Retrouvez au bas de cet article, la vidéo qui correspond à ce récit !
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Cet article est la suite du dernier article listé ci-dessus…
Ma parenthèse insulaire : IPÉ et Îles-de-la-Madeleine
À Charlottetown, la ville principale, je rencontre « en vrai » Yoan Rousseau, avec qui je correspondais depuis déjà pas mal de temps par mail. Yoan travaille à la Coopérative d’intégration francophone de l’Île-du-Prince-Édouard, et c’est à lui qu’il faut vous adresser si vous compter vous établir sur l’île. Mettre un visage après ces échanges est vraiment agréable. D’autant que ça faisait longtemps que je n’avais pas entendu un humour aussi décapant et sarcastique comme j’aime et ça fait du bien. Yoan m’indique sur une carte ses spots préférés sur l’île et je pars le lendemain les découvrir. Sur la côte Est, je retiens surtout Brudenell Island : avec ses roches rouges et la lumière du soir, la toute petite île est accessible à marée basse par une étroite langue de sable rouge cernée de part et d’autre par la mer.
Encore du Beau… Il m’arrive quelque chose d’assez étrange le lendemain. En roulant en direction de la ville de Souris, je m’aperçois qu’une voiture est arrêtée sur le bas-côté de cette route très passante. Un peu plus loin, une deuxième. Tiens. Des gens perdus ? Je les double et roule sur quelques dizaines de mètres encore… encore des voitures garées ! Pourtant, sur la file en face, ça roule, lentement, mais ça roule… En doublant une autre voiture arrêtée, un mec me fait un doigt d’honneur convaincu et agressif par la vitre. Wow wow wow, là, il y a un truc. Putain, pourquoi tout le monde est arrêté comme ça ?? Je me range en catastrophe sur le bas-côté, comme les autres, descends de voiture et frappe à la vitre d’une conductrice à l’arrêt. Je lui demande ce qui se passe.
– « Vous n’avez pas vu le corbillard ? », me dit-elle en anglais.
– Le corbillard ?, dis-je en m’étonnant moi-même de connaître ce mot en anglais.
– Mais oui, il y a une procession funéraire ».
Ma mâchoire touche terre. La file de bagnoles en face suit un corbillard que je n’avais pas vu, et toutes les voitures de ma file se sont arrêtées par respect. J’attends à mon tour au volant. La procession dure bien quinze minutes. En repartant, Monsieur-doigt-d’honneur me baragouine quelque chose dans sa barbe sale tombant en pointe un mètre plus bas sur son tee-shirt Hell’s Angels. Quand l’ignorance des cultures et des traditions nous fait commettre des erreurs et des maladresses… En voilà un bel exemple ! Et ni eux ni moi n’en sommes responsables !
Je suis également allée à Cavendish et ne regrette pas un seul instant. D’une part, parce que le coin est franchement beau
D’autre part, parce que c’est là qu’a vécu Lucy Maud Montgomery. Vous ne la connaissez pas ? Moi non plus. Cette romancière a vécu et écrit ici « Anne… La maison aux pignons verts », un standard mondial étudié jusque dans les écoles du Japon et qui s’inspire directement de Cavendish et de ses environs. Pas étonnant alors de voir autant d’Asiatiques sur l’I.P.E. venir en pèlerinage voir cette maison aux pignons verts…
En cette saison, les ferrys vers les Iles-de-la-Madeleine se font plus rares. J’apprends que le prochain part dans trois heures et le suivant… dans deux jours. Je ne l’avais absolument pas envisagé le matin même – vive la liberté : me voilà donc à bord du ferry, direction les Iles-de-la-Madeleine dont on m’a tant et tant parlé ! 100 dollars (!) et cinq heures de traversée plus tard, j’arrive de nuit à Cap-aux-Meules, sans rien connaître de ce minuscule archipel. Pour dormir, un parking interdit aux vans fait très bien l’affaire. Seulement voilà, la merveilleuse saison d’automne a peu à peu décliné. Il ne fait pas beau. Le ciel est gris, il pleut même. Quelques points de vue offrent une vue à 360°C…
