages de Hong Kong. Les mégots de cigarettes, sacs de plastique, emballages, couverts en plastique ou bouteilles en plastique viennent pour l’essentiel de Hong Kong (et parfois de Chine continentale aussi) et sont présents en mer en trop grandes quantités. L’utilisation de plastique à usage unique (notamment pour la nourriture à emporter) pose de vrais problèmes pour l’océan. Si vous souhaitez agir de votre côté, limitez au maximum l’achat de produits utilisant des emballages et l’achat de produits avec du plastique à usage unique (si vous déjeunez à votre travail, refusez les couverts en plastique qui sont très souvent fournis, et apportez vos propres couverts), évitez de consommer des boissons avec une paille. Par ailleurs, des collectes de produits plastiques sont régulièrement organisées sur les plages de Hong Kong. Ça pourrait être un moyen comme un autre pour vous de rencontrer du monde tout en faisant une bonne action.
La mer est également polluée par d’autres activités humaines. La circulation ininterrompue d’énormes porte-conteneurs (plus de 25 000 pour la seule année 2016 – il est même possible de voir combien il y a de bâtiments en temps réel sur ce site) pollue l’air de manière considérable mais elle a aussi un impact très important sur la faune marine, gênée à la fois par la pollution de l’air et par les vibrations du trafic maritime. Par ailleurs, de grands travaux de construction, comme les constructions du pont entre Macau et Hong Kong (terminé en octobre 2018) ou la construction d’une troisième piste d’aéroport dont la fin des travaux est prévue pour 2023 devraient encore considérablement impacter la faune marine.
Un des symboles de ce problème est le dauphin blanc de Chine (qui a la particularité d’être légèrement rose d’où son nom pink dolphin), une espèce qui vit dans les eaux de Hong Kong et dont le nombre diminue de manière très inquiétante. Alors qu’ils étaient encore 158 en 2003 (un nombre déjà limité), il était estimé qu’il restait 47 individus en 2017.
Les inégalités sociales fortes
En 2018, l’ONG Oxfam publiait un rapport sur les inégalités à Hong Kong, jugeant que le niveau d’inégalité faisait partie des plus importants dans les pays développés.
En 2016, les 10 % de la population hongkongaise qui avaient les plus hauts revenus, touchaient 44 fois plus que les 10 % de la population hongkongaise qui avaient les plus bas revenus. En 2016 toujours, sur 7,34 millions de personnes, 1,3 million de personnes vivaient sous le seuil de pauvreté.
Il y a trois grandes figures de la pauvreté à Hong Kong : les travailleurs pauvres, les seniors pauvres et les helpers.
Les travailleurs pauvres
Le taux de chômage est normalement extrêmement bas à Hong Kong. Ici, tout le monde travaille ou presque. Mais cela n’empêche pas une partie des travailleurs de vivre dans la pauvreté. Hong Kong ne s’est doté d’un salaire minimum qu’en 2010, le rendant obligatoire pour tous les employés du territoire. Fixé initialement à 28 $HK (autour de 2,8 € à l’époque), il est fixé à 37,5 $HK depuis mai 2019. Fin 2018, Oxfam et la Chinese University ont sorti une étude qui suggérait qu’un salaire minimum à 54,70 $HK correspondrait mieux au coût de la vie à Hong Kong.
Beaucoup de travailleurs pauvres de Hong Kong, quand il sont célibataires, vivent dans des logements dont vous avez sûrement entendu parler quand vous avez commencé à chercher des infos sur Hong Kong : les maisons-cages, ou maison cercueils (coffin homes, cage homes), sont des espaces de vie extrêmement réduits, et qui se limitent généralement à la taille d’un petit lit simple entouré de 4 planches en bois (d’où l’expression « cercueil »), installés les uns au dessus des autres.
Des propriétaires peu scrupuleux subdivisent leur logement pour y inclure un maximum de ces coffin homes. Difficile de croire que 200 000 personnes vivraient ainsi quand la concentration de magasins de luxe à Hong Kong fait partie des plus importantes du monde.
À ce sujet, nous vous recommandons le travail du photographe Benny Lam qui a réalisé un travail photographique sur ces types de logement entre 2012 et 2015.
