Mathieu, d’un PVT à la citoyenneté canadienne (16 ans à Toronto)
Mathieu est arrivé au Canada en tant que pvtiste. Il y vit toujours 16 ans plus tard et a obtenu la citoyenneté canadienne. Dans l’interview ci-dessous, il vous parle de son parcours personnel et professionnel. Pour en savoir plus sur les étapes de sa demande de citoyenneté, d’un point de vue plus administratif, vous pouvez lire son récit Devenir citoyen canadien.
Je dirais que c’est une bonne idée si on prévoit de prendre, par exemple, un mois de cours d’anglais intensifs, pour vraiment être immergé tout de suite et pouvoir mettre en pratique au quotidien ce qu’on apprend en cours. Cette option nécessite de prévoir un bon budget, non seulement pour payer ses cours d’anglais mais aussi pour tenir sans trouver de travail pendant un mois. Si on vient à Toronto sans parler anglais et sans prendre de cours, je pense que le quotidien peut vite être très compliqué. Avoir Julie avec moi m’a permis d’ouvrir un compte, de chercher un logement ou encore de demander mon NAS/SIN facilement, mais sans elle, je ne sais pas comment j’aurais fait. La grande majorité des gens ne parlent pas du tout français à Toronto. Du coup, une fois ces démarches « difficiles » (quand on ne parle pas anglais, car sinon c’est très simple) faites, j’ai pu évoluer dans ce nouvel environnement anglophone sans angoisse particulière. J’échangeais avec un caissier, avec un chauffeur de bus, avec un voisin, du coup l’enjeu était moins important, c’était plus relax. Je ne veux décourager personne mais je ne veux pas non plus prétendre que c’est facile de vivre dans une ville anglophone sans parler anglais. Je dirais qu’il m’a fallu deux ans pour me « débloquer » en anglais. Après, il faut savoir qu’à Toronto, il y a beaucoup d’immigrants (asiatiques, indiens, européens, etc.) et du coup, ça décomplexe pas mal quand on arrive, car on se rend compte que notre accent n’est qu’un accent parmi plein d’autres dans la ville. Et je trouve que du coup, les gens sont hyper tolérants. Quand tu as un accent, ça ne dérange personne (et en plus l’accent français est toujours assez apprécié). Ce que je pourrais conseiller aux pvtistes qui choisissent d’arriver à Toronto, c’est de ne pas avoir honte de parler avec un accent français, car c’est classe ici ! Il faut se lancer, personne ne va se moquer de vous, il ne faut pas rester figé sinon après on a un blocage pendant longtemps. Les premières semaines sont cruciales !
En 2009, j’ai lancé ma demande de résidence permanente, que j’ai obtenue en quelques mois seulement, parce que je suis passé par la Catégorie de l’Expérience Canadienne (CEC), qui a été intégrée, en 2015, au programme Entrée Express. En 2014, j’ai demandé la citoyenneté canadienne, que j’ai obtenue en quelques mois seulement. Si vous voulez plus d’informations sur cette demande, j’en parle dans un autre récit : Devenir citoyen canadien.
