28 Damien, Japon

Partir au Japon après un bore out* : fascination et choc culturel

Victime d’un ennui profond tant sur le plan personnel que professionnel, j’ai décidé de tourner la page et de partir au Japon pour me changer un peu les idées. À la base, je voulais faire un tour du monde, puis en y réfléchissant bien, je me suis dit que vivre dans un pays un an et voir vraiment le fonctionnement d’une société, ses dérives et ses bonnes choses me correspondait davantage. Initialement, j’ai choisi le Japon par solution de facilité car deux ans auparavant, j’y étais allé et le pays m’avait fasciné. J’ai commencé à m’intéresser à la langue japonaise six mois avant le départ. Ce qui est fascinant au Japon, c’est de voir un pays aussi développé que la France, voire plus sur certains aspects, aussi riche, mais aussi, à tout point de vue, absolument différent. C’est incroyable à quel point le Japon et la France sont différents ! Ils s’adorent : les Japonais adorent les Français, les Français aiment beaucoup les Japonais (ou la culture japonaise), mais on n’a rien en commun ! Tu as l’impression de débarquer chez E.T !

Quand je suis arrivé, pour me créer un quotidien, ça a été compliqué dans le sens où j’étais un peu perdu, avec la langue, tous les kanjis** que tu vois un peu partout, et puis cette différence culturelle assez importante fait que tu n’as absolument pas de repères. Par contre, l’avantage, c’est que cette différence est positive pour ceux qui vont au Japon parce que les Japonais sont très gentils, donc ils vont t’aider quoi qu’il arrive !

Autre point culturel, les Japonais n’expriment pas d’avis : ce n’est pas bien de contredire l’autre au Japon, dans cette société, on ne t’apprend pas à dire « non » !

Même dans leur langue, ils ont une expression pour exprimer ça : kūki o yomu, ce qui signifie littéralement « lire l’air ». Quand tu interagis avec un interlocuteur, il faut que tu lises l’air, que tu arrives à lire dans le ton de sa voix ce qu’il a voulu dire. Parfois, on peut te dire « Oui oui, je veux bien venir boire un café avec toi demain », mais l’intonation et le langage corporel montreront l’exact opposé.

Si communiquer n’est pas insurmontable, se comprendre n’est pas un jeu d’enfant ! En règle générale, un Japonais qui reste au Japon va être très lisse émotionnellement alors qu’un Japonais qui voyage hors du Japon aura tendance à avoir pris du caractère, du corps, comme le vin ! Il devient vachement intéressant, il a tendance à voir son pays d’une autre manière, à avoir un avis et à sortir de son côté robotique que la société japonaise lui inculque. Au final, il garde ce côté respectueux, gentil, dévoué, mais à côté de ça, il arrive à avoir une opinion, à dire non, à s’exprimer. C’est ultra intéressant.

Travailler au Japon, c’est largement possible !

Après avoir passé les premières semaines de flottement liées au changement de contexte, j’ai pris les devants et je me suis inscrit dans une école de japonais. Dès ma première leçon, ça m’a plu, j’ai fini par prendre trois mois de cours, histoire d’avoir des bases de japonais et en même temps, j’ai cherché du travail. Les Français sont souvent apeurés par rapport au fait de trouver un travail ici, mais à Tokyo, ce n’est pas difficile car souvent, les employeurs te demandent plus l’anglais que le japonais. En trois semaines, j’ai trouvé trois boulots ! Par contre, il ne faut pas être exigeant sur le travail trouvé ainsi que sur les conditions, plus difficiles qu’en France.

Le premier taf que j’ai trouvé, c’était serveur de yakitoris*** : ce n’était pas très bien payé, je servais des yakitoris dans une équipe qui était française (ce resto ne recrute que des Français), c’est le passage obligé de beaucoup de pvtistes au Japon ! Après, j’ai trouvé du boulot dans une école française en tant qu’assistant du prof de français puis un poste de rédacteur pour un site internet français (sur les chiens, rien à voir avec le Japon !). Au total, durant mon PVT, j’ai eu six expériences professionnelles sans réelle difficulté et avec un niveau de japonais se situant entre faible et inexistant.