Que ça doit être splendide par grand soleil ! J’essaie d’imaginer… Sur Grosse-Île, j’entame une randonnée à travers la réserve nationale de faune de la Pointe-de-l’Est, censée être pleine d’oiseaux (mais pas une plume à l’horizon) ; ce chemin débouche sur la célèbre et fameuse plage de l’Echouerie, aux 8,5 km de sable réputé. Hélas, une immense mare de boue me barre le chemin et après avoir tout tenté (et retenté) pour passer, j’effectue un demi-tour rageur. M’en fous, je reviendrai, je passerai et je verrai la plage ! Effectivement, têtue comme je suis, j’enfile le lendemain ma tenue de pêcheur (veste et pantalon de Kway) et mes bottes en caoutchouc (oui, mine de rien, c’est bien pratique) et retourne sur ce chemin. Il pleut fort, le vent est terriblement puissant, mais je passe aisément la mare, puis une deuxième encore plus grande. J’arrive enfin à la plage de l’Echouerie, classée parmi les plus belles du monde selon le National Geographic… et classée la plus apocalyptique par moi ! Au bord de l’eau, le vent entre dans une fureur démentielle et se déchaîne dans un puissant rugissement, les vagues s’écrasent sans ménagement dans un fracas assourdissant, la pluie redouble, retriple, requadruple, et je suis seuuuuuuule au moooooonde dans ce déluge absolument dantesque!! Cramponnée à mon bâton pour ne pas tomber à la renverse, je chante, je crie, je hurle, je gueule et je m’entends à peine. Elle est loin, l’image ensoleillée de bronzette de bikinis sur le sable, mais que c’est bon d’être ainsi malmenée par les éléments!
Bon. J’ai besoin d’une douche maintenant. Excusez ce détail prosaïque, mais ça doit bien faire cinq jours que… J’en viens presque à penser que, si je ne croise personne, ce n’est finalement peut-être pas dû qu’à la fin de saison. Tous les hébergements que je vois sont fermés. Il est 17 h 45, je me fais vite fait à dîner dans un camping désert avant qu’il ne fasse nuit. D’ailleurs, en road trip à cette saison, on se surprend parfois à penser des phrases étranges, du genre : « 15 h 49 : bientôt l’heure de dîner » ; « C’est quand même pas mal, une table… » ; « 21 h 15 ? Oh là là, je me couche vraiment trop tard ces temps-ci »… J’oriente Jonathan face au vent pour en être à l’abri et, tapie derrière lui, le coffre ouvert, je me cuis un magnifique steak au réchaud.
Le camping est désert. L’auberge de jeunesse à côté est fermée. Je suis condamnée à dauber pour le restant de mes jours, ou quoi ?? Une voiture arrive pleins phares juste devant l’auberge. Je discute avec la personne : Larry, de Nouvelle-Ecosse, est en mission de travail une semaine aux îles ; le patron lui a exceptionnellement laissé les clés de son auberge. Rien que pour lui.
– “You need a room ?, me demande-t-il.
– No, I need a shower.
– Come over”.
Je me retrouve donc à poil dans la douche d’une salle de bain qui ne ferme pas à clé, dans la chambre d’un mec étrange que je ne connaissais pas il y a dix minutes, le tout dans une auberge absolument déserte, perdue sur une île reculée. « Psychose » couplé à « Shining », vous voyez le tableau. Je ne vous cache pas que je regardais toutes les dix secondes derrière le rideau. Et j’avais préparé mon petit couteau suisse au cas où… Mais Larry n’a rien de Madame Bates ni de Jack Torrence et on passe la soirée à discuter.
