- Âge au début du PVT : 22 ans
- PVT : solo en 2017 à Montréal (Québec), Vancouver (Colombie-Britannique) puis au Yukon
- Domaine professionnel : Fraîchement diplômée
- Activité professionnelle au Canada : Barista puis volontaire chez des mushers
- Économies en arrivant : 10 000 euros
Une première déception…
J’ai passé trois semaines à Vancouver en arrivant au Canada et en fait, je crois que j’avais tellement d’attente de cette ville-là que j’ai été très déçue en arrivant. Je ne me suis pas du tout plu à Vancouver. Déjà, il pleuvait énormément ! Pourtant, c’est pas quelque chose qui m’affecte d’habitude, mais là, je pense que c’était un tout. Je m’attendais à quelque chose de beaucoup plus comme Montréal, où les gens sont plus sympathiques. J’ai trouvé que Vancouver était beaucoup plus américanisée que Montréal et la mentalité n’est pas pareille. Il y a de gros buildings, à Montréal j’avais pas l’habitude de ça. Les alentours étaient magnifiques : c’est la forêt, c’est sublime, j’ai rien à dire, mais je ne suis pas tombée amoureuse de cette ville. J’étais déçue et puis je me suis dit : « Go au Yukon », ça me donnait encore plus envie d’aller là-bas !
… qui provoque un déclic : le Yukon
En regardant sur les groupes pvtistes, je voyais qu’il y avait des gens qui vivaient des trucs de fou dans des territoires qu’on connaît pas trop : Nunavut, Territoires du Nord-Ouest et au Yukon. Je voyais que ces gens partaient là-bas en faisant du WWOOFing. Du coup, je me suis renseignée et je me suis inscrite sur le site HelpX. Quand je parlais avec les hôtes, j’avais pas vraiment le feeling… J’ai regardé dans les Territoires du Nord-Ouest. Ça me faisait peur d’aller si loin, je trouve que c’est encore plus isolé que le Yukon. J’ai contacté une famille au Yukon et ça s’est super bien passé. L’hôtesse m’a demandé de faire un Skype, on a rigolé… vraiment un super bon feeling dès le début. Elle et son mari cherchaient quelqu’un pour deux mois, pour garder un enfant de deux ans et s’occuper de 35 chiens de traîneau. Pendant l’appel, je lui avais dit que j’avais un anglais limite, que je comprenais plus que je ne savais parler, qu’il faudrait me parler doucement, elle m’a dit : « T’inquiète, on peut parler français ! ». Sur Skype, je me suis rendu compte que c’était une Québécoise et que j’allais me rendre chez un couple franco-québécois. Il y avait un côté super rassurant même si c’était pas ce que j’imaginais vivre (me retrouver au milieu d’une famille totalement yukonnaise). Il y avait un côté rassurant de partir loin de chez moi au milieu de rien et qu’il y ait des gens qui me comprennent et que je peux comprendre totalement. En arrivant là-bas, il y avait des paysages à couper le souffle, vraiment. Dans la famille, j’ai rencontré tous ces chiens qui sont, pfiou ! Incroyables !
C’est une famille super, tu vois qu’ils ont l’habitude d’avoir des Helpers tout le temps, tout le long de l’année. Je devais m’occuper du petit pendant que mon hôte, Bertrand, s’occupait des chiens ou inversement. Tu sentais qu’ils avaient l’habitude de recevoir des gens, ils étaient ouverts, avenants, tu te sentais bien accueillie chez eux.
J’avais pas du tout envie de repartir. Mon hôtesse, Julie, m’a dit : « Ce serait vraiment cool que tu reviennes après ton voyage dans l’Ouest américain parce que ça s’est super bien passé, tu as un super bon feeling avec les chiens et le petit ». À chaque fois, je disais : « Non, mais là je vais repartir, essayer de voir autre chose du Canada ». À chaque fois, je déplaçais mon vol parce que je ne voulais pas partir, je me sentais vraiment trop bien chez eux. C’est ma deuxième famille maintenant, on s’appelle au moins une fois par mois. Je les adore et je pense que c’est réciproque. J’ai tellement appris et découvert de choses chez eux. On était au milieu de rien, moi j’étais une petite citadine en France, j’étais pas du tout habituée à ça. Là, tu vas en forêt, tu vas découper du bois mort, tu fais ton bois de chauffage toute seule, tu vas nourrir les chiens, il fait -40 °C.
Quand je suis rentrée en France, je suis rentrée avec un chien de là-bas, de chez eux. Pendant tout le mois d’août, j’ai vu les petits chiots grandir. Y en a un que j’aimais beaucoup et que je trouvais trop mignon mais je ne pensais pas du tout le ramener. J’avais pas de situation en France. Un chien, c’est vraiment un engagement sur quinze ans, quoi. Je m’accrochais à ce petit chiot mais je me disais : « Déjà, il est pas à moi et impossible de le ramener ». J’ai été incroyablement touchée par le geste de Bertrand, de me donner un chien, déjà de me le donner, pas de me le vendre, et d’avoir la confiance de me laisser ramener un chien en France. C’est mon lien physique avec le Yukon.
