- Âge au début du PVT :29 ans
- PVT : en couple en 2018 à Montréal (Québec) puis à Whitehorse (Yukon)
- Domaine professionnel :Danseur
- Activité professionnelle au Canada :Employé dans un garage automobile
- Économies en arrivant : 5 000 euros
Le PVT : une opportunité pour faire une reconversion professionnelle
J’étais danseur, j’avais une vie un peu précaire. En fin d’année scolaire, fin juin, je savais que tous mes contrats allaient se terminer. Il suffisait que j’en prenne pas d’autre : c’était assez simple. Je faisais ça depuis toujours. C’était mon activité principale quand j’étais en France. Je me disais : « Bon, maintenant je vais faire autre chose, nouveau pays, nouveau contexte, nouvelle carrière » et j’allais pas pousser jusqu’à mes 40, 45, 50 ans et finir par devoir me réorienter, me reconvertir parce que j’en n’avais pas le choix.
Je trouvais que c’était l’occasion parfaite. Je pense que j’arrivais dans une période où je commençais à en avoir marre de la précarité, des horaires un peu étranges. Je travaillais quand les gens ne travaillaient pas. À force d’être en permanence en décalage, je commençais à avoir envie d’autre chose. Envie de quelque chose de plus stable, en termes d’horaires et de salaire. J’avoue, j’avais envie d’un truc plus classique.
Quand l’un est tiré au sort mais pas l’autre !
Au fond de moi, je me disais : « Ça arrivera pas, c’est impossible qu’on soit tirés au sort, les probabilités sont vraiment pas de notre côté ». Et pour preuve, le jour où j’ai été tiré au sort, je m’achetais une voiture. Pour moi, c’était clair que ça n’arriverait pas. J’ai eu les clés de la voiture… et j’ai reçu un e-mail qui disait que j’avais été tiré au sort. J’étais hyper gêné d’être tiré au sort en premier, mon conjoint ne l’a pas très bien vécu, je pense, d’autant plus que c’était son projet. Finalement, on a pris nos billets d’avion en repoussant la question de l’organisation : on verra bien ! Il a été tiré au sort lors de la dernière ronde d’invitations, en fin d’année.
De Montréal à Whitehorse, en impro totale !
C’est un tellement grand pays qu’on s’est dit : « Si ça nous plaît pas à tel endroit, on fait 200 km et on va à un autre endroit, même si c’est 500 ou 1 000 ou 1 200 ou 10 000 km, peu importe. » On s’est acheté un van, sans trop y réfléchir, c’était un accident ! *Rires*
On a fait deux mois de WWOOFing un peu cliché avec des chiens de traineaux dans le nord du Québec. C’était génial, et ça nous a permis de retaper le van. De là, on est partis en road trip pendant trois mois et demi aux États-Unis. Au bout de trois mois on s’est dit : « C’est un peu con, on est en PVT au Canada, ça fait trois mois qu’on est aux États-Unis » et là on est retournés en Colombie-Britannique.
Au début, en arrivant, on nous avait dit : « Ouais, tous les Québécois vont l’été dans la vallée de l’Okanagan pour ramasser des fruits, y a moyen de gagner de l’argent. » Au bout de trois mois de road trip, on était un peu ruinés. On a fait du WWOOFing dans une ferme bio, on était censés rester deux mois, mais on y est restés cinq ! On est devenus hyper potes avec les gens de la ferme. On a aussi travaillé dans un hôtel pour mettre des sous de côté.
On avait envie d’un vrai hiver donc fin novembre, on est partis vers le nord, en direction de Whitehorse en se disant : « On passe l’hiver ici, on met des sous de côté et on continue, on prend la Dempster Highway jusqu’à Dawson et après, on continue le road trip. » On est arrivés à Whitehorse il y a deux ans et on y est toujours !
On s’était dit : « Y a une route qui passe à Whitehorse alors on va y aller. » C’est la ville la plus grosse, la plus au nord qu’on ait trouvé sur la carte. J’étais pas très rassuré de partir dans une petite communauté, tout au nord du nord, ça me paraissait improbable. On aurait été trop coupés du monde et ça m’aurait trop angoissé. Donc Whitehorse, c’était un bon compromis.
Une installation à Whitehorse : bons et mauvais côtés
Otto, mon conjoint, est soudeur, donc il savait qu’il allait pouvoir trouver du travail vu qu’il y a des mines dans la région. On est arrivés à Whitehorse sans rien de prévu, en fait. On avait un logement, quand même. Dix jours avant de partir, on avait trouvé une coloc en ville. On a eu le nez fin parce qu’en arrivant sur place, on s’est rendu compte que le logement à Whitehorse, c’est un enfer. C’est impossible de se loger, c’est extrêmement cher, les gens sont hyper sélectifs sur les personnes qu’ils prennent dans leur coloc ou leur appart.