Vient le temps de quitter les îles : le temps est trop mauvais et je m’ennuie. Je reprends le ferry très tôt le matin, arrivée prévue à 13h à Souris, sur l’I.P.E. Mais les vents soufflent trop fort et il nous est impossible d’accoster. Nous repartons vers le large et retentons notre chance plus tard, en espérant – en vain – que les vents aient tourné. Un va-et-vient qui va se répéter pendant des heures en plein tempête… Des heures de tangage et de roulis, je hais ça. On est dimanche, un passager regarde les prévisions de vent et annonce qu’il n’y aura pas de fenêtre avant mardi. Mardi ?! Nous voilà donc coincés sur ce rafiot deux jours durant ??! Les côtes de l’Ile-du-Prince-Edouard sont pourtant si proches ! Ce n’est pas drôle du tout. Et en fait, si : une super ambiance s’installe à bord, tout le monde devient pote. 14h : je joue avec des membres d’équipage à un jeu de questions/réponses sur le Québec ; je ne réponds à rien mais ça tue le temps. 15h : je glisse une pièce de 1 $ et me retrouve à piloter une moto dans la salle d’arcade du ferry. 16h : j’entame un foot dans un couloir avec un passager qui s’emmerde aussi. 17h : le soleil commence à se coucher et on est toujours coincé sur ce maudit ferry. Quand il fait demi-tour et qu’il se retrouve perpendiculaire aux vagues déchaînées, on est comme ivre, balancé de droite à gauche et, si on marche, on s’écrase contre les murs. Mais les vents finissent par tourner et nous débarquons en début de soirée. La traversée aura duré dix heures au lieu de cinq…
Je quitte le lendemain l’Ile-du-Prince-Edouard par le fameux pont de la Confédération long de 12 km. Entrer sur l’île est gratuit ; en repartir coûte 46 $ ! A 3,83 $ du kilomètre, autant en prendre plein les mirettes à ce prix-là ! Mon cœur se met à vibrer en suivant les panneaux « Nouvelle-Ecosse ».
Encore une fois, je pensais n’avoir pas le temps de visiter cette province… Alors, voir marqué « Nova Scotia : 1 km » m’envahit d’une profonde joie. Direction le Cap Breton, dans le nord de la province. Ronald Bourgeois, un chanteur-auteur-compositeur acadien réputé et très apprécié ici – et ailleurs – me prête carrément sa maison pour quelques jours. Elle est située au bout d’un chemin de terre sur l’île de Chéticamp, un village aux portes du parc national des Hautes-Terres du Cap Breton.
Arrivée de nuit dans la maison (une maison !), ce n’est qu’au petit matin que je découvre où j’habite : le jardin descend jusqu’à un bras de mer qui me sépare du village ; en face, les montagnes boisées du Cap Breton ondulent sous un ciel bleu. Je me balade dans le parc et fais, entre autres, le Skyline Trail, LA rando-phare du parc national.
Au cours d’une autre marche, j’entends au loin des cris sourds, plaintifs, déchirants même, qui se répondent. Cela dure bien dix minutes… J’apprendrai plus tard qu’il s’agissait de coyotes et qu’il est d’ailleurs conseillé de ne pas randonner seul depuis qu’une fille de 19 ans s’est fait attaquer mortellement il y a quelques années. En tout cas, je ne trouve pas les paysages du parc si spectaculaires que cela. Peut-être que les couleurs sont passées, peut-être que le parc n’est finalement qu’une pâle copie de Forillon, peut-être que j’ai trop vu de beauté en trop peu de temps… Quoi qu’il en soit, je me repose dans la maison de Ronald et, lorsque je quitte les lieux, j’en loue même une autre, sur l’île aussi. C’est d’ici que je vous écris. Je crois que je n’ai pas le courage de traverser le Canada maintenant pour me rendre dans l’Ouest. On m’a dit qu’il était encore temps, tout juste, et que cela me prendrait une semaine. Mais mine de rien, ce road trip, depuis mon départ de Gaspésie, m’a fatiguée : le paramètre « froid » s’est ajouté à mon quotidien. Goûter ici à du confort me fait tout « lâcher », « relâcher » : j’ai une sorte de contre-coup, la crève et la fièvre depuis plusieurs jours. Alors je m’offre un peu de repos dans cette maison. Elle est isolée – c’est le moins que l’on puisse dire – au bout d’un long chemin de terre. Je n’ai pas de voisins… et pas de projets. Etant donné que je ne vais plus dans l’Ouest, je cherche encore quoi faire cet hiver et où aller… Vous avez des idées, des jobs à proposer ? Surtout n’hésitez pas !
En tout cas, si mon prochain article PVTiste ressemble à ça…
Un bon tiens vaut mieux que deux tu l’auras
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… s’il vous plaît, appelez vite le 911 !
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