Les familles pauvres, quand elles n’ont pas accès aux logements sociaux (les familles sont prioritaires par rapport aux personnes seules mais doivent attendre plusieurs années pour pouvoir y accéder) se serrent dans des minuscules studios.
Les séniors
Comme partout dans le monde, l’espérance de vie tend à augmenter à Hong Kong. Elle serait même désormais la plus élevée au monde, dépassant même le Japon, champion dans le domaine. En moyenne, en 2016, les hommes vivaient 81,3 ans, tandis que les femmes vivraient 87,3 ans.
Toutefois, les conditions de vie des personnes âgées à Hong Kong sont parfois compliquées. Dans l’étude de Oxfam publiée en 2018 sur les inégalités à Hong Kong, il était estimé qu’en 2016, une personne âgée de 65 ou plus sur trois vivait en dessous du seuil de pauvreté.
Deux exemples peuvent illustrer la situation des personnes âgées à Hong Kong.
- Tout d’abord, si vous entrez dans un McDonald’s par une belle journée d’été, vous pourrez constater qu’il y a un nombre très important de personnes âgées. C’est plutôt étonnant de les voir là quand ils ne sont pas la cible principale du géant américain de la restauration rapide. En réalité, ceux-ci viennent prendre le frais en groupe : en effet, les restaurants McDonald sont généralement hyper climatisés. Les personnes âgées n’ont pas forcément suffisamment d’économies pour payer l’air conditionné toute la journée et n’ont pas non plus suffisamment d’espace chez eux pour se retrouver avec des amis. Les personnes âgées utilisent donc les McDonald’s pour prendre le frais tout en se retrouvant pour papoter parfois plusieurs heures.
- Un autre exemple, moins léger, est celui des cardboard grannies. En venant à Hong Kong, vous ne pourrez pas manquer ces femmes (il y a aussi quelques hommes, environ 20 %) âgées qui, le dos totalement courbé, arpentent les rues de Hong Kong à la recherche de cartons ou de boîtes de polystyrène jetés, pour les vendre dans des dépôts de recyclage. Si on les appelle « grannies », c’est que 80 % d’entre elles ont plus de 60 ans. Certaines gagnent à peine suffisamment pour pouvoir se nourrir et beaucoup ne veulent pas dépendre de leurs enfants.
Les helpers
Les employées de maison (foreign domestic helpers) représentent 5 % de la population hongkongaise. Elles viennent pour l’essentiel d’Indonésie et des Philippines.
La quasi-totalité de ces employées de maison sont des femmes. Elles travaillent au sein des familles hongkongaises et des familles d’expatriés, essentiellement pour s’occuper du ménage, des repas, des enfants et des personnes âgées.
Il est estimé qu’une famille sur 7 à Hong Kong dispose d’au moins une helper à son service. Ces femmes bénéficient de visas spéciaux qui ne les autorisent pas à venir avec leur famille, qu’elles doivent laisser dans leur pays d’origine. À Hong Kong, même si les salaires des helpers sont particulièrement bas (elles ne sont pas soumises au salaire minimum commun, mais à un salaire minimum spécifique, fixé à 4 630 $HK par mois), celui-ci leur permet tout de même d’envoyer de l’argent à leur famille restée aux Philippines ou en Indonésie.
Par ailleurs, les helpers doivent être logées et nourries par leurs employeurs (si elles ne sont pas nourries, elles doivent recevoir une indemnité supplémentaire d’un peu plus de 1 000 $HK par mois), et leurs frais de santé en cas de maladie doivent être payés par leurs employeurs. Leur chambre est parfois réduite à un simple cagibi attenant à la cuisine, par exemple. Si le fait de ne pas avoir à payer leur logement et la nourriture leur permet d’économiser au maximum, elles ne sont pas à l’abri d’abus, notamment le fait de travailler pendant de longues heures.
Leur visa leur autorise un jour de repos par semaine, généralement le dimanche. C’est alors l’occasion pour elles de se retrouver dans tous les espaces publics possibles de la ville (de préférence à l’abri du soleil et de la pluie).