Des aurores et des chiens : une scène inoubliable
La première fois que j’ai vu une aurore boréale, c’était au mois d’août, c’était improbable. Les journées sont quand même plutôt longues, t’as très peu de nuits noires. Je suis sortie et j’ai vu ma toute première aurore boréale, elle était verte et rose, je m’en souviens encore. J’ai pleuré. C’est incroyable !
J’en ai vu plusieurs pendant l’hiver. À chaque fois, c’est une sensation différente, à chaque fois, elles sont différentes. Je suis sortie ce soir-là, j’étais en pyjama, il faisait – 20 °C, je me pelais grave, j’étais sur la terrasse, je regardais les aurores boréales et les 45 chiens se sont mis à hurler. Je me suis dit : « Je suis dans un film, c’est pas possible ». Quand ils vivent en meute, ils hurlent beaucoup les chiens, comme une meute de loups. Ça m’a mis des frissons et quand j’y repense, j’ai encore des frissons. C’est pas en France que tu peux vivre ça. T’es toute seule, t’es au milieu de la forêt, c’est fou quoi, c’est une sensation unique.
Le monde du traîneau
La première fois que j’ai fait du traîneau, c’est un souvenir incroyable. Au départ, j’observais et je trouvais ça incroyable de voir les chiens si barges, à vouloir faire du traîneau. Je m’étais juré que si je tombais dans une famille où les chiens, c’est du commerce ou s’ils n’étaient pas bien traités, je m’en irais de suite. Je suis une Brigitte Bardot ! Quand Bertrand m’a fait faire le tour des chiens, le premier jour, j’ai compris que ça allait super bien se passer ! Il appelait ses chiens : « Viens là ma fille ». Tu sens vraiment que les chiens font partie de la famille. D’après Julie, des fois, ils en font un peu trop partie ! Tu sens que c’est des chiens qui sont aimés et qu’ils sont bien.
En tirant le traîneau, les chiens étaient fous, tu te dis qu’ils ne vivent que pour ça. Ils adorent ça. La première fois que je suis montée toute seule sur un traîneau, c’était une sensation de dingue parce que les chiens partent à une vitesse… !
Tu te demandes comment cinq chiens comme ça peuvent tracter un traîneau en bois et toi dessus. Ils sont musclés, ils sont beaux. J’avais peur de ce commerce d’utilisation des chiens pour gagner de l’argent. Mais très honnêtement, la famille n’en vit pas si bien, c’est plus une passion pour eux. Tout ce qu’ils gagnent, ils le remettent dans la nourriture et dans l’aménagement des enclos. La plupart des mushers ont leurs chiens enchaînés à un piquet. Il y en a beaucoup qui vont dire : « Ça évite les bagarres, ça évite que des chiennes soient prises par des mâles ».
Bertrand a choisi de faire des enclos, même si ça coûte très cher. Ils étaient en chaînes, jusque-là. Ils sont à plusieurs par enclos, ils sont entre deux et cinq selon leurs affinités. Souvent, ils sont tous en liberté, ils jouent, c’est top ! Tu vois que Bertrand aime ses chiens.
Un retour difficile
J’allais pas très bien, j’étais très, très, très triste de quitter le Yukon. Et pas que le Yukon, j’étais triste de quitter la famille, triste de quitter les chiens, même si j’avais le mien, maintenant. Le Yukon ça a été un tout, si ça se trouve je ne l’aurais pas vécu pareil si je ne l’avais pas vécu dans cette famille-là. C’est vraiment ma deuxième famille. J’ai eu l’impression de rentrer et qu’ici, rien n’avait bougé et que personne ne pourrait vraiment comprendre ce que j’ai vécu là-bas. Je pense que tu vis différemment les choses quand tu es toute seule. Des fois, je me baladais quand j’avais du temps pour moi, j’allais juste prendre un chien et me balader dans la forêt : d’un seul coup, tu vois un renard, tu vois un élan puis tu vois un ours, tu te dis que c’est une vie irréelle.
Après, je suis rentrée et j’ai retrouvé tout ce qui m’a fait partir de la France. Une routine, les mentalités françaises que j’affectionne pas des masses, surtout depuis que j’ai passé 9 mois à Montréal. Je ne critique pas la France parce que je l’aime beaucoup, c’est un très beau pays, c’est un pays très riche dans tous les sens du terme.
Y a trop de monde, trop d’informations, trop de bruit et en rentrant en France ça m’a vraiment choquée, tout ça. Ça a été violent, presque. À Paris, c’est mon papa qui est venu me chercher et ça m’a marquée : tu sors de l’aéroport, t’es sur le périph parisien, t’a tout le monde qui klaxonne, les gens roulent mal, les gens ne sourient pas ! Et là, ça a été une claque, je me suis dit : « Mais qu’est-ce que je fais ici ? ».
Ça va mieux depuis quelques temps. Heureusement que j’ai mon petit chien. Après avoir changé totalement de mode de vie, être sortie de ma zone de confort en allant si loin, au milieu de rien, chez des gens que je connaissais pas, j’ai l’impression de faire un retour en arrière. C’est violent.
Y a des gens qui pourraient dire : « Mais elle se la pète », mais en fait non, c’est vraiment ce que je ressens au plus profond de moi-même.
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