Julie a trouvé un emploi comme professeur de français pour adultes chez Berlitz et comme au Canada, le réseau fonctionne énormément, ça m’a permis de passer moi aussi un entretien chez eux et de décrocher un boulot de professeur de français. Ce qui était bien, c’est qu’en étant prof chez eux, je pouvais bénéficier gratuitement de cours d’anglais de groupe, du coup j’ai pu gagner de l’argent et m’améliorer en anglais. Deux mois environ après notre arrivée, on s’est inscrit dans des agences d’interim, ce qui m’a permis de trouver un boulot de vendeur par téléphone (en français). Ce n’était pas transcendant mais je gagnais environ 14 $ de l’heure. J’ai dû faire ça pendant 3 semaines, avant de trouver un boulot dans mon domaine, à mi-temps. Je travaillais au Collège Boréal en tant qu’assistant informaticien et environ 9 mois après le début de mon PVT, j’ai trouvé un boulot à temps plein dans l’informatique (poste en français, dans une entreprise qui embauchait pas mal de Canadiens francophones, ce qui m’a beaucoup aidé pour décrocher le boulot mais aussi pour m’intégrer !) dans une entreprise où je suis resté plusieurs années. Aujourd’hui, quand je rencontre des pvtistes, ce qui ressort de nos discussions c’est que ceux qui parlent bien anglais trouvent toujours du travail car leur bilinguisme est un vrai plus. En revanche, ceux qui ne parlent pas anglais, ça passe ou ça casse. Autant, ça passe pour beaucoup, autant pour d’autres, c’est vraiment difficile, et malheureusement, ces pvtistes ont souvent honte de témoigner. Ce qu’il faut bien avoir en tête, c’est que l’anglais est indispensable dans tout ici, donc quand on ne parle pas anglais, tout devient compliqué, même passer le moindre coup de fil. C’est un cercle vicieux. Dans le meilleur des cas, ces pvtistes partent pour Montréal, mais dans le pire des cas, ils repartent du Canada. Ça n’a rien à voir, mais il y a une question qu’on me pose souvent concernant le travail, c’est le statut d’indépendant. C’est beaucoup plus simple qu’en France, notamment en terme de paperasse. Pour ceux qui veulent plus d’informations, on a un article sur le sujet : Être travailleur autonome au Canada (freelance).
Il y a beaucoup de pvtistes qui évitent les Français, car ils se disent qu’ils ne sont pas venus ici pour ça. Souvent, ils les évitent pendant quelques mois ou quelques années, mais ensuite, ils se rapprochent de la communauté française, parce qu’à bien des égards, c’est plus simple. Même si on est parfaitement bilingue, quand on parle avec des Français, on peut passer de bons moments, parce qu’on a le même humour (notamment le second degré), parce qu’on a les mêmes origines, parce qu’on parle politique, etc. C’est parfois délicat d’aborder des sujets « conflictuels » avec les Canadiens. Débattre, s’emporter, ce n’est pas forcément quelque chose qui leur plaît. Alors qu’entre Français, on sait qu’on peut débattre sur un sujet sans pour autant se brouiller. Et puis, c’est bête, mais parler français, parfois ça fait du bien, on peut dire tout ce qu’on veut, comme on veut, sans trop avoir à réfléchir. Passer une soirée à parler anglais quand on ne maîtrise pas bien la langue, c’est épuisant et parfois frustrant (parce qu’on n’a pas réussi à dire ce qu’on voulait dire, ou encore parce qu’on n’a pas compris toutes les blagues…). Mais bon, c’est difficile de faire des généralités car à Toronto, beaucoup de personnes viennent d’autres pays donc c’est un vrai mélange de cultures. L’autre jour, quelqu’un m’a parlé d’un Français qui avait dit, sur Facebook, que Toronto était une ville « trop cosmopolite ». Vraiment, je ne comprends pas cette phrase. C’est à l’opposé de la mentalité d’une ville comme Toronto justement… Dans la ville, il y a des quartiers où les gens sont un peu regroupés par communautés, les Italiens, les Portugais, les Grecs, etc. mais les gens se mélangent bien au quotidien, c’est une des forces du Canada, l’intégration est assez facile. Beaucoup de Français se regroupent aussi entre eux, et je pense que côtoyer des gens de son pays n’empêche pas d’avoir une intégration réussie. Il y a un truc que j’aime bien ici, c’est que pendant la Coupe du Monde de foot, par exemple, les gens défendent des équipes très différentes selon leurs origines et sur leur voiture, ils ont tendance à mettre deux drapeaux, celui de leur pays d’origine et celui du Canada. On ressent vraiment que les gens ici, même s’ils viennent d’ailleurs, sont fiers d’être canadiens. Ils voient leur immigration au Canada comme une chance, ils sont un peu reconnaissants, je dirais.