Il y a très très peu de logements. Les gens habitent tous en coloc ou dans des sous-sols sans fenêtre. Ça, on le savait pas.
Otto a trouvé du travail en 24 heures en tant que soudeur. Moi j’ai trouvé du travail au bout de dix jours chez Ford et j’y suis resté pendant un an.
Je conduisais les clients chez eux, j’allais les chercher quand leurs réparations étaient finies. Au bout de deux mois, ils m’ont proposé une promotion pour être conseiller technique. Là, je faisais de la relation clients. Je faisais le lien entre les techniciens, les clients, le département des pièces, etc. Donc pas du tout mon métier ! Mais voilà, ils m’ont fait confiance, ça s’est bien passé et j’ai fini par partir parce que je n’arrivais pas toujours à gérer le stress.
À Whitehorse, il y a une très grosse communauté francophone et si on arrive à se débrouiller assez bien et qu’on arrive à montrer qu’on est assez volontaire et qu’on a envie d’apprendre l’anglais, ça passe. Les gens sont assez ouverts et il y a un tel manque de main-d’oeuvre partout en ville que la langue (à moins que ce soit une pièce maîtresse du métier), tant pis quoi. J’aime la ville, qui est assez isolée (c’est vivre au milieu de rien parce qu’autour de Whitehorse, y a rien), mais où il y a quand même tout ce qu’il faut. C’est quand même une ville assez grande. En plus de ça, le territoire du Yukon a plein d’atouts, y a plein de choses à faire. À Whitehorse, en hiver, y a un milliard de choses à faire : des randonnées, des raquettes, du patin à glace sur les lacs. Il y a une station de ski, y a plein de pistes pour faire du ski de fond. L’été c’est pareil, y a du canoë, des randos, on est à 2 heures de l’Alaska (de Skagway), on peut aller faire du bateau. Pour peu qu’on aime bien être dehors, on ne peut que tomber amoureux de cet endroit !
Vivre dans un endroit isolé mais cosmopolite
Être homo ici, c’est absolument pas un sujet. Pour personne. Ça l’a jamais été. On a fait du WWOOFing au Québec, en Colombie-Britannique, à Whitehorse aussi pendant dix jours dans un ranch avec des chevaux. Moi, je suis un peu naïf, je me pose vraiment pas ces questions-là, peut-être que je devrais. Le Canada est assez connu pour être un pays ouvert. Si on m’avait posé la question avant de partir, j’aurais répondu : « Ça fait partie des premiers pays à avoir légalisé l’adoption et le mariage pour les couples homos ». À Whitehorse, y a une communauté qui s’appelle « Communauté Queer LGBT+ ».
Y a une Gay Pride, y a plein de choses qui sont mises en place, par exemple à la piscine, ils essaient de faire des journées ou en tout cas des après-midi réservées aux personnes trans. C’est entré dans les moeurs. Peut-être que si on avait été dans une ville moyenne en Alberta, ç’aurait été différent.
Le territoire du Yukon, c’est quatorze Premières Nations différentes. Tout le monde vit ensemble. À Whitehorse, y a une très grande partie de la population qui vient d’ailleurs : y a des Philippins, des Français, des Indiens, c’est une espèce de mix culturel qui fonctionne extrêmement bien. Personne ne regarde personne en fonction de son âge, de sa couleur, de sa religion, de sa forme, ni de sa taille. C’est plutôt agréable.
La découverte des nuits polaires
C’est vraiment des hivers de cartes postales ! Déjà, y a les aurores boréales, qu’on voit plus l’hiver parce ce qu’il fait nuit plus longtemps.
Au mois de janvier, c’était dix jours à -40 °C, c’est génial quoi ! On est quand même séduits par le froid, le climat est génial. On trouve que dix jours à -40 °C, c’est pas suffisant, on voudrait des hivers plus longs et plus rigoureux. La lumière, le silence et puis le côté challenge, partir marcher un quart d’heure quand il fait – 40 °C, c’est dangereux si on n’est pas bien couvert, si on se couvre pas bien les mains, le visage et les pieds. Y a un côté un peu grisant de ce point de vue-là. C’est extraordinaire.
-40 °C, je ne les visualisais pas, en fait. Quand on est arrivés à Montréal, il faisait -6 °C en journée et déjà, pour moi, avoir des températures négatives en plein milieu de la journée, c’était inconcevable. Donc passer dix jours à -40 °C, c’est quelque chose à vivre. C’est très impressionnant parce que tout continue de fonctionner normalement : y a des bus, y a de l‘électricité, les gens vont à l’école, au travail, rien ne s’arrête.
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