Le dimanche est une journée particulière à Hong Kong, et c’est le jour où les helpers sont justement les plus visibles : elles sont dans les parcs, sous les ponts, sur les plateformes piétons, sous l’immeuble HSBC. Certaines (essentiellement des Philippines) se rendent dans différentes églises chrétiennes pour la messe du dimanche (les messes sont alors dites en tagalog, la langue des Philippines). Elles profitent de leur unique journée de repos pour se retrouver entre elles, organiser des départs de colis collectifs (et donc, moins chers) pour envoyer des cadeaux, des habits à leurs enfants, à leurs familles, répéter des chorégraphies de danse, etc.
Contrairement aux autres étrangers avec un visa de travail, leur statut migratoire est particulièrement précaire. En effet, si leur employeur les licencie (ou si elles démissionnent), elles ne disposent que de 15 jours pour retrouver un nouvel employeur sous peine de devoir quitter Hong Kong. Les employeurs doivent notifier sous 7 jours à l’immigration la fin du contrat de travail d’une helper.
Si vous souhaitez en savoir plus, nous vous recommandons de regarder le documentaire de Joanna Bowers intitulé simplement The Helpers, sorti en 2017.
Les triades
Quand on parle de Hong Kong, l’imaginaire collectif nous renvoie vers les Triades, ces groupes mafieux qui ont fait la joie des cinéphiles fans du cinéma hongkongais.
On pense par exemple à des films comme Infernal Affairs de Wai Keung Lau, sorti en 2002, où l’on voit s’affronter un policier sous couverture dans la mafia, et un mafieux sous couverture dans la police, ou encore au Syndicat du crime de John Woo en 1986, où deux frères (l’un appartenant aux triades, l’autre à la police) s’affrontent eux aussi.
On imagine les mafieux se baladant fièrement et tranquillement au grand jour dans les rues de Hong Kong avec des costumes mal taillés sortis tout droit des années 1980. En réalité, les faits sont un peu différents aujourd’hui.
Tout d’abord, il convient de préciser qu’il n’y a pas UNE triade, un groupe homogène de mafieux. Il existe en fait plusieurs groupes qui coopèrent ou s’affrontent et qui sont répartis sur une bonne partie du territoire hongkongais (mais qui agissent désormais énormément en Chine continentale). Parmi les plus gros groupes, on peut citer Sun Yee On (apparemment le plus important), 14K Triad, ou encore Wo Shing Wo. Il est estimé que 100 000 personnes à Hong Kong feraient partie des triades (contre 300 000 dans les années 1990).
Si auparavant, les triades tiraient leurs revenus essentiellement de la drogue, de la prostitution, de la vente d’armes, de l’extorsion et des salles de jeux clandestines, ils ont aujourd’hui diversifié leur activité, participant notamment aux trafics d’aliments populaires mais interdits soit à Hong Kong, soit en Chine. Ils se sont tournés aussi vers des secteurs plus “légaux” comme l’immobilier. Les triades tiennent aussi des maisons closes, des bars, des clubs, font des prêts d’argent, vendent des produits contrefaits ou des cigarettes venant de Chine.
Par ailleurs, les triades font parfois parler d’elles en intervenant (violemment) dans la vie politique hongkongaise, en attaquant les manifestants du mouvement pro-démocratie (lors du mouvement des parapluies en 2014 ou lors du mouvement contre la loi d’extradition en 2019).
Les membres des triades sont souvent très jeunes. Ils sont essentiellement recrutés dans les quartiers les plus pauvres de Hong Kong. Les chefs des triades cherchent à recruter les jeunes en difficultés, qui ont par exemple abandonné l’école.
Au quotidien, vous ne devriez pas vraiment voir de membres des triades en activité. Tout au plus, vous verrez parfois dans la presse locale des faits divers sur des règlements de comptes, ou des arrestations de ses membres.
La criminalité liée à l’activité des triades se situe depuis une vingtaine d’années autour de 3-4 % des rapports de police. Une unité de police est spécialisée dans la lutte contre les triades.
(1) Commentaire
J’ai adoré lire ce dossier, merci Marie ! C’était vraiment intéressant, instructif et… pour la dernière partie, ça donne faim !!
{{like.username}}
Chargement...
Voir plus