Avoir une petite amie japonaise, ce n’est pas toujours facile Ma copine, c’est une Japonaise typique ! C’est une Japonaise qui n’a vécu qu’à Tokyo et qui aurait pu bouger mais qui ne l’a pas fait. Franchement, c’est compliqué, vraiment très compliqué ! Déjà, elle ne parle que japonais et au moment de notre rencontre, je n’étais pas une foudre de guerre en japonais…

Partager des émotions dans une langue que tu ne connais pas trop, ce n’est pas simple, mais malgré tout, j’ai l’impression que la barrière de la langue n’est pas la seule difficulté : ça reste aujourd’hui complexe d’avoir un échange sur nos émotions, même si le temps passé ensemble nous fait comprendre davantage l’autre ainsi que sa culture. Par exemple, pour avoir son avis, je dois lui poser vingt-huit fois la question et encore, je n’ai même pas un avis tranché ! Genre, le resto, c’est toujours moi qui dois le choisir, les Japonais ne se mouillent pas. Mais cette différence est enrichissante tant pour elle que pour moi. Grâce à elle, j’apprends à être plus calme et plus patient, à « gaman » comme ils disent, qui se traduirait par endurer. Et, grâce à moi, elle s’affirme, ose, agit en tant qu’individu et moins en tant que membre de la société japonaise.

Projet de pèlerinage

Quand j’ai préparé mon voyage, j’avais prévu de faire le pèlerinage de Shikoku dès mon arrivée au Japon. C’est un pèlerinage de quatre-vingt-huit temples qui se situent sur l’île de Shikoku, la quatrième île principale du Japon, la plus petite et la plus rurale.

Les pèlerins rendent hommage, sur la route, à Kōbō-Daishi, le fondateur de l’école Shingon de la religion bouddhiste. Plus d’un millénaire auparavant, il a lui-même réalisé ce pèlerinage et, depuis, de nombreux « henros » (pèlerins en japonais), suivent ses pas.

Aujourd’hui, de nombreux Japonais font cette marche en ayant un autre objectif, comme par exemple commémorer un événement tragique ou célébrer une heureuse nouvelle. Après la catastrophe de Fukushima, des centaines de pèlerins ont afflué pour commémorer les défunts.

N’étant pas particulièrement croyant, j’avais souhaité réaliser ce pèlerinage dans un but d’introspection, pour faire une coupure avec ma vie quotidienne en passant du temps sur les routes à réfléchir aux choses qui me sont vraiment essentielles. J’étais donc parti dans cette idée, sauf qu’une semaine après mon arrivée au Japon, j’ai changé tous mes plans ! D’abord, par contrainte administrative, puis par simple choix, grâce au hasard des rencontres !

Un PVT pour (ré)apprendre à se faire plaisir

Si le Japon m’a appris quelque chose, c’est de ne pas hésiter à m’offrir des formations et à me faire plaisir. Par exemple, lorsque j’ai décidé de prendre des cours de japonais, je n’avais pas pour but de le parler à l’avenir. Je les ai tout de même pris, tout simplement par plaisir !

À la base, j’étais peut-être un peu radin, je faisais attention à ne pas dépenser trop, mais aujourd’hui je suis beaucoup plus ouvert à dépenser de l’argent pour mes envies personnelles, pour les vrais kiffs quoi ! Pas pour me payer la dernière montre hors de prix, mais pour me payer une formation, oui !

Pourquoi choisir le Japon ?

Le Japon, c’est un pays extraordinaire. Ce n’est pas que Tokyo, Kyoto, les sushis ou les mangas, il ne faut pas caricaturer ! C’est un pays très diversifié, avec un environnement très riche, des randos magnifiques, notamment à Hokkaido, et des îles paradisiaques.

Le Japon a plein de qualités et de défauts dont certains très costauds. Par exemple, la place des femmes est très différente au Japon et de nombreuses Françaises pourraient être surprises de la place qui leur est réservée. C’est quelque chose à savoir avant d’aller dans le pays. Cependant, en tant que française, vous n’aurez pas à subir ce que les Japonaises peuvent parfois subir. C’est un pays magnifique, j’encourage tout le monde à y aller, mais il faut parfois s’accrocher ! Souvent, quand je lis des reportages sur le PVT, je vois, chez les déçus, qu’ils n’ont pas réussi à s’intégrer à la culture locale, qu’ils n’ont pas réussi à se faire des amis parmi les locaux ou du moins à s’enraciner dans le pays dans lequel ils vont.

Il faut apprécier le pays pour ce qu’il est, pour ses qualités et ses défauts.

* Syndrome d’épuisement professionnel par l’ennui.
** Caractères de l’écriture japonaise, empruntés du chinois.
*** Brochettes typiquement japonaises.

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