Mon père est vietnamien, il est arrivé en France à 20 ans, donc à peu près à l’âge que j’avais quand je suis arrivé au Canada, il s’y est installé, il a dû repartir à zéro, il a fondé une famille et a eu un beau parcours professionnel.
Edit du 26 juillet 2021 : je suis maintenant papa d’une petite fille de 3 ans née à Toronto et qui a déjà un meilleur accent anglais que moi… Dans quelques années, ce sera à son tour de se moquer de mon accent français 🙂
Cofondatrice de pvtistes.net, j'ai fait 2 PVT, au Canada et en Australie. Deux expériences incroyables ! Je vous retrouve régulièrement sur nos comptes Insta et Tiktok @pvtistes avec plein d'infos utiles !
Cofounder of pvtistes.net. I went to Canada and Australia on Working Holiday aventures. It was amazing!
Connectez-vous pour pouvoir voter.
Les Guides de pvtistes.net
Nos guides des pvtistes sont disponibles gratuitement au format PDF, pour que vous puissiez les consulter à tout moment, même sans connexion !
(35) Commentaires
Une interview plus que complète ! J’ai adoré lire ce beau parcours. Le meilleur à toi et ta famille pour la suite !
Bon parcours et belle continuation pour votre famille. Merci d’avoir partagé ton bonheur. Avoir des enfants, c’est qu’on a de meilleur dans une vie comme cadeau. Ils sont les anges du ciel, les enfants sur terre.
très bonne interviewe
Vraiment top l’entretien,
C’est très enrichissant à tous points de vue !
Merci pour cette interview!
J’arrive également sur Toronto avec ma compagne à partir de décembre 2019 et je suis également développeur. Je pense que ça va être l’aventure entre la recherche d’appartement et d’un nouveau job.
D’ailleurs, penses-tu que la recherche d’un job en tant que développeur sur Toronto a changé au cours de ces dernières années (surtout pour un PVTiste) ?
D’avance merci,
Christopher
Salut Christopher,
Tous les développeurs que je croise á Toronto n’ont eu aucun souci a trouver du boulot surtout si tu es dans le dev mobile. C’est les employeurs qui viennent a toi 🙂
Au sujet du logement, c’est certain que Toronto est une ville chère mais les salaires sont également plus élevés qu’en France 🙂
Merci beaucoup pour ces précisions 🙂
Hey super témoignage ! Je pars aussi à Toronto avec très peu d’attente depuis longtemps , je pense comme ça pour toutes mes destinations car au final c’est une merveilleuse aventure à chaque fois, .. attention décollage dans 2 jours ! héhé
Souhaitez-moi bonne chance
Et merci encore 🙂
Bonne chance Virginie ! Ne t’attarde pas sur le côté esthétique de la ville, Toronto est une ville à vivre et il faut s’imprégner de son ambiance 🙂
Si tu as la moindre question, n’hésite pas à me la poser !
Bonne chance 🙂
Wow ça donne envie !! Je n’ai jamais mis les pieds à Toronto. Je pense qu’avec mon PVT en poche ce sera une de mes destinations phares de mon voyage. J’ai vécu 2 ans au Québec, durant mes études ! Je suis tombé en amour de Montréal à cause que c’est une ville cosmopolite et multiculturel. J’ai hâte de découvrir le reste du Canada, et ses diverses provinces.
Super témoignage
Super interview !! 🙂
Une phrase m’a particulièrement frappée et aucune autre ne saurait résumer aussi bien le PVT : « Je recommanderais aux pvtistes de ne pas trop imaginer leur PVT, parce que trop se projeter (et surtout trop idéaliser son PVT), c’est multiplier les risques d’être déçu. Il vaut mieux partir avec des attentes assez basses et voir ce qui se passe ». C’est tellement vrai !! 😀
Hey ! Ça fait plaisir de lire ce genre de témoignages, tout à fait honnête sur la vie en PVT, aussi bien sur les avantages que sur les inconvénients/difficultés. Continue comme ça c’est top, merci ! Portez-vous bien 😉
Avec plaisir Marie 🙂
{{like.username}}
Chargement...
Voir plus